1. Le discours du Président américain Barack Obama au Caire a été présenté comme une
opportunité historique pour redéfinir le statut, l'image et les relations mutuelles entre les Etats-
Unis et le monde arabo-musulman. L'Iran et Hezbollah s'y sont référés avec scepticisme, voire
négativement. D'autre part, les réactions de la Syrie et du Hamas ont été conciliantes,
soulignant que le test du discours devra être traduit en actes et résidera dans l'empressement
américain à faire pression sur Israël (en ce qui concerne les implantations et d'autres questions).
Le camp prooccidental (l'Egypte et l'Arabie Saoudite) a salué l'approche conciliante
d'Obama envers le monde arabe, a salué son approche rigide sur la question des implantations et
a appelé les Etats-Unis à faire pression sur Israël.
2. Ci-dessous les premières réactions du monde arabo-musulman - principalement des
adversaires de l'Amérique - au discours d'Obama : l'Iran a exprimé son scepticisme et a en
grande partie rejeté le discours. Son Guide suprême, Khamenei, a déclaré que l'Iran se
considérait comme jouant un rôle central dans la direction du Moyen-Orient, ajoutant que
Téhéran possède son propre programme de modification de la région.
Le Président iranien
Ahmadinejad, dans un débat télévisé avec le candidat réformateur Mehdi Karroubi, a attribué les
circonstances ayant mené au discours d'Obama à la politique étrangère de l'Iran. Le Hezbollah
s'est fait l'écho de l'Iran, déclarant que le discours ne représente pas un changement véritable de
la politique américaine. La Syrie a clairement semblé satisfaite du discours, mais a aussi appelé
les Etats-Unis à faire pression sur Israël concernant plusieurs questions régionales. Dans l'arène
palestinienne, le gouvernement de Mahmoud Abbas a accueilli le discours d'un bon oeil,
puisqu'il place selon lui la balle dans le camp d'Israël ; le Hamas a également réagi de façon
conciliante, appelant les Etats-Unis à reconnaître sa légitimité et à faire pression sur Israël.
Oussama ben Laden a critiqué la politique d'Obama à la veille du discours, déclarant qu'Al-
Qaïda resterait hostile dans tous les cas.
Iran
3. L'Iran a réagi au discours avec scepticisme, voire en le rejetant. La propagande iranienne
générale et ses porte-parole ont souligné que pour convaincre le monde musulman que le
changement est authentique et qu'il ne s'agit pas uniquement d'une simple rhétorique, l'action
est nécessaire. Un des critères principaux du changement devra porter sur l'état des relations
américaines avec Israël ou, comme le Guide suprême iranien l'a dit, avec "la croissance maligne
au coeur du Moyen-Orient" (comme il l'a déclaré dans un discours le même jour qu'Obama a
parlé au Caire). Les autres critères iraniens seront l'acceptation des résultats des élections en
Palestine et au Liban, qui, selon Téhéran, permettra de prouver si les Etats-Unis continuent leur
politique à double tranchant en ce qui concerne la démocratie qu'ils prêchent (cf., une demande
que les Etats-Unis reconnaissent le Hamas et le Hezbollah, deux organisations que le
Département d'Etat désigne comme terroristes).
4. L'Iran a son propre agenda à opposer à celui des Etats-Unis dans le monde
islamique en général et au Moyen-Orient en particulier. Il a utilisé le discours d'Obama
pour souligner les différences entre sa voie, celle de l'Islam radicale, et la voie des Etats-Unis,
qui, selon Téhéran, ont piégé les leaders du monde arabe, particulièrement l'Egypte. La stratégie
de Téhéran consiste à faire de l'Iran le facteur le plus puissant de la région, le guide des "nations
musulmanes" et l'alternative authentique à l'hégémonie américano-occidentale.
5. Le timing du discours d'Obama au Caire, qui a eu lieu le même jour que les cérémonies
marquant le 20ème anniversaire de la mort de Khomeiny, a offert à Khamenei une occasion de
répondre par un discours religio-idéologique adressé au monde musulman. Il a longuement
abordé la question palestinienne, la conduite des Etats-Unis au Moyen-Orient, le modèle de la
révolution islamique et la culture perse antique. Les réponses de Khamenei ont de nouveau
montré que l'Iran se considère comme ayant un rôle central à jouer dans l'agenda du
Moyen-Orient et comme ayant son propre plan pour changer la face du Moyen-Orient.
