La discuptation papale signnifie t-elle plus jamais d'holocaustes ?
David Turner
J Post, Mardi 08 mars 2011
Adaptation française de Sentinelle 5771 ©
Le 2 mars, dernier jour de réunion du Comité de Liaison International Catholique-Juif (ICJLC)
à Paris, des extraits du second volume du Pape Benoît XVI « Jésus de Nazareth : semaine sainte », ont été publiés dans la presse. Selon les extraits, le pape était d’accord avec la Déclaration de 1965 du Vatican sur la relation de l’Eglise avec les Religions non chrétiennes (Nostra Aetate) demandant aux Catholiques de ne pas lire les Evangiles comme blâmant aujourd’hui les Juifs de la culpabilité dans le procès et la crucifixion de Jésus. Selon le livre du pape, comme dans ‘Nostra Aetate’, les Juifs actuels sont « disculpés » de l’accusation de déicide. Des dirigeants juifs à travers le monde, dont le Premier ministre d’Israël Benyamin Netanyahou et Abe Foxman de ‘l’Anti-Defamation League’ ont accueilli chaleureusement cette annonce.
Dans les extraits, le pape répondait à l’accusation de déicide apparaissant dans l’Evangile de Matthieu (27 :25), Son sang est sur nous et sur nos enfants ! « Comment écrivait le pape, tout le Peuple juif pouvait-il avoir été présent à ce moment pour réclamer la mort de ‘Jésus’ ? En d’autres termes, la culpabilité doit seulement être attribuée à ceux responsables en ce temps-là, et seulement à ceux que Matthieu représente comme présents devant Pilate. En accord avec Nostra Aetate, Benoît XVI rappelle à ses lecteurs que « la mort de Jésus n’était pas un châtiment, mais plutôt le salut ». Aussi, selon son interprétation des textes, ni le Sanhedrin, accusé de charger Jésus de blasphème, ni la foule que Matthieu décrit exigeant le châtiment, ne devraient être tenus pour responsables de la crucifixion : D.ieu à l’origine de l’évènement comme un porte vers le salut place tous les participants impliqués dans le plan divin. Il n’est pas question de « culpabilité ».
Si seulement l’absolution était aussi facile.
Alors que les quatre Evangiles canoniques sont généralement d’accord dans la description du procès, Matthieu (25:27) est de loin plus dramatique et incendiaire dans la damnation des ‘Juifs’. Sa représentation de la scène du procès et de la foule devant Ponce Pilate allait, un millier d’années plus tard, inspirer aux Croisés le massacre de communautés juives entières, en route pour « libérer » la terre sainte ; et quatre cent ans plus tard, inspirer aussi à Martin Luther l’appel à brûler les synagogues et les livres saints ; à mettre à mort tout rabbin pris à enseigner la Torah. cinq siècles plus tard, des criminels de guerre nazis à Nuremberg allaient citer Luther comme justification et modèle de la solution finale.
Le professeur Irving Borowsky nous rappelle dans son introduction au Père Flannery « l’anxiété des Juifs » que, « dans les mille années écoulées, un sur deux juifs nés dans le monde avait été assassiné [pour le crime d’être né Juif] ». Le Center International Vidal Sassoon (SICSA) a estimé un jour que, si aucun juif n’avait souffert de persécution au cours des siècles, le nombre de Juifs vivants aujourd’hui serait égal à la population entière des Îles britanniques.
L’antijudaïsme évangélique est le fondement sur lequel des siècles d’antijudaïsme théologique a été bâti. Cette théologie de la haine s’est développée en ce que, depuis que l’Age de Raison en est arrivé à être désigné le Problème juif de l’Occident. L’Holocauste avec sa solution « finale » presque réussie du problème juif, a conduit certains théologiens chrétiens à un regard critique sur leurs écritures pour leur contenu antijuif, comme précédent et contributeur à l’émergence de l’antisémitisme laïc. L’un des résultats de leurs études a été la Déclaration de l’Eglise en 1965 sur la Relation de l’Eglise avec les religions non chrétiennes, son ‘Nostra Aetate’. Absolvant les juifs de déicide, reconnaissant le judaïsme comme une religion indépendante et non pas seulement une projection de la théologie chrétienne représentant un commencement.
