Pour faire suite a l'excellent article de Bertrand R Muhlbach
http://www.aschkel.info/article-hala-ha-comme-source-du-droit-israelien-une-idee-vraiment-saugrenue-41112164.html
Lorsqu’il y a presque 22 siècles, les Maccabim signèrent leur victoire sur les armées gréco-syriennes, ils réinstaurèrent une certaine indépendance politique en Judée et permirent simultanément un renouveau spirituel symbolisé par cette fiole d’huile retrouvée dans le Temple de Jérusalem bientôt réinauguré, et immortalisé par l’allumage des lumières de Hanouca. Pour ces héros des temps anciens, nulle dichotomie entre victoire militaire et retrouvailles avec une vie spirituelle authentique, arrachées de haute lutte non seulement envers les païens séleucides venus de Syrie, mais aussi envers leurs adversaires « du dedans », tous ces Juifs hellénisants, favorables au métissage culturel et au « modernisme » grec, qui n’en avaient cure de la restauration du Temple et qui collaborèrent avec la puissance du moment. Rappelons que c’était avec le soutien de « l’élite hellénisante » du peuple, qu’en 167, Antiochus IV dit « Epiphane » avait souillé le Temple de Jérusalem en y édifiant un culte à Zeus. Avec l’intronisation de la fête de Hanouca, les Hasmonéens mettaient fin à l’un des nombreux chapitres récurrents de l’Histoire juive : la confrontation entre le Judaïsme et d’autres cultures parfois bien éloignées de lui, qui avaient fini par menacer l’existence même du Judaïsme.
Cette problématique d’asservissement aux cultures étrangères a resurgi soudainement la semaine dernière, quelques jours avant la fête de Hanouca, comme un clin d’oeil de la Providence pour bien nous faire comprendre que, même si l’Histoire ne ressert pas toujours exactement les mêmes plats, les grandes questions se posent identiquement à chaque génération.
Lors d’une soirée consacrée aux Lois Pécuniaires dans le Droit Hébraïque, et devant un parterre de Rabbins et Juges rabbiniques, le ministre de la Justice, Yaakov Neeman, Juif pieux et pratiquant, a « créé le scandale » en déclarant lors de son intervention « qu’il fallait restaurer la gloire du passé » et « qu’il espérait qu’un jour la Loi de la Thora redevienne la Loi d’Israël ». Il rajoutait : « Israël doit retrouver l’héritage de ses Pères, des premiers aux derniers mots de la Torah, qui contiennent une solution à toutes les questions auxquelles nous faisons face ». Autrement dit : que le processus du retour de l’indépendance juive politique en Eretz Israël, ouvre la porte à l’indépendance et à l’authenticité spirituelles, notamment à travers une application du Droit hébraïque.
Que n’avait-il pas dit-là ce « Pharisien d’un autre temps » !!! Les réactions ont très rapidement fusé, et leur excès – d’ailleurs synonyme d’abcès – annoncent la confrontation culturelle à venir entre partisans du Droit juif et ceux qui veulent maintenir un « Etat de Droit démocratique » détaché de toute connotation spirituelle juive. Ce « Kulturkampf » avait eu son leader en la personne d’Aharon Barak, ancien juge de la Cour Suprême, qui suivait un agenda politique bien clair, et qui n’hésita pas à avouer après son départ à la retraite « qu’il était pour un Etat laïc et démocratique de tous les citoyens », autrement dit « débarrassé de tradition juive » et à la merci d’une majorité arabe éventuelle. Mais dès qu’il s’agit d’une ministre coiffé d’une kippa, et qui s’exprime dans un sens opposé aux idées…de la minorité (!!), cela fait l’effet d’un tremblement de terre.