Le discours de Khamenei a été interrompu par les cris "Mort à l'Amérique" et "Mort à
Israël."
6. Ci-dessous les principaux points du discours de Khamenei,1 retransmis par la télévision
iranienne le 4 juin:
I) La révolution islamique a été un tournant pour les pays arabo-musulmans
après les années d'attaques et la destruction de l'image musulmane. Le changement a
engendré une reprise forte qui se fait sentir dans tout le monde musulman et qui, selon
Khamenei, a mené la nouvelle administration américaine à essayer d'améliorer son image
parmi les peuples du Moyen-Orient. Il a ajouté que l'ancien gouvernement américain avait
Le texte complet peut être trouvé en 12 langues sur le site Internet de Khamenei,
employé une politique agressive, "imprudente" qui s’est traduite par l'occupation de
l'Afghanistan et de l'Irak et a mené à une haine profondément ressentie dans tous les pays
de la région, noircissant l'image de l'Amérique.
II) Le changement n'arrivera pas par des discours et des devises. Les nations
musulmanes doivent savoir que la sincérité des politiciens américains ne se manifestera
que lorsqu'ils changeront réellemement leurs actions et "même s'ils prononcent 100
discours et que des perles sortent de leurs bouches, ils n'auront aucune influence et il n'y
aura aucun changement. "
III) Khamenei a abordé en détails la question de la Palestine et ce qu'il a appelé
"la politique unilatérale de l'Amérique," déclarant que la révolution islamique avait
"ranimé" les Palestiniens, qui ont prouvé que le régime sioniste, qui est "une tumeur
maligne" dans le coeur du monde musulman n'est pas "invincible". Les jeunes Palestiniens
ont "giflé" [ce régime] [à ce moment, il a été interrompu par les cris "Mort à Israël," "Mort
aux Etats-Unis," et "Mort aux adversaires du principe de l'autorité du juriste islamique."]
L'intifada, a-t-il dit, "la guerre qui a duré 33 jours [la seconde guerre du Liban] et la guerre
qui a duré 22 jours [l'Opération Plomb Durci]" ont été des coups portés au régime sioniste.
Le jour où la révolution islamique a gagné, a-t-il ajouté, le régime sioniste était invincible
aux yeux des pays islamiques et particulièrement aux yeux de l'Occident.
IV) Les Palestiniens, a dit Khamenei, "ont été agressivement et brutalement privé de leurs
pays et de leurs droits" et les Etats-Unis "n'ont non seulement prêté aucune attention aux
Palestiniens et au besoin de les défendre, mais ont donné leur appui complet au régime
oppressant [cf., Israël], et si les Palestiniens veulent protester [cf., "la résistance" armée],
les Etats-Unis présentent cette protestation comme du sabotage et de mauvaises actions.
Donc, comment un tel comportement peut-il être corrigé ?" [cf., Khamenei a de
nouveau justifié le terrorisme palestinien et implicitement l'appui iranien aux
organisations terroristes.]
V) Concernant la vision démocratique américaine, Khamenei a déclaré que les nations
musulmanes de l'Asie orientale à l'Afrique planifiaient d'établir des régimes musulmans et
des gouvernements islamiques avec "des systèmes différents, pas nécessairement le
système du régime islamique instauré en Iran... Cela ne fait aucune différence, ils
choisiront l'Islam comme système d'administration... J'appelle les Musulmans et leur dis, si
vous estimez aujourd'hui que le ton de l'Occident s'adoucit, c'est le résultat de
l'intervention et de la résistance dans le monde musulman" [aux cris "Mort à l'Amérique"].
VI) Il a également indiqué que l'hégémonie occidentale dans la région avait pris fin
[impliquant que l'Iran comblait le vide]. L'Occident, a-t-il dit, "avait un plan pour le pétrole
et les marchés... [mais] la reprise a changé ces plans complètement."
7. Le Président iranien Ahmadinejad a réagi au discours d'Obama à l'occasion d'un débat
télévisé avec le candidat réformateur Mehdi Karroubi, l'utilisant pour sa propre campagne.
