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Je souhaite vous faire découvrir cette semaine L'Académie d'Art Betsalel de Jérusalem qui est une véritable institution ici en Israel
Pour la première fois en septembre 2009, l’Académie Betsalel s’exposait à l’étranger
Pour la première fois en septembre 2009, ce n'étaient pas des artistes individuels sortis de Betsalel, mais l’Académie elle-même qui s’exposait à l’étranger. A l'Orangerie du Sénat, du 16 au 29 septembre 2009 et de 11h à 19h, une sélection de travaux d’élèves était présentée au public francophone. Une exposition intitulée : Cent ans de Dialogue par l’Art.
Yona Fisher, en charge de l'exposition, a répondu à nos questions sur les objectifs de cette exposition. Conservateur de musée depuis cinquante ans, il est accessoirement le fils du Premier ambassadeur de France en Israël (Maurice Fisher, 1949-1952). Tout un symbole, puisque c’est avec lui que Betsalel exposait pour la première fois hors des frontières d’Israël. « Nous avons voulu en faire une exposition itinérante », souligne-t-il. Après Paris, c’est Marseille qui est pressentie.
Céramique, verre, architecture… Mais aussi design industriel, communication visuelle. Des courts métrages de deux à huit minutes ont été inclus à l’exposition, car il existe aujourd’hui un département des Arts de l’écran à Betsalel. « L’Académie d’art de Betsalel est reconnue comme l’une des mieux équipées au monde. C’est une académie qui touche à tout, y compris au niveau théorique et philosophique. »
La plupart des élèves représentés étaient en dernière année, « mais pas tous : certains étaient seulement en 2ème année tandis que d’autres étaient des anciens de l’Ecole. J’ai voulu montrer au public ce que celle-ci a donné de meilleur, englobant aussi bien nos anciens élèves que certains nouveaux arrivants. » Une soixantaine d’élèves exposés en tout. Parmi eux, deux Arabes chrétiennes de Galilée.
Les œuvres des élèves n’échappent pas au contexte politique
Des défis "politiques" ont du être relevés pour venir à bout du projet : "Les bonnes dames du B’nai Brit m’ont demandé de ne pas montrer des travaux trop embarrassants relatifs au conflit israélo-palestinien. J’ai dit que je ferais mon possible, mais je sais qu’il est absolument impossible de montrer des œuvres de jeunes artistes ou d’élèves sans que ne soit présente une intention politique, aussi métaphorique en soit l’expression. Essentiellement, les œuvres d’art sont issues de leurs temps, expriment leurs temps, et les œuvres des élèves n’échappent pas au contexte politique."
Et pourtant, Yona Fisher a obtempéré : "Bien que la liberté intellectuelle soit essentielle à la vie de l’art, il m'a fallu tenir compte de la sensibilité du public, largement constitué de Juifs français. J’ai évité pas exemple d’inclure à l’exposition une représentation montrant un soldat israélien frappant un jeune palestinien ligoté… Ces œuvres sont susceptibles de heurter la sensibilité du public et ce n’est pas le but recherché. »
L'histoire de l'illustre école d'art israélienne est inséparable de l’histoire sioniste du pays.
Sensibilité post-sioniste de certains élèves ? Et pourtant, l'histoire de l'illustre école d'art israélienne est inséparable de celle du sionisme : en 1905, avec l’aide du Fonds National Juif, Boris Schatz acquiert deux constructions de style ottoman dans ce qui deviendra plus tard le centre ville de la Jérusalem moderne, pour y créer dès 1906 l’École d’Art et son musée attenant. Boris Schatz, à l'origine Shlomo Zalman Dov Baruch Schatz, peut-être le plus renommé des artistes israéliens, est né en 1867 en Lituanie et descend d’une lignée de rabbins. Il commence par étudier dans une yechiva, puis dans une école de dessin à Vilna.
En 1903, il rencontre Théodore Herzl à Vienne et lui confie son projet de créer, à Jérusalem, une école nationale d’art juif. Herzl lui demande quel sera le nom de cette école ; Schatz répond : "Betsalel bien sûr !" Pour cet ancien bakhour yechiva reconverti aux arts, c’est un choix qui s’impose : dans la Bible, Betsalel est chargé de réaliser les travaux artistiques consacrés à l’embellissement du Tabernacle, et en particulier la Menorah (chandelier) d’or pur qui, plus tard, sera transportée au Temple de Salomon. D’où la menorah qui surplombe aujourd’hui la Maison des artistes ?
Le Mouvement sioniste mondial soutient le projet de Schatz. Ce dernier espère, à travers l’art, former des "Juifs nouveaux" dont les racines plongeront aussi bien dans ce pays neuf que dans la culture des ancêtres. C’est bien avant le modèle du kibboutz, qui développera sa propre vision du "Juif nouveau"...
En 1965, le Musée Betsalel sera transféré au Musée d’Israël et en 1990, c’est au tour de l’École d’art d’être transportée à proximité de l’Université hébraïque, sur le Mont Scopus. L’immeuble de l’Ecole devient alors la "Maison des Artistes", où se succèderont diverses expositions d’artistes israéliens. Avis aux touristes : cette Maison des artistes abrite également l’un des meilleurs restaurants de Jérusalem, au cadre authentique : murs de pierres, chaises et tables en bois, bar ouvert la nuit avec éclairage tamisé.
L’Ecole Betsalel acquiert assez vite une réputation d’excellence. Les artistes israéliens qui y ont fait un bout d’études le mentionneront toujours avec fierté. Riche de 2000 étudiants et de huit départements, Betsalel s’efforce d’être constamment à la pointe. Sur la scène internationale, des artistes issus de Betsalel ont séduit musées et galeries qui les ont exposés des Etats-Unis au Japon.
Nathalie Szerman