
28-03-2010
Nous devons êtres fiers de nos soldats et nous ne le disons pas assez. Pour notre génération de la Guerre des Six Jours, nous avions tendance à fustiger ces troublions aux jeans troués parce qu’on les croyait moins solides alors que ces jeunes excités s’engageaient à la guerre pour mettre leurs convictions en accord avec leurs actes. Ils vivent leur sionisme dans leurs tripes et leur idéal vibre dans ce pays où parfois le lait et le miel sont remplacés par des larmes et du sang. Nombreux sont ceux qui portent l’habit militaire sans chercher à faire de la figuration parce que, leurs concitoyens étant en danger, ils veulent se battre, régler un compte avec leur conscience de préférence dans les unités d’élites.
Ils choisissent de faire les dizaines de kilomètres quotidiens avec leur barda de 60 kgs sur le dos, sans oublier souvent de glisser leurs tefillins dans la poche. Ils se postent en embuscade des nuits durant, tapis derrière un buisson, pour intercepter les terroristes qui drainent avec eux la violence, la haine et la mort.
Ils intègrent les bataillons Golani pour prouver aux yeux du monde que les Juifs ne sont pas des bras cassés. Comme toutes les générations d’Israël, ils se substituent à leurs parents en réconfortant leurs mères, au tempérament trop juif, en leur faisant croire qu’ils se dorent la pilule, au soleil, entourés de filles, dans une base du centre du pays tandis qu’ils crapahutent aux portes de Gaza.
Puis, tous les jours, ils jouent à cache-cache avec cette Dame de l’Aube qui leur tend les bras et qui, d’ordinaire vêtue de sa robe de bure noire, les encourage à venir l’étreindre dans le piège de son baiser. Cette nuit-là, elle s’était faite toute belle, parée de blanc à l’image d’une belle entreprenante au visage envoutant.
Le major Eliraz Peretz pouvait difficilement ne pas être subjugué par son apparition insolente, lui, le garçon isolé dans une solitude volontairement acceptée et loin des bras protecteurs de sa mère. Puis la belle de l’Aube l’a captivé de son regard, lui a insufflé son désir de l’étreindre, la enlacé pour l’amener à se compromettre à ses côtés, allongée dans un lit de chêne, à l’abri des regards, dans le carré militaire du mont Herzl à Jérusalem.
Et quand le piège s’est refermé sur lui, on imagine son dernier cri, sa dernière pensée, son dernier souhait, sa dernière volonté. On imagine aussi la visite de son officier supérieur venu à Eli, au cours de la nuit, sonner à la porte de parents restés dignes devant le malheur car Eliraz, tout comme son frère mort au champ d’honneur du Liban, avait choisi sa voie en toute conscience et en toute liberté.
Il n’était pas un kamikaze au destin déjà tracé et à l’issue irrévocable parce que, lui, se battait pour la vie, pour que son pays résiste, pour que l’horreur s’arrête, pour que les Juifs du monde soient fiers de ce « petit pays de merde ». Mais il n’avait jamais songé un seul instant à punir sa mère ; il n’avait jamais songé à rouvrir intentionnellement une plaie qui restera éternellement béante tant il se croyait invulnérable.
Ces jeunes à la conviction profonde, frisant parfois l’inconscience, excitent notre fierté et nous montrent que le bien-être de la collectivité passe par le sacrifice de soi. Mais la punition est trop injuste pour ceux qui l’ont mis au monde et à défaut de maudire le Ciel, parce qu’Eliraz était croyant et pratiquant, il leur restera toujours la solution de tancer vertement la Dame de l’Aube, venue cette fois encore, trop tôt à leur gré, s’inviter alors qu’elle n’était pas attendue.
Il ne fêtera pas cette année la libération et l’avènement du peuple juif tout comme Guilad Shalit dont les geôliers se vengent pour punir collectivement le peuple du livre, coupable de vouloir toujours se défendre. N’oublions pas, en cette veille de Pessah, le sacrifice de nos jeunes et la souffrance de Guilad Shalit.