Concernant ses tentatives pour défendre la politique étrangère iranienne pendant son mandat de
la critique lancée contre lui par ses concurrents, Ahmadinejad a déclaré que le discours n'était
pas une surprise et qu'Obama ne se souciait pas vraiment de l'Iran. Il a ajouté que c'était sa
politique étrangère réussie qui avait conduit les Etats-Unis à revoir leur politique. Il a ajouté que
quatre ans auparavant, le Président Bush avait parlé du renversement du régime iranien, et
qu'Obama disait maintenant que rien ne peut être réalisé sans l’Iran et appelle à la coopération
avec Téhéran. Il a demandé à Karroubi, "Comment pouvez-vous nier nos accomplissements
politiques ?" (Télévision iranienne, 6 juin 2009).
8. Ahmad Jannati, le Président du Conseil des Gardiens (dont l'une des fonctions est
la surveillance des élections), prédicateur notoire et considéré comme un conservateur, a
lui aussi fait référence au discours d'Obama. Il a déclaré qu'Obama "nous a donné un certain
nombre de feux verts... Il a admis que les Etats-Unis ont renversé un gouvernement iranien
démocratique [le gouvernement de Moussadeq, renversé par la C.I.A. lors d’une contrerévolution
en 1953]... Il a admis que l'Iran avait le droit à l'énergie nucléaire à des fins
pacifiques." Jannati a ajouté qu'Obama avait utilisé "des slogans qui peuvent annoncer le
changement ..., mais comment a-t-il l'intention de résoudre les problèmes divers à leurs racines
[?]... Un d'entre eux est Israël, qui est une source de tensions et de conflits aux Moyen-Orient ...
Il opprime les peuples... et sa politique est satanique." Selon Jannati, Obama doit répondre
à la question de savoir s'il soutient toujours Israël. "Si la réponse est positive, alors
aucun changement ne peut avoir lieu. Cependant, s'il pense mettre fin à son appui à Israël,
il doit le dire." Pour Jannati, le coeur du désaccord entre l'Iran et les Etats-Unis porte sur la
question palestinienne et il s'est demandé si les Etats-Unis ont un double langage à ce sujet,
c'est-à-dire s'ils respecteront les élections palestiniennes et libanaises, ou s'ils s'immisceront de
nouveau.
Ahmad Jannati, le Président du Conseil des Gardiens
(Quotidien de Téhéran Hamshahri, 5 juin 2009)
9. Un éditorial du quotidien iranien Kayhan, "porte-parole" du Guide suprême iranien et
des partisans d'Ahmadinejad, a qualifié le discours d'Obama de "surplace." L'auteur a écrit que le
Président américain n'avait rien dit de nouveau au sujet de l'Iran, de son programme nucléaire,
de la question palestinienne ou du régime sioniste. Il a affirmé qu'Obama avait essayé de
prétendre que le problème des Etats-Unis avec l'Iran est simplement historique, ajoutant que
c'est le même Obama qui avait quelques mois plus tôt signé une loi renforçant les sanctions
contre l'Iran. Si les Etats-Unis, écrit-il, acceptent réellement le droit de l'Iran à acquérir l'énergie
nucléaire, "ils doivent révoquer les quatre résolutions [du Conseil de Sécurité] qu'ils ont
patronnées, dégeler les actifs du Schah et faire juger le commandant de l'USS Vincennes.2 Ils
doivent également accepter le gouvernement légal du Hamas et reconnaître le
Hezbollah au Liban comme une "réalité légitime." Selon l'éditorial, "en tous cas, par
opposition à l'avis de certains des éléments réformateurs en Iran, nous ne devons pas changer
notre politique pour accepter l'invitation américaine. Le changement de la politique
étrangère américaine, même s'il n'est destiné qu'aux apparences, a été en fait réalisé
par la position ferme de l'Iran et d'autres éléments de la résistance au Moyen-Orient [cf., les
organisations terroristes] et pour qu'il soit mis en oeuvre, nous devons continuer à camper sur
nos positions et ne pas les reconsidérer" (Kayhan, 5 juin 2009).
