Plus la "République" islamique provoque la communauté internationale, et plus les Six – les membres permanents du Conseil de Sécurité plus l’Allemagne – pataugent.
Hier, Ahmadinejad a franchi un pas supplémentaire dans l’officialisation du programme nucléaire de son régime, en ordonnant à ses ingénieurs de commencer, dès demain mardi, "la production d’uranium hautement enrichi" dans son unité de Natanz.
Le "président" de la théocratie perse a, en outre, rejeté la faute de l’échec du plan d’échange d’uranium sur le Six, les accusant d’avoir "commencé à jouer" (sic) avec son pays.
Londres a immédiatement fait part de "sa profonde préoccupation". Berlin a appelé à des sanctions plus contraignantes, et le Secrétaire d’Etat américain à la Défense, Robert Gates, a rameuté la communauté internationale pour qu’elle fasse "front commun afin de faire pression sur le gouvernement iranien".
On allait se demander : "faire pression sur le gouvernement iranien" en supportant quelle exigence ? Ayant à l’esprit que le maintien de l’offre soumise le 21 octobre par les Six ne servirait qu’à endosser la Bombe islamiste, et qu’aucune requête actualisée n’a été ni élaborée, ni collectivement envisagée.
Mais Mme Hillary Clinton, la Secrétaire d’Etat étasunienne (ministre des Affaires Etrangères) ne nous a pas laissé le temps de nous interroger, déclarant quasi simultanément que "l’Iran fait planer une menace réelle, mais qu’Al Qaëda pose un danger plus grand encore".
Clinton a terminé de nous tétaniser, en affirmant que "la plupart d’entre nous estime que la menace principale émane des réseaux transnationaux non-étatiques".
Une paraphrase pour qualifier Al Qaëda, depuis que le Président Obama a interdit de parler d’islam, de menace et de terrorisme de façon intelligible, textuelle et intégrante.
Reste que la plupart d’entre nous aimerait bien connaître l’identité de la plupart de ceux qui sont de l’avis exposé par Hillary Clinton. Car elle, ou eux, s’ils existent, nous font grand souci.
De la même manière que l’énonciation redondante des préoccupations des uns, les sempiternels appels aux sanctions et à l’unité des autres fatiguent les analystes stratégiques, qui les interprètent comme des encouragements à Téhéran.
Preuve en est qu’Ahmadinejad réclame, depuis hier, que l’échange de combustible proposé par les Six soit "inconditionnel".
Traduit du persan, c’est à Téhéran de décider des (petites) quantités qui seraient échangées – non plus de l’exportation en un bloc de la quasi-totalité de l’uranium iranien faiblement enrichi -.
Ahmadinejad veut aussi que l’échange soit simultané, ou même que les Européens lui livrent du carburant concentré à 20% avant de leur transférer son minerai à 2%.
Au cas où les Six se plieraient à cette tragi-comédie, ils ne freineraient pas le développement de la Bombe des ayatollahs mais ils le précipiteraient.
Le Dr. Ali Akhbar Salehi, le chef du projet de la Bombe chiite, a précisé, hier également, qu’ "il ne reste pas beaucoup de temps" pour que les Six acceptent les conditions iraniennes d’un échange.
"Pas beaucoup de temps" avant quoi, devraient se demander les responsables politiques du monde libre, puisque la "République" islamique a toujours maintenu qu’elle ne poursuivait aucun programme de nucléaire militaire ?
Plus beaucoup de temps avant que le régime du Guide suprême Ali Khameneï ne produise, enfin, après des dizaines de milliards de dollars investis, son premier kilowatt d’électricité ? En quoi cela représenterait-il une menace pour quiconque ? Ce serait plutôt une bénédiction.
A moins que ce ne soit "pas beaucoup de temps" avant que l’Iran, "agacé" par les conditions des Six, ne décide de les punir en se passant de leur offre généreuse d’enrichissement d’uranium à des fins énergétiques et de recherche ?
