Merci Frédéric pour l'envoi de ce texte
De la lutte des classes à la lutte des races
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Nous devons reconnaître que la fameuse maxime du grand chimiste Lavoisier (paraphrasant une citation d’Anaxore de Clazomènes), rien ne se perd, rien ne se crée, tout se transforme, s'applique aussi aux idéologies.
En effet, malgré le déclin puis la fin des «grands récits» (Lyotard), dont le marxisme faisait partie, force est de constater qu’à notre époque les doctrines marxistes telles que la figure idéelle du prolétaire-opprimé, la lutte des classes (visant à la fin des classes sociales) et l’internationalisme (visant au dépassement des nations dans une communauté humaine mondiale) sont recyclés - souvent de manière inconsciente – dans nos sociétés occidentales.
Le symbole du prolétaire, membre de la classe dominée, n’étant plus d’actualité, c’est l’étranger-de-type-non-
Après tout, le processus de décolonisation avait déjà avancé l’idée que l’étranger issu du tiers-monde était une victime de l’Occident riche, bourgeois et colonialiste (des hommes tels que Franz Fanon, Che Guevara, Fidel Castro, Patrice Lumbumba ou encore le terroriste Yasser Arafat devinrent les coqueluches des courants de la gauche révolutionnaire).
Parlons d' une autre doctrine de la pensée marxiste recyclée aujourd’hui : la conscience internationaliste. Depuis des années maintenant, la mondialisation (cette nouvelle «internationale» par définition même!) est en train de rendre presque obsolètes les frontières des nations occidentales, au profit de la venue de millions d’étrangers-non-occidentaux, substituts modernes – dans la psyché de la gauche – du prolétariat [1].
Il va de soi que tous les étrangers ne se valent pas pour les mouvements de gauche. Les personnes venant d’Asie du sud-est, par exemple, ne rentrent pas dans la catégorie glorieuse de l’Étranger. Ces asiatiques vivant en Occident ne possèdent aucun intérêt politique pour les idéologues de gauche puisque ces communautés asiatiques n’expriment pas de rage révolutionnaire antioccidentale, antisociale et antisioniste (l’antisionisme est une constante dans la majorité des courants marxistes et non marxistes de la gauche et de l’extrême gauche), à la différence d’une grande partie des étrangers venus du Maghreb et d’Afrique noire, par exemple.
La figure du prolétaire idéalisé en «homme universel» (Raymond Aron), parait donc en tant que telle caduque et c’est donc l’étranger, sous une forme tout aussi idéelle que l’était le prolétaire, qui l’a remplacé. Rappelons que l’universalisme, qui selon la doxa véhicule l’idée flatteuse d’unité du genre humain (ou de portée universelle des exigences morales) est en fait un concept «inventé» par les puissances grecque (surtout à partir du moment où Alexandre le Grand décida de créer un empire) et romaine afin d’imposer leur pouvoir en tentant d’unir les peuples conquis sous la bannière d’ «un ordre unique (et) d’une pensée universelle» (Denise Bonan).
L’universalisme tend donc à s’imposer comme une doctrine qui pousse à se soumettre à l’uniformisation. Mais ne nous trompons pas de cible; nous rejetons totalement la critique de l’universalisme – comprenez occidental - telle qu’elle fut exprimée notamment par Pierre Bourdieu.
Quant au communautarisme, nous pouvons dire que le relativisme culturel a réussi son travail de sape en donnant autant d’importance aux cultures communautaires qu’à La culture dominante (donc par principe suspecte pour la gauche). Le communautarisme s’est alors développé en imposant petit à petit aux sociétés occidentales ses propres valeurs «universelles» (citons par exemple les interdits alimentaires imposés dans les écoles françaises au nom de la Charia pour tous !).
Nous pouvons dire que nous sommes passés de la doctrine, voire du fantasme, de la «lutte des classes» à celle de la «lutte des races». Les socialistes révolutionnaires et leurs sympathisants combattirent pendant des décennies le bourgeois au profit du prolétariat-homme-universel, aujourd' hui ils combattent l’homo occidentalis - qui recèle des origines «honteusement» juives- au profit de l’étranger-homme-universel.
Le problème est que cette «lutte des races» qui ne dit pas son nom s’est répandue dans les sociétés occidentales européennes (à gauche comme à droite d' ailleurs !) en soutenant de façon inconditionnelle les revendications des communautés étrangères (ou d’origine étrangère) non assimilables et fort souvent antisémites.
Ajoutons que l’étranger-non-occidental prétendument opprimé par l’Occident s' est substitué (et ce n'est pas un hasard) au réel-opprimé-universel, le peuple Juif dont Nietzsche disait qu’il «a parmi tous les peuples eu l’histoire la plus pénible».
Nous assistons donc au déplacement idéologique d’une figure idéelle de l’opprimé-homme-universel de type social à celle de l’opprimé-homme-universel de type racial.
[1] Les capitalistes ultra-libéraux comme les mouvements anticapitalistes se retrouvent paradoxalement unis, évidemment pour des raisons différentes, dans cette opposition aux notions de nation et de frontière.