10. Selon la télévision iranienne, les remarques d'Obama au sujet de la question
palestinienne ont été contradictoires. D'une part, il a reconnu le droit des Palestiniens à un Etat
indépendant et a dit que les implantations israéliennes étaient illégitimes, mais de l'autre, il a
critiqué la "résistance" du Hamas [cf., le terrorisme] et a reconnu Israël comme un Etat. De plus,
selon la télévision iranienne, ses remarques sur l'Iran ont, elles aussi, été antinomiques. Il a
admis que les Etats-Unis avaient été derrière le renversement du régime Moussadeq en 1953 et
reconnaissaient le droit de l'Iran à développer un programme nucléaire à des fins pacifiques,
En 1988, l'USS Vincennes a tiré un missile sur le vol civil iranien IR655 se rendant d'Iran aux Etats du Golfe, tuant les
290 passagers à son bord.
mais a accusé Téhéran de violence et de prises d'otages. Donc, "ce qu'il reste à voir est si le
Président américain traduira ses mots par des actes" (Télévision iranienne, 4 juin 2009).
Hezbollah
Le Hezbollah
11. Le thème principal de la réponse initiale du Hezbollah, se faisant l'écho de l'Iran, a été que le
discours d'Obama ne témoigne pas d'un changement véritable de la position de l'Amérique et que
les mots ne provoqueront pas de modification tant qu'il n'y aura pas d'action pour les soutenir (la
chaîne Al-Manar a aussi cité le Guide suprême Khamenei pour corroborer sa théorie). Ci-dessous
des réactions du Hezbollah :
I) Le Hezbollah a publié un communiqué hostile et haineux envers les Etats-
Unis, notant que le discours d'Obama était un exemple parfait de la politique américaine
contradictoire. Selon le communiqué, il n'est pas logique que les Etats-Unis prêchent
l'établissement de la paix tandis que leur histoire est fondée sur l'annihilation d'autres
peuples, dans le passé (Indiens d'Amérique, Vietnamiens, Japonais) et au présent (Irak,
Afghanistan, Pakistan). Le changement ressenti par les Moyens-Orientaux, a-t-il poursuivi,
est le résultat de la "supériorité du pouvoir de la résistance, de la libération et de
l'indépendance" et l'échec de la "politique oppressante" des Etats-Unis, qui a créé une
atmosphère de haine envers l'Amérique, particulièrement dans le monde arabo-musulman.
Le discours d'Obama, même s'il est légèrement différent des discours de ses
prédécesseurs, n'est rien plus que de la "rhétorique fantaisiste" et une "fête de relations
publiques" dont l'objectif est "d'améliorer l'image ruinée de Washington” qui n'exprime pas
une nouvelle stratégie américaine (Agence de presse libanaise, 6 juin 2009).
II) Hussein Fadlallah, député du Hezbollah au Parlement libanais, a déclaré que la
rhétorique d'Obama ne témoignait pas d'un changement véritable de la position
américaine envers le Moyen-Orient. Il a précisé que le monde arabo-musulman n'avait
pas besoin de prêches, mais plutôt "d'actions véritables et d'un changement radical" dans
la politique américaine, à commencer par la position de l'Amérique sur la question
palestinienne. Il a indiqué que le problème des Musulmans avec la politique américaine
était son "soutien à Israël, l'occupation ininterrompue de l'Irak et de l'Afghanistan et son
intervention dans les affaires libanaises internes." Il a ajouté que "les remarques d'Obama
sur les problèmes et les défis du monde musulman reflètent le programme de l'ancien
Président George Bush, qui a soutenu des régimes dictatoriaux et avait pour objectif de
priver les Arabes et les Musulmans de leur droit à l'autodétermination et à choisir des
régimes démocratiques" (Agence France Presse, 4 juin 2009).
III) La chaîne de télévision Al-Manar du Hezbollah a annoncé que le Président Obama
avait prononcé un discours historique contenant de la prédication et de l'admonestation,
accompagnées de citations du Coran. La différence de ton a été évidente, mais pas le
contenu et il faut donc "lire entre les lignes." Obama a renoncé au legs de la puissance et
a essayé d'atteindre la perception islamique, mais il n'a pas abandonné sa dépendance au
lobby juif quand il a fait part de son adhésion à la solution à deux Etats en Palestine, et il
n'avait rien de nouveau à dire au sujet de l'Iran. Al-Manar a salué le Guide suprême
Khamenei, qui a noté que la haine pour l'Amérique ne pouvait pas être apaisée par des
slogans et des flagorneries, puisque "les paroles n'apporteront pas de changement tant
qu'il n'y aura aucune action ..." (Télévision Al-Manar, 4 juin 2009).
