EGYPTE - Les frères musulmans légalisés
Cinquante-sept ans après avoir été mis hors-la-loi, le mouvement islamique des « Frères Musulmans » vient d’être légalisé par le pouvoir militaire égyptien et pourra se présenter au mois de septembre – si toutefois elles ont lieu à la date prévue. La nouvelle formation portera le nom doucereux de « Parti de la Liberté et de la Justice ».
Personne ne peut encore dire à l’heure actuelle quelles sont les chances des « Frères Musulmans » d’obtenir des résultats qui leur permettraient d’influencer sur la vie politique égyptienne, mais ce qui est certain, c’est que durant les six décennies de leur semi-clandestinité, ce mouvement radical a tissé, telle une araignée, sa toile au sein de la société par le biais de réseaux d’entraide et d’organisations caritatives. Il s’agit du mouvement le plus structuré en Egypte actuellement. Cette technique propre à tous les mouvements de ce type (Hamas, Hezbollah etc…) a permis aux « Frères Musulmans » d’être très populaires au sein des couches défavorisées, majoritaires en Egypte, même si au niveau officiel ils étaient pourchassés et muselés. Ils espèrent maintenant que ce travail de longue haleine va enfin va être récompensé dans les urnes. En 2005, pour contourner leur mise hors-la-loi, ses représentants s’étaient présentés aux élections législatives, remportant 20% des sièges au Parlement. Mais lors des dernières élections, ils ne s‘étaient pas présentés et avaient appelé au boycott du scrutin, permettant à Hosni Moubarak de rafler toute la mise.
Le mouvement panislamique des « Frères Musulmans » a été créé en Egypte en 1928 par Hassan El-Bana, dont deux petits-fils sévissent à l’heure actuelle sur le continent européen : Tarik et Hani Ramadan. La doctrine d’Al-Bana et d’un autre théoricien, Sayyid Qutb, était de « lutter contre l’emprise laïque occidentale et l’imitation aveugle du modèle européen afin de créer un grand califat ». C’est ce mouvement qui relança l’idée du « Jihad » de la « Guerre Sainte » contre tout ce qui n’est pas musulman. Dès les premières décennies de leur existence, les « Frères Musulmans » ont soutenu le mouvement arabe en Palestine, dirigé par le mufti de Jérusalem Hadj Amin Al-Husseini, allié d’Hitler, et en 1935, le gendre d’El-Bana, Saïd Ramadan créa une branche armée en Palestine pour combattre les juifs. Les « Frères Musulmans » participèrent à la guerre contre Israël en 1948 Plus tard, certains de ses membres créèrent d’autres branches tels que la « Jama’a al-islamiya » ou encore le Hamas, et aujourd’hui ce mouvement a essaimé, sous d’autres appellations – parfois anodines – jusqu’en Europe et aux Etats-Unis.
Les « Frères Musulmans » ne reconnaissent pas l’Etat d’Israël et sont fermement opposés aux accords de paix entre Israël et l’Egypte. Leur chef de file actuel, le sheikh Youssouf Kardawi, était apparu sur la place A-Tahrir il y quelques mois après des années d’exil, et avait galvanisé les foules en appelant les musulmans « à reconquérir Jérusalem et la mosquée Al-Aqsa ».
A Jérusalem, on suit avec inquiétude ces derniers développements chez le voisin du sud, qui se rajoutent à nombre de déclarations et décisions qui ne présagent rien de très bon quant à la stabilité des accords signés entre les deux pays en 1977.
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