Yossi Beilin, ancien ministre de la Justice, à peine remis des festivités de son accession à la Légion d’Honneur française « pour son combat en faveur de la paix », appelait à la démission de Neeman : « Binyamin Netanyahou doit désapprouver son ministre, et si un ministre de la Justice prône l’instauration d’une théocratie en Israël, qu’il démissionne immédiatement ». Le Président de Meretz, Haïm Oron, tenait des propos encore plus venimeux, et parlait de « talibanisation de la société israélienne », accusant Neeman avec ironie « de déloyauté envers la démocratie », ce qui est un comble, lorsque l’on s’appelle ‘Neeman’ (‘loyal’ en hébreu) !!
Tsipi Livni, cheffe de l’opposition et représentante de toute une frange laïque de la population, parlait « de propos qui devraient inquiéter tout citoyen israélien », et afin de se préserver encore quelques électeurs religieux, elle rajoutait que « l’Etat d’Israël est assez fort pour trouver un système où le Droit positif et la tradition juive puissent coexister ». Mais sa collègue de parti, Orit Zuaertz, accusait le ministre de la Justice rien moins que « de saper les fondations et les valeurs de la démocratie israélienne ». Yaakov Edery, également de Kadima, estimait « que si un ministre de la Justice remettait en question le système dans lequel il évolue et qui lui a confié de telles responsabilités, il se devait de démissionner ».
Réaction hostile également chez le responsable du Mouvement Réformé en Israël, Rabbi Gilad Kariv : « Un ministre de la Justice est supposé renforcer la démocratie et l’Etat de Droit. Par ces paroles, Yaakov Neeman a choisi de leur tourner le dos et s’est placé du côté de ceux qui traitent les tribunaux civils de ‘goïm’. Instaurer un Etat de la Halakh’a n’est pas compatible avec le caractère éclairé et progressiste de l’Etat d’Israël. Si le ministre de la Justice soutient cette idée, il s’agit d’un très mauvais signe pour la démocratie israélienne ».
Ofir Pines-Paz, du parti travailliste, a parlé « d’un agenda politique secret soudainement révélé par le ministre de la Justice, et qui est de bien mauvais augure. Yaakov Neeman a fait part de sa méfiance envers le système actuel et de son désir de revenir à un Etat de Halakh’a ».
Parmi les rares réactions en faveur du ministre, celle de son collègue de la Technologie et des Sciences, Prof. Daniel Hershkovitz, qui a « applaudi le ministre de la Justice pour son intention de faire reposer le système juridique israélien sur la loi juive et lui conférer, ainsi, une âme juive ».
Parallèlement aux personnalités politiques, les grands journalistes de la presse écrite comme de la radiotélévision ont quasi unanimement condamné les propos du ministre, Razi Barkaï, de Galei Tsahal, parlant de « scandale », et Yaron London d’Arutz 10, au bord de l’apoplexie dès qu’ils s’agit d’une kippa, utilisant des expressions peu reluisantes.
Que dire de cette flambée de violence verbale et des arguments invoqués, si ce n’est qu’elle fait mal en ces jours de Hanouca, où nous célébrons la victoire de l’esprit juif sur la volonté de la civilisation hellénistique de nous broyer et nous noyer dans la masse comme elle l’a fait pour d’autres cultures.
Et comble d’ironie, au moment où Jérusalem fête sa victoire sur Athènes, la télévision israélienne annonce qu’elle va diffuser prochainement une dizaine de films destinés à faire accepter l’homosexualité dans la société. Les réalisateurs israéliens, Idan Sagiv Richter et Yaïr Hochner, ont lancé une campagne « pour qu’Israël fasse comme toutes les autres Nations éclairées, et reconnaisse les pleins droits des homosexuels, lesbiennes et transsexuels sur le plan familial et social ». Cette campagne avait déjà débuté en octobre, dans le cadre de la Cinémathèque de Tel-Aviv, devant un parterre de députés, diplomates et autres professionnels du monde audiovisuel. Maintenant c’est au tour des grandes chaînes de TV de diffuser ces messages vers le grand public.
Les vrais obscurantistes ne sont pas toujours là où on les imagine. Les Juifs Hellénisants sont encore là, et leurs « lumières » ne sont pas les nôtres.
[Lundi 14/12/2009 20:33]