Echec du lobbying pro-syrien de l’International Crisis Group (ICG), visant à saboter le Tribunal à l’ONU
dimanche 2 janvier 2011 - 21h42, par Khaled Asmar - Beyrouth
Presque un an après avoir été démasqué, à l’Institut Français des Relations Internationales (IFRI) à Paris, l’ICG récidive à New York et défend les thèses de la Syrie et du Hezbollah pour saper le Tribunal International pour le Liban (TSL).
Le 15 janvier 2010, Mediarabe.info avait dévoilé le lobbying exercé par l’International Crisis Group (ICG) et plus particulièrement par Peter Harling, auteur de plusieurs rapports sur la Syrie, l’Irak et le Liban. Lors d’une conférence animée à l’IFRI le 14 janvier 2010, Harling avait fait la promotion de la politique du régime de Bachar Al-Assad, sans hésiter à travestir la réalité des relations entre Damas et ses voisins ni à occulter les atteintes portées aux droits de l’hommes en Syrie.
Près d’un an après, le 30 décembre 2010, Georges Malbrunot, spécialiste de la région au « Figaro », cite sur son blog un diplomate au siège des Nations unies à New York, selon lequel « lorsque les responsables du think-tank International Crisis Group (ICG) sont venus présenter récemment leur dernier rapport sur le Tribunal spécial pour le Liban (TSL), qui doit juger de l’assassinat de Rafic Hariri, ils se sont pris une volée de bois vert par les membres permanents du Conseil de sécurité ». Selon la même source, « ICG a recommandé la prudence et conseillé de ne pas privilégier la recherche absolue de la vérité au détriment de la stabilité du Liban ». En gros, les rapporteurs d’ICG –Robert Malley et Peter Harling– adoptent peu ou proue la position de la Syrie et du Hezbollah, pour qui le gouvernement libanais doit dénoncer les conclusions attendues du TSL. Et le diplomate cité par Malbrunot de conclure : « Nous avons été surpris de voir qu’il y avait unanimité parmi les membres du Conseil de sécurité pour refuser l’approche d’ICG ».
En effet, conscients de leur responsabilité dans les nombreux assassinats au Liban, le Hezbollah et ses maîtres syriens et iraniens multiplient les tentatives pour saper le TSL. Comme nous l’avons expliqué le 15 décembre dernier, ce lobbying s’appuie aussi sur l’ICG, ainsi que sur les intimidations et autres menaces.
Cette nouvelle tentative d’abattre le TSL et d’échapper à la justice vise à pérenniser le régime syrien et ses méthodes terroristes érigées en mode de gouvernance, tant à l’intérieur même de la Syrie (personne n’a encore oublié le massacre de 30.000 syriens par le régime, au début des années 1980) qu’au niveau régional. La nouvelle campagne contre le TSL à travers l’ICG s’inscrit aussi dans le sillage de la « fatwa » prononcée le 20 décembre dernier par le Guide de la République islamique d’Iran, l’Ayatollah Ali Khamenaï, contre le TSL. Une fatwa considérée par le Hezbollah comme un « ordre divin » transmis par le représentant de Dieu et de son Prophète sur terre pour rejeter l’acte d’accusation et abattre le TSL.
L’Egypte en première ligne...
C’est dans ce contexte qu’il convient d’interpréter l’attentat qui a visé une église copte à Alexandrie, en Egypte, dans la nuit du nouvel an, faisant 21 morts et 79 blessés, essentiellement des Chrétiens. Le président Hosni Moubarak a en effet attribué l’attentat à des pays étrangers, et ses services de sécurité ont affirmé que le kamikaze était de nationalité étrangère.
Interrogée à cet égard par Mediarabe.info, une source proche des renseignements égyptiens redoute « une transformation du bras de fer en cours entre le Caire d’une part, Damas, Téhéran et le Hezbollah d’une part ». Notre source ajoute que « ces derniers exploitent la frange égyptienne d’Al-Qaïda pour faire plier Moubarak » et rappelle l’arrestation par les autorités égyptiennes d’un vaste réseau lié au Hezbollah, chargé de déstabiliser le pays.
En effet, Moubarak avait dénoncé « la loyauté des Chiites arabes à l’Iran au détriment de leur pays d’origine » ; son régime a contribué à l’endiguement de l’influence iranienne au Yémen et en Arabie saoudite ; son pays a reçu les souverainistes libanais, dont le Premier ministre Saad Hariri et le chef des Forces Libanaises Samir Geagea, principaux piliers de l’indépendance du Liban aux côtés du Patriarche maronite Nasrallah Sfeir ; il continue d’apporter un soutien sans faille au Tribunal international pour le Liban ; il a dénoncé et continue de dénoncer le programme nucléaire iranien... Pour toutes ces raisons, l’Egypte irrite ses adversaires à Damas et Téhéran et Moubarak est ainsi devenu une cible privilégiée de Téhéran, au point que sa tête ait été mise à prix par l’Iran.
... Et les Chrétiens première victime
Notre source rappelle les attentats anti-chrétiens en Irak, notamment celui commis pendant la messe de la Toussaint à Bagdad le 31 octobre dernier, et qui fut particulièrement meurtrier. Pour notre interlocuteur, « l’attentat d’Alexandrie était prévisible, et risque de ne pas être le dernier. Il a d’ores et déjà été annoncé dans le communiqué revendiquant l’attaque contre l’église de Bagdad », souligne notre source, confirmant notre lecture de ces tragiques événements, publiée le 19 novembre dernier. Ainsi, après l’échec du lobbying hostile au TSL, « l’Iran et la Syrie usent de leur terrorisme et ciblent essentiellement les Chrétiens qui constituent le maillon faible en Orient, afin d’accentuer les pressions sur l’Occident et sur tous les pays qui osent encore défendre la justice internationale, dont l’Egypte », estime notre source.
Techniquement, il est légitime de s’interroger sur les moyens mis à disposition pour acheminer les centaines de kilogrammes d’explosifs en Egypte. Car, selon les experts, l’attaque semble davantage relever de puissants services étatiques que de « terroristes locaux », fussent-ils affiliés à Al-Qaïda. De ce point de vue, les enquêteurs s’intéressent en priorité aux services iraniens et syriens, ainsi qu’au Hezbollah et au Hamas palestinien, les deux derniers ayant pignon sur rue en Egypte.
Khaled Asmar
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