Le discours d'Obama présenté comme un pansement ne pouvant
pas soigner les vrais malades (Al-Nahar, 5 juin 2009)
Syrie
12. Le régime syrien n'a pas immédiatement réagi au discours d'Obama. Les médias syriens,
cependant, surveillés par le régime et exprimant ses opinions, ont fait part de leur satisfaction.
La presse syrienne, parfois caractérisée par un optimisme prudent et des attaques vicieuses à
l'encontre d'Israël, a noté que le discours était seulement une étape vers le changement
nécessaire de l'administration américaine. Elle a appelé le gouvernement américain à faire
pression sur la question des implantations et à revoir également sa politique générale sur
plusieurs questions régionales (allusion au Plateau du Golan, qui n'a pas bénéficié selon les
médias syriens d'une attention spéciale dans le discours d'Obama.) Un article publié le 4 juin
dans Al-Baath a souligné que la tentative américaine de changer la position d'Israël risquait d'être
accompagnée de demandes de concessions de la part des Arabes, comme le renoncement au
droit au retour et à Jérusalem ainsi que la normalisation des relations avec Israël.
13. Ci-dessous les premières réactions publiées dans la presse syrienne :
I) Editorial dans le quotidien Tishrin écrit par Izz al-Din Darwish, le secrétaire de
rédaction pour les affaires politiques, le 4 juin : Selon l'éditorial, le Président Obama
a exprimé "quelques bonnes intentions pour la région et ses problèmes" quand il a envoyé
un message aux Arabes et des Musulmans "du coeur de leur patrie." Le thème principal de
l'éditorial est que la politique américaine prend en considération les relations entre les
Etats-Unis et les Musulmans, et que le temps est venu d'oeuvrer pour la paix au Moyen-
Orient. Cependant, "la visite d'Obama dans la région n'est que la première étape" et
l'administration américaine doit faire "un effort véritable" pour faire revenir les choses à la
normale, en faisant comprendre à Israël que "la paix est vraiment dans l'intérêt de chacun
et que les décisions des institutions internationales et l'initiative de paix arabe sont les
seules façons d'y parvenir." Darwish a dit que le Président Obama ne reviendrait pas sur
ses promesses de paix régionale, tandis que le "gouvernement Netanyahu-Lieberman" et
"les groupes de pression sionistes" disent le contraire. L'éditorial s'est terminé en
soulignant que les prochains jours montreront quelle approche sera victorieuse.
II) Article dans le quotidien Al-Thawra écrit par Muhammad Ali Botha, le 4 juin :
L'article a durement attaqué "le gouvernement extrême-droite de l'entité sioniste" et son
refus de geler la construction dans les implantations [L'Etat d'Israël et les Juifs ont été
qualifiés "d'entité sioniste," de "fils de Sion" et de "soi-disant Israël."] Il a déploré les
attaques menées par "la cohue des implantations" contre des civils palestiniens, qui
témoignent de "l'arrogance, de la rébellion [et] de la désobéissance envers les Américains."
Dans une telle situation, a-t-il continué, le Président Obama doit faire preuve de
détermination et exiger d'Israël qu'il gèle la construction dans les implantations et accepte
la solution à deux Etats [cf., Botha attend du Président des Etats-Unis qu'il mette en oeuvre
la solution à deux Etats tandis que lui-même utilise la terminologie de la propagande
syrienne qui n'accepte pas l'existence de l'Etat d'Israël.]
III) Article dans le quotidien Al-Baath par Muhammad Kanaysi, le 4 juin : Selon
l'article, le discours témoigne de l'intention de l'administration américaine de faire pression
sur Israël pour geler la construction dans les implantations et accepter la solution à deux
Etats. Cependant, a-t-il averti, les Arabes craignent que les Américains ne leur demandent
aussi de faire des "concessions" supplémentaires afin de changer la "position israélienne
têtue," par exemple de renoncer au droit au retour [des réfugiés palestiniens], de
normaliser les relations avec Israël et de céder Jérusalem. L'article fini par un appel aux
Arabes pour qu’ils multiplient leurs demandes à Obama, les invitant à profiter "du
besoin urgent de l'Amérique d'améliorer son image à leurs yeux," et "pour ne pas faire
d'autres concessions destructives [à Israël]."
