Barack Obama et la guerre médiatique, acte 1 |
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![]() Il fallait s'y attendre. Promesses électorales non tenues ou franchement précipitées, lobbys et groupes de pressions qui se sentent lâchés ou trahis, la côte de popularité du Président américain n'est pas au beau fixe. Son image dans la presse se détériore franchement. Face aux critiques des médias, la Maison Blanche a décidé de contre-attaquer en visant tout particulièrement la chaîne conservatrice Fox News, qu'elle accuse purement et simplement d'avoir déclaré "la guerre à Barack Obama". |
C'est la directrice de communication de la Maison Blanche, Anita Dunn, qui a mené la charge, lors d'interviews accordées ces derniers jours à la chaîne CNN, au magazine Time et au quotidien New York Times. S'attaquer à Fox News, la stratégie est loin d'être sotte. La chaîne Fox News a l'image d'un média républicain populaire qui ne pousse pas souvent très loin les analyses ; ses commentateurs et présentateurs, dont les propos ne sont pas toujours très nuancés, invitent volontiers sur leurs plateaux des personnalités crédibles pour appuyer parfois assez durement leurs critiques de la politique de la Maison Blanche. En général, l'électorat de base démocrate n'aime pas trop. Et justement, Fox News tape un peu fort, mais son patron Rupert Murdoch (photo), n'a pas souhaité relayer pour autant les véritables campagnes, dont certaines frisent la "contre-information". Le quotidien "Washington Times", qui a la réputation d'être contrôlé par la secte Moon ou le magazine "American Spectator" y vont beaucoup plus franchement, à la limite de la caricature, ou de la diffamation. Ce ne sont pas à ces détracteurs-là que s'attaque Obama. Pas de chasse aux sorcières aux "Croisés" anti Obama en vue, donc… Sa "communication" ne va pas répondre aux organisations anti-avortement, au puissant lobby des armes à feu et aux racistes américains qui rappellent que Barack s'appelle aussi Hussein ou qu'il ne serait pas né sur le territoire américain, comme l'exige la Constitution américaine… Obama dans le rouge médiatique Barack Obama doit affronter une opposition croissante à son projet de réforme du système de santé, une inquiétude grandissante de l'opinion publique face au conflit afghan et un malaise persistant quant à la situation économique. Le président américain a également subi un revers avec la défaite de sa ville de Chicago dans la course à l'organisation des jeux Olympiques d'été de 2016, sans compter que son prix Nobel de la Paix lui a attiré plus de hallebardes que d'éloges. Certains chroniqueurs américains n'hésitent pas à parler d'un "piège suédois qui risque d'enfermer Washington dans une logique diplomatique pacifique" que l'Amérique ne peut pas assumer. En effet, il est difficile d'imaginer que les Etats-Unis abandonnent leurs ambitions sécuritaires en Afghanistan tant que le problème d'Al-Qaïda ne sera pas réglé. C'est d'ailleurs très discrètement qu'il a annoncé l'envoi de près de 65 000 soladts américains supplémentaires en Afghanistan. Pour l'industriel de l'Illinois ou le fermier du Wyoming, l'attribution d'un Nobel à un Président en exercice, c'est plutôt un accident... C'est dans ce contexte qu'Anita Dunn a déclaré au New York Times de lundi 12 octobre, en parlant de la chaîne Fox News du magnat des médias Rupert Murdoch, que la Maison Blanche allait "la traiter comme on traite ses adversaires". Fox News, un journalisme d'opinion… "Puisqu'ils mènent une guerre contre Barack Obama et la Maison Blanche, nous ne sommes pas obligés de faire comme s'il s'agissait du comportement normal d'une organisation de presse", a-t-elle insisté. Quelques jours plus tôt, cette stratège en communications chevronnée du Parti démocrate avait, dans le magazine Time, dénoncé Fox News comme une chaîne de "journalisme d'opinion déguisée en chaîne d'information". "En réalité, Fox News agit souvent comme un auxiliaire du Parti républicain", insistait-elle encore dimanche 11 octobre sur CNN, prévenant que la Maison Blanche ne "resterait pas un témoin passif" face à des opposants qui tentent de "faire chuter le président et sa présidence". La riposte a notamment pris la forme d'un message publié sur le blog de la Maison Blanche, Whitehouse.gov, dénonçant "les mensonges de Fox" et "une tentative de diffamation visant les efforts de l'administration pour obtenir les jeux Olympiques". Le blog de la Maison Blanche s'en prend tout particulièrement à Glenn Beck, un animateur conservateur qui a son émission sur Fox News, qu'elle accuse de lancer des attaques partisanes pour faire monter l'audience. Glenn Beck, critique inlassable de l'administration Obama, a qualifié en juillet de "raciste" le premier président noir des Etats-Unis, qui aurait selon lui "une haine profonde des Blancs". Pour Larry Sabato, directeur du Center for Politics à l'université de Virginie, la Maison Blanche s'en prend à Fox News parce que "la base démocrate commence à être plus critique envers Obama". Après son arrivée au pouvoir, "on s'attendait à ce qu'en un mois, le monde soit transformé, et ce n'est pas tout à fait ce qui s'est passé", explique-t-il. "Donc, si vous êtes dans cette situation et que vous avez besoin de rallier vos partisans, il vous faut trouver un ennemi commun", poursuit-il, soulignant que la base démocrate déteste les médias de droite. Interrogée par l'Agence France Presse sur ces attaques venant de la Maison Blanche, la direction de Fox News a renvoyé aux déclarations de Michael Clemente, son vice-président chargé des médias, dans le New York Times et sur CNN. En s'en prenant à Fox News "au lieu de gouverner, la Maison Blanche est toujours en mode 'campagne'", a déclaré M. Clemente, conseillant à l'exécutif de "consacrer son énergie aux problèmes importants qui inquiètent les électeurs". "Attaquer le porteur du message, à la longue, cela ne fonctionne jamais", a-t-il mis en garde. |