Malheureusement, cela ne signifiait pas que les Chrétiens allaient nécessairement voir les juifs différemment qu’ils n’avaient été conditionnés par des millénaires d’anti-judaïsme religieux et de stéréotypie satanique. Et aujourd’hui, 46 ans après Nostra Aetate, « les incidents antisémites en Europe occidentale sont à un niveau jamais observé depuis la fin de la Deuxième Guerre Mondiale ».
Ainsi la leçon à tirer est que se contenter d’instruire le fidèle de ne pas lire les Evangiles comme antijuifs a peu d’effet sur l’état d’esprit de l’Occident, une culture conditionnée par une très longue tradition dans laquelle « les Juifs » ont été représentés comme des tueurs du Christ. Le problème n’est pas la manière dont les Evangiles sont lus, mais dans le texte et le contexte des Evangiles : le problème est l’antijudaïsme des mots eux-mêmes.
Si la chrétienté devait sérieusement traiter son antijudaïsme incrusté, et il est de son plus profond intérêt de le faire s’il doit vraiment s’élever vers son idéal de religion « d’amour et de pardon », alors elle est obligée de déraciner la haine antijuive. Mais la Chrétienté peut-elle éliminer, ou même modifier l’antijudaïsme évangélique ? Une possibilité serait de retraduire ces passages incendiaires, pour représenter les évènements moins agressivement. Cela soulagerait au moins la tâche improbable de demander au lecteur moyen le travail anti intuitif « d’adoucir » la signification des textes comme ils sont écrits.
Ce n’est pas pour suggérer de réécrire les Evangiles pour les accommoder au philosémitisme. Je suis conscient que ces écritures sont considérées par le fidèle comme étant la parole intrinsèque de D.ieu. Une révision totale remettrait en question tous les textes considérés comme saints, subvertirait la religion elle-même. Mais les textes les plus anciens des Evangiles n’ont pas été écrits en Anglais moderne, mais en Grec et en Latin. Et la traduction est, par nature, un art intuitif de recherche de signification approximative. Deux excellentes discussions du problème d’expurger l’antijudaïsme des Evangiles sont, la théologienne catholique Rosemary Reuther dans « Foi et fratricide : les racines théologiques de l’antisémitisme », et du prêtre anglican et professeur William Nicholls « Antisémitisme chrétien : un histoire de haine ».
Une autre option qui laisserait les textes intacts serait que le pape édite des ‘bulles papales’. De tels outils ont été utilisés par le passé comme instruments de punition, conduisant même à l’excommunication. Le Pape Bénédicte pourrait publier une bulle interdisant l’antisémitisme en mot ou en acte, avec l’excommunication comme menace de punition. Mais de nouveau, confronté à ces textes évangéliques identifiant « les Juifs » comme meurtriers de Jésus, une telle menace serait difficile à justifier et à appliquer.
Ce qui nous ramène précisément où nous avons commencé : ni de culpabilité/responsabilité personnelle ou institutionnelle ne peut substantiellement modifier les causes textuelles de l’antijudaïsme chrétien, parce que l’antijudaïsme est inhérent à la foi chrétienne. Comme Rosemary Reuter l’a écrit : « Il est possible que l’antijudaïsme soit trop profondément incrusté dans les fondations de la Chrétienté pour être déraciné sans détruire toute la structure ».
Ainsi, comme membre de notre petite minorité, alors que je comprends le besoin de ceux d’entre nous occupant des positions de gouvernance dans le monde juif d’exprimer leur gratitude au pape pour son geste, je suspecte, non, j’espère que ni le Premier ministre d’Israël, ni Elan Steinberg de l’association ‘American Gathering of Holocaust Survivors and Their Descendents’ ne s’attendent à un changement substantiel dans la matrice judéo-chrétienne, det peuvent croire que nous pouvons maintenant respirer plus à l’aise en anticipant un avenir juif plus sûr.
La survie juive ne devra jamais être fondée sur la pensée magique ; la leçon de l’Histoire est que nous ne pouvons pas nous permettre le luxe du déni.
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