Cela n’a, bien entendu, ni queue ni tête. Tout ce que les Perses recherchent consistant à gagner le plus de temps possible, en tergiversations verbales, pour finir la conception de leur Bombe.
Autre preuve de cela : après la réponse négative de Téhéran à la proposition du 21 octobre, les Six ont prié le régime islamiste de cristalliser sa vision d’un accord d’échange d’uranium, en la couchant par écrit à l’intention de l’Agence Internationale pour l’Energie Atomique.
A ce jour, la junte des théocrates chiites n’a même pas daigné se fendre d’une contre-proposition écrite de ce qu’elle nomme un "échange inconditionnel", c’est dire si elle tient à ce troc d’uranium.
Ce, car elle n’a que faire de minerai reconditionné dans des barres, qui le rendent inutilisable pour une application militaire. Sacrifier de l’uranium pour le transformer en barres de ce type tient du non-sens pour les ayatollahs, qui n’ont aucune intention de fabriquer de l’électricité ailleurs qu’à Bushehr.
Et le contrat de construction par les Russes du réacteur de Bushehr stipule qu’il comprend la livraison de tout le combustible nécessaire à son exploitation.
Le monde est mal pris face à la menace perse de plus en plus tangible. Ahmadinejad, qui l’a parfaitement saisi, se permet d’en rajouter. Il a ainsi fait savoir que son pays allait immédiatement mettre en chantier dix nouveaux sites d’enrichissement.
Sur le plan militaire, il a annoncé la mise au point de missiles antichars et antiaériens aussi performants que ceux que les Russes refusent de lui livrer.
Et le monde, de se montrer même incapable de s’entendre, en réponse à ces provocations, sur un train de sanctions déterminantes : les Russes souhaitent qu’un tel train ne concerne que le nucléaire stricto-sensu, et les Chinois ne veulent toujours pas en entendre parler.
Les Six sont incapables de s’accorder sur l’embargo des exportations de brut et les importations de pétrole raffiné, la seule pénalité qui gênerait véritablement le pouvoir islamiste.
Encore, faudrait-il dissocier ces mesures de la proposition du 21 octobre 2009, qui, si les Perses l’acceptaient aujourd’hui, n’auraient pratiquement plus aucun effet sur le développement de leur bombe atomique.
Pour être cohérent – nous en sommes loin ! – il est impérativement nécessaire de conditionner la levée de ces sanctions au renoncement des théocrates iraniens à leur programme de nucléaire militaire, ainsi qu’à la destruction, documentée et observée, de tous les sites participant à ce projet.
Il n’y a qu’ainsi qu’il est encore possible de sauver la planète d’une menace qu’elle ne peut supporter, sans avoir recours à la force. Et ce n’est pas même certain.
En fait, les cartes sont sur le tapis, celles d’Ahmadinejad, celles de Poutine et celles des Chinois. La conjoncture s’est matérialisée ; elle ne change pas depuis un moment, tout ce qui bouge, dans ce dossier, ce sont les centrifugeuses des mollahs.
Robert Gates a tort, lorsqu’il invoque la cohésion de la communauté internationale : celle-ci n’a jamais existé et n’existera sans doute jamais. Ce qui fait cruellement défaut, c’est un chef digne de ce nom, capable d’indiquer une direction à suivre à cette communauté.
C’est en cette occasion que Barack Obama et son administration se montrent inconsistants, dévoilant leur incapacité à résoudre une crise sécuritaire majeure.
Est-il besoin de rappeler que la proposition du 21 octobre fut l’expression de l’initiative du président US, qui s’affirmait persuadé de pouvoir résoudre ce problème au cours d’une négociation directe avec les dirigeants de Téhéran.
Cette démarche s’est soldée par un échec complet ; il n’y a pas d’accord, et il n’y a même pas eu de pourparlers directs. Humiliation pour le pensionnaire de Washington.
Obama s’est trompé. Certes, mais cela survient parfois, en matière de politique internationale notamment. La complication réside en cela que le Président demeure scotché sur son échec, incapable de faire émerger un plan B de ses téléprompteurs.
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[Jeudi 11/02/2010 10:44]