IV) Article dans le quotidien Al-Watan par son rédacteur en chef, Waddah Abd
Rabbo, le 7 juin : Selon l'article, le discours d'Obama n'a pas exprimé de désaccord
fondamental avec la politique syrienne et a illustré qu'il n'y avait aucune justification à la
tension existante entre les deux pays. L'auteur a expliqué les points principaux de la
politique syrienne sur diverses questions, y compris le soutien à la "résistance" [cf., les
organisations terroristes], "prouvant" qu'il n'y a aucun désaccord entre la Syrie et les Etats-
Unis et que "tout le blâme que l'administration précédente a essayé de faire porter à la
Syrie était un mensonge qu'Obama lui-même a décrit comme erroné." L'article a invité les
Etats-Unis à rétablir les "droits" palestiniens, déclarant que "de même que les relations
entre les Etats-Unis et Israël ne peuvent pas être coupées, l'appui arabe et syrien aux
Palestiniens et à leurs droits n'est pas sujet à discussion. Seuls les Palestiniens peuvent
décider de quelle manière résister à l'occupation et c'est le devoir des Arabes de soutenir
leur décision... " Il a terminé par un appel au Président américain à "se rendre
prochainement à Damas, le berceau des cultures."
V) Article dans Al-Watan par Khurshid Dalli, le 7 juin : Selon l'article, le discours
d'Obama a été l'un des discours les plus importants prononcés par un Américain, en raison
de l'absence des menaces des administrations américaines précédentes. Donc, "on peut
dire que le discours contenait des éléments visant à tourner une nouvelle page [dans les
relations] entre les pays arabes et les Etats-Unis, particulièrement si l'administration
d'Obama met en pratique certaines des idées mentionnées," comme l'établissement d'un
Etat palestinien et le gel des implantations. Selon l'article, le discours témoigne d'un
changement idéologique et politique dans la mentalité américaine. Le vrai défi auquel fait
face Obama est de transformer ses mots en action.
VI) Article dans Al-Watan par Tahsin al-Halabi, le 7 juin : L'article a noté deux sujets
non abordés par le discours d'Obama : le Plateau du Golan "occupé" et les implantations
israéliennes qui y sont établies, ainsi que "l'embargo barbare" contre le million et demi de
Palestiniens de la bande de Gaza. Il s'est plaint qu'Obama ait déclaré que l'initiative de paix
était seulement le début de la reconnaissance de la responsabilité arabe et considère ceci
comme une expression de son empressement à plaire à Israël et à révoquer le droit au
retour. Il a aussi noté que l'on pourrait s'attendre à ce que le gouvernement Netanyahu
retarde et tente de saboter le droit au retour.
Réactions palestiniennes
L'Autorité Palestinienne
14. Les principaux responsables de l'Autorité Palestinienne n'ont pas tari d'éloges suite au
discours d'Obama, qu'ils ont qualifié "d'historique." Ci-dessous les principales réactions:
I) Saeb Erekat, le chef de l'équipe de négociations de l'OLP, a déclaré que le discours
resterait dans l'histoire comme la première tentative occidentale de se rapprocher du
monde arabo-musulman (Télévision Al-Arabia, 4 juin 2009). Dans un autre entretien, il a
déclaré qu'après le discours d'Obama, "la balle est dans le camps d'Israël." Il a dit que la
souffrance des Palestiniens ne dérangeait pas la conscience d'Obama et que ses opinions
devaient être traduites dans un processus de paix. Il a ajouté que si les constructions
dans les implantations n'étaient pas gelées, Obama aurait "un grand problème" (Al-Halij,
6 juin 2009).
Saeb Erekat (Télévision égyptienne, 4 juin 2009)
II) Nabil Abu Rudeina, le porte-parole présidentiel, a déclaré que le discours était
sincère et reflétait un commencement véritable (Agence France Presse, 4 juin 2009).
III) Yasser Abd Rabbo, le secrétaire du comité exécutif de l'OLP, a déclaré que ce
discours représentait une stratégie complète et que tous ses points étaient liés. Il a
précisé que le point le plus important était la question palestinienne, qui a été
"honorablement représentée," témoignant d'un changement des relations américaines
avec les pays arabes, Israël et les Palestiniens. Il a ajouté qu'Obama avait transformé la
question palestinienne en un intérêt américain national (Télévision palestinienne, 4 juin
2009).
