24.02.10
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Israël s'est engagé cette semaine dans une guerre imaginaire. L'ensemble des forces de sécurité du pays étaient mobilisées pour effectuer un exercice de défense civile de grande envergure, dans le centre du pays. La police israélienne, les soldats du front intérieur, les pompiers et le personnel de Magen David Adom étaient de la partie. Objectif : être prêts à gérer d'éventuelles attaques terroristes, conventionnelles ou non conventionnelles, en provenance de l'Iran, de la Syrie, du Hezbollah, voire du Hamas.
Gabi Ashkenazi, le 19e chef d’état-major de l’armée israélienne.
Photo: Ariel Jerozolimski , JPost
Alors que le commandant du front intérieur conduisait l'exercice, la République iranienne continuait de peser sur la tranquillité de l'Etat hébreu. Ses activités d'enrichissement d'uranium sont passées de 4 % à 20 %. Un bond vers l'obtention de l'arme nucléaire. La semaine précédente, Israël et la Syrie avaient échangé toute une batterie de menaces qui font craindre une reprise du conflit dans le Nord. Au Sud, enfin, des barils d'explosifs ont été découverts, échoués dans la mer par des terroristes palestiniens qui visaient des navires de la marine. Cette série d'événements aurait de quoi alimenter les inquiétudes de nombreux pays une année complète. Pour Ashkenazi, il ne s'agit que de deux semaines quasi-normales.
Faible quantité mais grande qualité
Le 14 février, le général a célébré son troisième anniversaire au poste de 19e chef d'état-major de Tsahal. Sa tâche, lorsqu'il succède à Dan Haloutz en 2007, n'est pas de tout repos. Le pays, et en particulier les officiers, ne se sont pas remis de l'échec de la seconde guerre du Liban. Il appartient à Ashkenazi de remettre Tsahal sur pied et de lui réinsuffler la force de persuasion qui lui fait désormais défaut. Son message ne changera pas : trois années durant, il bataille. "Il nous a indiqué très clairement que nous n'avions pas d'autres alternatives : nous sommes soit en guerre, soit en train de préparer la guerre !", raconte un officier supérieur.
Alors les hommes se préparent. Ashkenazi lance d'impressionnantes commandes de matériel : achat de nouveaux chasseurs de cinquième génération, de nouveaux missiles, véhicules de transports blindés, version mise à jour du système de défense antimissile Arrow... Pour autant, il ne se leurre pas. Les forces militaires israéliennes sont loin d'égaler, quantitativement, celles de leurs ennemis. Israël n'a pas plus de soldats que la Syrie, pourtant il les a beaucoup mieux formés. L'Etat hébreu n'a pas plus de chars que l'Egypte, mais ils sont sans aucun doute plus perfectionnés. Et alors que l'Arabie Saoudite est susceptible de détenir le F-15 ; et l'Egypte le F-16, Israël se dote de bombes intelligentes, spécialement conçues dans le cadre d'un système avancé de défense d'une guerre électronique.
Autant d'"avantages qualitatifs" qui vont de pair avec la formation au combat rapproché des soldats de la bande de Gaza et du Sud-Liban.
Le changement a été perçu alors que les erreurs commises au Liban n'ont pas encore été oubliées. L'opération Plomb durci de l'hiver dernier a donné l'occasion de prouver la puissance de combat de l'armée d'Israël, sa détermination et sa préparation. Les objectifs aussi ont été repensés. Plus modestes et plus accessibles qu'en 2006. Il s'agit alors de ramener le calme et la sécurité dans le Sud. La situation est extrêmement fragile. Le Hamas continue de se renforcer et d'acquérir des missiles capables de frapper Tel-Aviv. Les chiffres parlent d'eux-mêmes : en 2008, plus de 2 000 roquettes ont été tirées sur Israël, en 2009, on n'en compte plus que 200 - outre les centaines tirées durant les premières semaines de janvier.
"Nous connaissons un moment paisible. Mais c'est une fragile réalité !", a déclaré Ashkenazi lors d'une visite au siège du commandement responsable de l'exercice en cours. "Nous devons nous adapter à la nature changeante des guerres d'aujourd'hui. Les modifications opérées ont causé une menace pour le front intérieur et l'ont transformé en une arène opérationnelle." Ashkenazi se met en tête de développer les forces militaires de Tsahal. "L'armée israélienne doit faire face à des défis et des menaces que présentent des ennemis qui doivent encore accepter notre existence ici."
Barak et Ashkenazi, les frères ennemis
Au-delà de ces dangers, Tsahal se trouve confronté à une nouvelle sorte de menaces : le programme nucléaire iranien. La Défense soutient les appels lancés par la communauté internationale et cherche à augmenter les pressions envisagées contre l'Iran. Ashkenazi est un fervent partisan des sanctions, depuis la prise de ses fonctions. Il a, lors de pourparlers tenus à huis clos, exprimé à plusieurs reprises ses convictions : le régime de Téhéran est rationnel, et céderait à d'importantes pressions économiques.
Mais en même temps, Ashkenazi est chargé d'un autre rôle : celui de superviser les préparations des militaires israéliens à un éventuel ordre de bombardement des installations nucléaires de l'Iran. Ce scénario est assimilé par l'ensemble des responsables des forces aériennes. La question, explique l'un des officiers, "n'est plus de savoir si nous pouvons le faire, mais si nous devons".
Autant de tensions qui empoisonnent les relations entre le général et le ministre de la Défense, Ehoud Barak. L'idée de prolonger le mandat d'Ashkenazi a flotté dans les airs, en particulier depuis que le gouvernement a successivement reconduit les fonctions du chef du Mossad, Meir Dagan, et du chef du Shin Bet (Agence israélienne de sécurité), Youval Diskin. Si les problèmes sont tels que ces deux pontes de la sécurité doivent se maintenir à leurs postes, pourquoi n'en serait-il pas de même pour Ashkenazi ? La différence est pourtant de taille. Dans le cas de Dagan et Diskin, l'homme qui prend les décisions finales est le Premier ministre, et non le ministre de la Défense, qui aimerait bien reprendre les rênes du gouvernement.
D'après des propos rapportés par la télévision israélienne, Ashkenazi serait sorti furieux du bureau d'Ehoud Barak alors que celui-ci lui dictait sa conduite à tenir. Le ministre qui aspire à revenir au pouvoir ne peut tolérer être au second plan. Et doit intervenir.
Les relations entre Barak et Ashkenazi en paient les conséquences. Les deux hommes ne sont pas d'accord lorsqu'il s'agit des nominations des membres de l'état-major. La question, notamment, du subalterne d'Ashkenazi, pose problème. Alors que ce dernier approuve la nomination du général Gadi Eizenkot, Barak préfère le général Yoav Galant. Dans l'impasse, ils ont finalement opté pour le général Benny Gantz, qui servait en tant qu'attaché militaire à Washington.
D'autres nominations devront être envisagées dans l'année à venir. Le chef des renseignements militaires, le général Amos Yadlin, a prévu de démissionner l'été prochain, tout comme le responsable de la direction des communications, le général Ami Shafran. Ashkenazi et Barak auront à se prononcer sur leurs remplaçants, provoquant un remaniement de l'état-major. Des décisions qui devraient concerner la promotion de certains généraux, tels qu'Aviv Kochavi, qui a récemment terminé un mandat à la tête de la Division des opérations et est en attente d'une nouvelle nomination.
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