Voici donc la question que le citoyen israelien lambda doit se poser en permanence, une société israelienne qui n'aspire qu'à vivre en paix, construire, aller plus loin dans le progrés, faire partager ses avancées avec le reste de l'humanité, ses voisins hostiles, n'ont eux qu'une ambition, détruire.
Tout le monde est d'accord : dans l'éventualité d'une nouvelle série de conflits dans la région, les civils seront la cible privilégiée du Hezbollah, du Hamas et de l'Iran.
“Nous prévoyons de former tous les lycéens à être des bénévoles, afin d’élargir le réseau de soutien de 300 000 personnes” : le colonel Chilik Soffer, responsable de la population au commandement du Défense passive.
PHOTO: ARIEL JEROZOLIMSKI , JPOST
Au Sud-Liban, des roquettes camouflées dans des villages chiites ont explosé prématurément ces derniers mois, donnant un avant-goût des efforts de réarmement massif du Hezbollah. La milice chiite de Nasrallah s'est tout particulièrement concentrée sur l'acquisition de missiles de longue portée capables de frapper Israël en son cœur.
A noter aussi : l'interception d'un cargo iranien avec, à son bord, près de 3 000 roquettes destinées aux bons soins du Hezbollah. Ou les récents rapports des renseignements sur les essais de tirs de roquettes effectués par le Hamas à Gaza : Tel-Aviv est désormais à portée de missiles palestiniens. Tout cela offre plus de preuves qu'il n'en faut pour affirmer que ces deux groupes terroristes sont tranquillement en train d'engranger l'armement nécessaire pour causer d'importants dommages aux populations civiles du centre du pays.
Autre menace : la nucléarisation d'un Iran que les efforts diplomatiques semblent impuissants à enrayer. Et Téhéran est à la tête d'un arsenal de missiles balistiques de longue portée susceptibles, eux aussi, de se retourner contre l'Etat hébreu.
Alors, devant ces faits inquiétants, il semble naturel de se demander : la Défense passive est-elle prête pour la guerre ?
De toute évidence, à l'été 2006, la réponse à cette question était négative. Lors de seconde guerre du Liban, le pays a été pris au dépourvu par un déferlement de roquettes venues du Nord. Des masses de citoyens mécontents, lassés de dormir dans des abris mal équipés, n'ont alors eu d'autre choix que de s'enfuir vers le Sud. En cause : la lenteur de réaction du commandement de la Défense passive. Qu'en est-il depuis ?
Les leçons d'une guerre
"Nous avons beaucoup appris depuis la seconde guerre du Liban", confie le colonel Chilik Soffer, responsable de la population au commandement de la Défense passive. Son service s'est relevé tant bien que mal des événements tragiques de 2006 et s'attelle depuis à analyser les déficiences de son fonctionnement. Il a d'ores et déjà entamé une réforme complète de ses méthodes de travail. "De grands changements sont en cours", assure Soffer.
Un exemple ? Les instructions enjoignant les civils à rester dans les abris des journées entières ont été expédiées à la poubelle. Les citoyens ont reçu pour directive de tirer partie du moment d'accalmie actuel pour localiser les "zones sûres" - chambres fortes, cages d'escalier, abris - où ils seront le moins exposés aux attaques de roquettes. Et dans lesquelles ils ne devront rester que le temps de l'attaque.
"Nos chiffres montrent que pendant la seconde guerre du Liban, où 41 civils ont perdu la vie, et l'opération Plomb durci, avec trois civils tués par des roquettes, 90 % des pertes sont survenues en espace ouvert", dit Soffer. "Ceux qui suivent les instructions et s'abritent dans les endroits sécurisés pendant les tirs de roquettes ne devraient essuyer aucun dommage."
Par ailleurs, les moyens de communication avec la population ont été très nettement améliorés. Une campagne d'information touche chaque foyer par le biais d'envois postaux, de la télévision, la radio et via le site Internet du commandement de la Défense passive.
"En bref, on peut parler d'une révolution depuis la seconde guerre du Liban", déclare Gidi Grinstein, fondateur et directeur de l'institut Reout, un organisme de planification stratégique. "C'est le signe le plus positif que j'ai vu en 20 ans de carrière."