Hamas
15. Les porte-parole du Hamas ont réagi au discours d'un ton conciliant, invitant les Etats-Unis à
traduire leurs paroles en actes, particulièrement concernant la lutte contre les implantations et la
levée du "siège" de la bande de Gaza. Ils ont aussi noté les sujets qui n'ont pas apparu dans le
discours, dont la reconnaissance de la légitimité du Hamas, "arrivé au pouvoir par des élections
[démocratiques]." Pendant le discours, le Hamas a organisé une manifestation pacifique de
douzaines d'enfants palestiniens se tenant debout devant le terminal de Rafah et arborant les
pancartes "le message des enfants de la Palestine à Obama," lever le "siège" de la bande de
Gaza (Al-Yawm Al-Sabaa, 4 juin 2009).
Manifestation d'enfants près du terminal de Rafah pour la levée du “siège”
(Site Internet du Hamas Palestine-Info, 7 juin, 2009)
16. Ci-dessous les principales réactions des responsables du Hamas :
I) Pour Musa Abu Marzuq, le vice-président du bureau politique du Hamas, le Président
américain a voulu envoyer un message au monde musulman, mais il n'a pas de réponses
aux événements sur le terrain, particulièrement concernant les guerres dans lesquelles
les Etats-Unis ont été directement et indirectement impliqués. Il a dit qu'Obama avait
modifié son ton envers le Hamas et qu'il devait maintenant agir plus vigoureusement
pour parler avec le Hamas et oeuvrer contre l'expansion des implantations (Télévision Al-
Arabia, e 5 juin 2009).
II) Ismail Haniya, le chef de l'administration de facto du Hamas dans la bande de Gaza,
a déclaré qu'Obama avait adopté une nouvelle rhétorique. Il a indiqué que cela pourrait
être le signal du début d'une ère de réconciliation entre l'Occident et le monde arabomusulman.
Cependant, a-t-il ajouté, le Hamas pense que la politique et la stratégie ne
sont pas limitées aux discours et doivent être transformées en action. Les Palestiniens
attendent de voir ce qui va arriver après le discours. "Leur souffrance prendra-t-elle fin ?
Le siège sera-t-il levé ? Les terminaux seront-ils ouverts ? L'occupation finira-t-elle et
l'Etat palestinien auquel Obama a fait référence sera-t-il établi ?" (Télévision Al-Jazeera,
5 juin 2009).
III) Muhammad Nizal, membre du bureau politique du Hamas, a déclaré qu'il n'y a
aucune raison de saluer le discours positivement, ajoutant qu'il devait être mis en
pratique sur le terrain. La "majeure partie du discours du Président était agréable," a-t-il
reconnu, "mais doit être mis en pratique sur le terrain" (BBC en arabe, 5 juin 2009).
IV) Fawzi Barhoum, le porte-parole du Hamas, a déclaré que le discours "avait touché
les sentiments," était poli et visait à améliorer la position des Etats-Unis aux yeux du
monde. Cependant, "il y a aussi des contradictions internes, par exemple quand il a
déclaré que le Hamas avait l'appui des Palestiniens mais n'a rien formulé de sa légitimité
et de son arrivée au pouvoir par des élections légitimes" (Agence France Presse, 4 juin
2009).
V) Musheir al-Masri, secrétaire du Hamas au Conseil Législatif Palestinien, a fait part
de sa déception, déclarant que le discours n'offrait rien de nouveau et ne montrait pas
un empressement véritable à changer la politique américaine quant à la question
palestinienne et à d'autres questions régionales (télévision Al-Alam, 4 juin 2009).
VI) Ismail Radwan, haut responsable du Hamas dans la bande de Gaza, a déclaré que
le discours était favorable et que l'Amérique faisait clairement un effort pour améliorer
son image, ajoutant que seules des actions sur le terrain détermineront le sérieux de
l'administration Obama (Site Internet du Centre Al-Bayan, 4 juin 2009).
VII) Yousuf Rezka, conseiller d'Ismail Haniya, a profité de l'occasion pour inviter Obama
à se rendre dans la bande de Gaza pour y voir les souffrances de ses propres yeux. Il a
exigé qu'Obama fasse pression sur Israël pour ouvrir les terminaux, lever le "siège" et
reconstruire la bande de Gaza (Agence de presse Ramattan, 4 juin 2009).
