Reportage à la manifestation de soutien en Israël à Guilad Shalit
Par Isabelle KERSIMON
En ce 25 juin 2011, Israël tout entier réclamait à son gouvernement la libération du soldat Guilad Shalit, enlevé par le Hamas le 25 juin 2006, dont nul ne sait où il se trouve, et dont les conditions de détention absolument inhumaines, depuis cinq ans, conduisent plus de 60% des Israéliens à exiger qu’il soit libéré, à tout prix.
« Nous avons tous besoin que Guilad rentre à la maison »
Le prix à payer, tous l’ont rappelé hier, de Césarée à Jérusalem, du point de passage de Kerem Shalom aux studios télé d’Herzlyia, c’est obtempérer aux exigences des terroristes : libérer 1000 prisonniers palestiniens dont une majorité sont responsables de la mort de nombreux Israéliens.
Paradoxe insoutenable : c’est au nom même de leur sécurité et de leur intégrité que les Israéliens en appellent à ce compromis. D’où qu’ils viennent.
Pour L., Bédouin monté en 4x4 du Néguev en compagnie de deux petits garçons agitant l’un le drapeau d’Israël, l’autre celui du Comité de soutien au soldat, « le Premier ministre doit tout faire pour que Guilad soit libéré ; nous avons tous besoin qu’il rentre à la maison ».
« Je sais que c’est difficile pour Benyamin Netanyahou », renchérit Omar (son nom a été changé), « mais les soldats et les forces de sécurité d’Israël nous protègent, nous tous, Arabes et Juifs ; nous avons besoin que Guilad rentre à la maison pour nous sentir en sécurité, pour nous redonner le sentiment que nous pouvons vivre ici sains et saufs, avec lui ».
« Nous avons élu notre Premier ministre pour qu’il nous protège. Il doit libérer les prisonniers palestiniens, même si c’est dur, même si c’est dangereux ». « Même en ces temps difficiles où tant de menaces pèsent sur Israël », ajoute-t-il.
Soly, membre du Comité des mères, une association humanitaire sans agenda politique réunissant des mères dont les enfants ont rejoint Tsahal, salue chaleureusement Omar.
« Nous avons des valeurs fortes et nous devons nous soutenir mutuellement », déclare-t-elle. « Notre société et notre Etat doivent être solidaires. Guilad est mon fils, il est notre fils à nous toutes et nous tous. Si nous trahissons nos enfants, que nous reste-t-il ? »
L’une de ses collègues approuve : « Nous voulons que Benyamin Netanyahou accepte les conditions du Hamas, même si le prix à payer est très fort. Cinq ans ont passé. On ne peut pas négocier avec eux. Il n’y a rien à attendre d’eux. Les prisonniers palestiniens sont détenus dans des conditions telles en Israël qu’ils pourraient y passer leur vie… Guilad subit des conditions sans nom. Si un jour il s’en sort, dans quel état sera-t-il ? »
Des manifestants se sont approchés. Ils approuvent. Ils sont venus en famille, pour beaucoup d’entre eux.
Un bébé au bras de son grand-père tend sa petite main vers mon carnet de notes avec insistance, comme pour lire, très intéressé. Nous éclatons de rire. Et au creux des prunelles, en un éclair une certitude que chacun semble crier en silence :
Cet enfant que Guilad a protégé ne devra jamais être abandonné.