Sondages contradictoires
Selon une enquête effectuée par le commandement de la Défense passive le 19 janvier dernier, au lendemain de l'opération Plomb durci, 95 % des résidents du Sud ont déclaré avoir pleine confiance dans les capacités du service à protéger la population.
Mais d'après un rapport publié par Reout et la Coalition du traumatisme israélien en septembre dernier, tout n'est pas aussi rose.
Des secteurs de la Défense passive pourraient s'effondrer au cours de la prochaine guerre ou en cas de catastrophe naturelle, à moins, précise le rapport, qu'un réseau de civils ne se mette en place pour faire face aux situations d'urgence.
"Malgré tout ce qui a été fait depuis 2007, l'énorme investissement de fonds, de personnel, les exercices et l'élargissement du budget, et en dépit de ce que nous avons vu lors de l'opération Plomb durci, Israël reste exposé à ce danger", prévient Grinstein.
"Une telle catastrophe pourrait provenir de troubles publics, de pillages ou d'une perte totale de la confiance des civils, non satisfaits des aides de l'Etat à leur égard."
Mais Soffer rejette l'éventualité d'un cataclysme social en temps de guerre. "Toutes les recherches effectuées sur le sujet montrent que la menace de pillage est un mythe. En fait, la plupart des citoyens sont adaptables, et le deviennent de plus en plus en cas de guerres et de catastrophes. Le taux de comportements antisociaux et de criminalité décline au cours d'une guerre."
Défense passive : service civil ou militaire ?
Selon l'institut Reout, des efforts pour une meilleure préparation sont certes à constater, mais restent insuffisants. "Le problème, c'est que la Défense passive n'a pas sa place dans le concept général de sécurité en Israël. Selon nous, elle doit être intégrée dans la logique de défense militaire comme un élément central", analyse Grinstein.
Mais Soffer n'est pas d'accord. "La Défense passive tient une place prépondérante dans la réflexion sur la sécurité. L'organisation du secteur civil est considérée comme primordiale. Nous sommes confrontés à des menaces contre la population depuis 1948, lorsque des avions égyptiens ont bombardé Tel-Aviv. Ce n'est pas un phénomène nouveau."
Pourtant, Grinstein s'avoue préoccupé par la perspective d'une attaque sans précédent qui, cette fois, pourrait s'étendre à tout le pays.
"D'énormes ressources ne sont pas exploitées, c'est sur cela que le rapport se concentre", dit-il. "Une arme chimique pourrait faire des milliers de victimes."
Et de citer, par exemple, l'intention du commandement de la Défense passive d'utiliser les gymnases comme hôpitaux de fortune pour le traitement des victimes dans l'éventualité d'une attaque de missiles chimiques. Une initiative qu'il salue.
Parmi les autres préoccupations de l'association Reout : la perspective d'une crise dans certains services du secteur privé, comme les distributeurs de billets ou la livraison de nourriture aux supermarchés. Mais selon Soffer, un tel scénario est improbable, puisque "le gouvernement est chargé d'assister les civils en cas de besoin".Autre recommandation de l'institut Reout : faire en sorte que les organismes d'entraide qui fournissent des services vitaux, comme des distributions de denrées alimentaires, soient identifiés pour avoir les moyens de continuer leur activité en cas de situation d'urgence nationale.
"Nous sommes d'accord avec Reout sur ce point", note Soffer. "L'objectif étant que les civils s'entraident. Nous prévoyons d'ailleurs de former tous les lycéens au bénévolat, afin d'étoffer le réseau de soutien de 300 000 personnes."
Grinstein souligne le faible taux de participation à l'exercice de Défense passive de juin, quand il avait été demandé aux citoyens de gagner les zones sûres au déclenchement de la sirène simulée de raid aérien.
Pourtant, selon les sondages effectués auprès de l'ensemble de la population, la majorité a bien participé à l'exercice, précise Soffer. Avec toutefois la mise en relief de différences régionales : les résidents du Nord et du Sud ont participé en plus grand nombre que ceux du centre.
En conclusion, Soffer rappelle qu'il est important de mettre les choses en perspective : des programmes de défense anti-missiles "effectifs" sont développés dans tout le pays, et, est-il besoin de le rappeler, les Israéliens ne sont malheureusement pas novices en matière de situations d'urgence.
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