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BILLET D’HUMEUR : TEVA ET LES PILULES BLEUES
Par Jacques BENILLOUCHE
Les jours du brevet sur le viagra sont comptés puisque la bataille acharnée entre la société américaine Pfizer, inventeur du produit, et Téva tourne au profit de la société israélienne. Pour l’instant, seule la Cour Suprême brésilienne a décrété la fin de l’exclusivité du laboratoire pharmaceutique américain sur la fabrication du viagra au Brésil. Cela implique que le brevet entre dans le domaine public et que Téva serait en droit de fabriquer les petites pilules bleues et de les diffuser en Israël.
Cette péripétie commerciale n’est pas un mince gadget et n’est pas vue de manière anodine outre-Atlantique puisque ce conflit est devenu un casus belli politique. En effet, l’Administration américaine, dans tous ses états, demande au gouvernement israélien de freiner, rien que cela, le développement de Téva. Elle a menacé de « conditionner leur soutien à l'intégration d'Israël au sein de l'OCDE à la signature d'accords portant sur la prolongation de la protection des brevets » si Téva prenait la décision de fabriquer un générique du produit sorti en France seulement depuis 1998. De là à ce que les canonnières américaines soient envoyées au large de Haïfa pour contrer le viagra israélien, il n’y a qu’un pas tandis que les adeptes du bonheur en bleu sont prêts à soutenir tous les sièges.
Les amis du viagra pestent quand les américains s’opposent à la baisse de 50% du prix des pilules dont la paire coûte actuellement 29 euros soir 140 NIS. Le traitement de la dysfonction érectile devient une affaire d’Etat et semble virer à un chantage politique. Le Congrès américain, qui n’a pas d’autres soucis actuellement, veut bien prendre l’affaire en main pour défendre les droits américains. Il est vrai qu’un marché de 35 millions d'hommes, qui ont dépensé en 2009 la coquète somme de deux milliards de dollars, ne peut pas être abandonné à la légère. On pourrait alors se demander pourquoi vendre des Airbus ou des missiles si les petites pilules bleues inoffensives, certains diraient offensives, rapportent beaucoup d’argent et surtout, apportent beaucoup de bonheur sans occasionner le moindre mort. Téva devrait proposer la formule du viagra aux iraniens qui pourraient peut-être, dans l’euphorie, renoncer à leur programme nucléaire et transformer leurs usines de mort en fabriques de bonheur bleu, tout en améliorant leur taux de natalité pour envahir Israël. La population iranienne, tellement malheureuse sous la coupe des Mollahs, considèrerait alors que le petit plaisir couleur ciel azur n’a pas de prix.
Mais, les laboratoires titulaires des brevets sont inquiets car, selon l’Administration américaine, la libération des formules pourrait s’étendre à d’autres médicaments qui traitent le cancer, le diabète, l’hypertension et la leucémie. Le seul danger dans ce cas serait la réduction des profits gigantesques des trusts pharmaceutiques qui ne cessent de nous faire pleurer sur la baisse de leurs revenus. Et alors ? L’humanité ne s’en porterait que mieux.