17. Un autre exemple de l'exploitation par le Hamas du discours à des fins de propagande a été
la lettre envoyée par le ministre adjoint des Affaires étrangères du Hamas Ahmad
Yussuf au Président américain pendant son séjour au Caire le 4 juin. Son contenu a été
publié sur le site Internet d'une organisation pacifiste féminine américaine appelée Code Rose :
les Femmes pour la Paix, dont les représentantes ont visité la bande de Gaza. On ignore si la
lettre a effectivement été remise à Obama.
18. Cette lettre précise que le Hamas salue la visite du Président Obama dans le monde arabe et
son initiative pour combler les fossés avec le monde arabo-musulman. Son auteur y qualifie le
conflit israélo-palestinien d'une des raisons de la tension ininterrompue entre les Etats-Unis et les
Arabes. Dans sa missive, Ahmad Yussuf a réitéré l'appel à Obama et aux responsables de
l'administration américaine pour visiter la bande de Gaza, victime d''une "attaque israélienne
brutale menée avec les armes et l'argent des Américains." Il a ajouté qu'il souhaitait que le
Président voie la destruction dans la bande de Gaza par lui-même (il a utilisé le terme "ground
zero," en référence aux Tours jumelles détruites lors des attentats du 11 septembre 2001 à New-
York) et a invité les Etats-Unis à faire un changement sur le terrain en levant le "siège" de la
bande de Gaza et en gelant les constructions dans les implantations. Il a terminé en disant que le
Hamas était enclin à faire partie "d'une juste solution" pour le conflit sans conditions préalables,
devant être conforme aux positions de la communauté internationale, de l'ONU, de la Cour
Internationale et des organisations de droits de l'Homme.
Al-Qaïda
19. Un nouvel enregistrement audio d'Oussama ben Laden a été publié à la veille de
l'arrivée de Barack Obama au Caire (Télévision Al-Jazeera, 3 juin 2009). Ben Laden y a
attaqué la politique d'Obama quant au monde Musulman, la qualifiant de "continuation de celle
de son prédécesseur, George Bush" et "d'hostile aux Musulmans." Selon lui, "le Président des
Etats-Unis a semé des graines de haine pour les Américains" partout dans le monde musulman
par les actions des Etats-Unis contre les Taliban dans la Vallée de Swat (à la frontière entre
l'Afghanistan et le Pakistan).
L'enregistrement audio d'Oussama Ben Laden attaquant Barack Obama
avant son discours (Télévision Al-Jazeera, 3 juin 2009)
20. Ben Laden a exhorté les Américains à se tenir prêts à faire face à une réaction à la
politique du gouvernement, déclarant que "dans les prochaines années et décennies, les
Américains doivent être prêts à récolter ce qui a été semé par les chefs de la Maison Blanche." Il
a également mentionné les actions militaires du Pakistan contre les Taliban dans la Vallée de
Swat, affirmant qu'il s'agit d'un "complot juif-américain" visant à affaiblir les capacités nucléaires
du Pakistan et à déstabiliser sa société. Il a en outre affirmé que la pression américaine avait
mené à une campagne de meurtres, de combats, de bombardements et de destruction qui avait
causé la fuite de millions de Musulmans dans la partie Nord-Ouest du pays.
21. Ben Laden a fait référence aux attaques du 11 septembre 2001, précisant que "les hommes
de la liberté responsable des événements du 11 septembre n'ont pas connu le goût de
l'amertume, de l'inassouvissement et l'exil de leurs maisons et de leur pays, ils ont vécu dans des
tentes et ont mangé peu. Ces 19 [qui ont commis les attaques] ont entendu comment leurs
frères en Palestine ont été opprimés avec des armes américaines aux mains des sionistes "[une
expression de solidarité islamique avec les Palestiniens].
22. Ce n'est pas la première fois qu'Al-Qaïda critique l'administration Obama. Le 20 avril 2009, le
second de Ben Laden, Ayman al-Zawahiri, a publié un enregistrement vidéo dans lequel il
déclarait que "le nouveau Président Obama ne changera pas l'image de l'Amérique quant aux
Musulmans et aux opprimés." Il a ajouté que "l'Amérique assassine toujours des Musulmans en
Palestine, en Irak et en Afghanistan... L'Amérique vole leur richesse, occupe leur terre et soutient
les dirigeants corrompus qui volent et trahissent leurs propres pays. C'est pourquoi le problème
[Dimanche 06/21/2009 12:34]