Conseil de sécurité
6498eséance – soir
LIBYE: LE CONSEIL DE SÉCURITÉ DÉCIDE D’INSTAURER UN RÉGIME D’EXCLUSION AÉRIENNE AFIN DE PROTÉGER LES CIVILS CONTRE DES ATTAQUES SYSTÉMATIQUES ET GÉNÉRALISÉES
Il renforce également l’embargo sur les armes imposé le 26 février et demande au Secrétaire général de créer un groupe d’experts chargé de superviser l’application des sanctions
Le Conseil de sécurité a décidé, ce soir, d’interdire tous vols dans l’espace aérien de la Jamahiriya arabe libyenne pour protéger la population civile et pour faire cesser les hostilités.
Aux termes de la résolution 1973, adoptée par 10 voix pour et 5 abstentions (Allemagne, Brésil, Chine, Fédération de Russie et Inde), le Conseil a décidé également que cette interdiction ne s’appliquera pas aux vols dont le seul objectif est d’ordre humanitaire ou encore l’évacuation d’étrangers.
La résolution, qui était présentée par la France et le Royaume-Uni, autorise en outre les États Membres à prendre au besoin toutes mesures nécessaires pour faire respecter l’interdiction de vol et de faire en sorte que des aéronefs ne puissent être utilisés pour des attaques aériennes contre la population civile.
Par ce texte, le Conseildécide aussi que les États Membres concernés devront informer immédiatement le Secrétaire général de l’ONU et le Secrétaire général de la Ligue des États arabes –l’organisation régionale qui avait demandé au Conseil l’interdiction de vol– sur les mesures prises à cet effet.
La résolution renforce de plus l’embargo sur les armes imposé par la résolution 1970 (2011) -qui estimait que « les attaques systématiques et généralisées commises contre la population civile pourraient constituer des crimes contre l’humanité »-, en demandantaux États de la région de faire inspecter, dans leurs ports et aéroports, les navires et aéronefs en provenance ou à destination de la Jamahiriya arabe libyenne.
En outre, le Conseil de sécurité prie le Secrétaire général de créer, pour une période initiale d’un an, un groupe d’experts chargé de réunir, examiner et analyser des informations provenant des États, d’organismes des Nations Unies compétents, d’organisations régionales et d’autres parties intéressées concernant l’application des mesures édictées dans la résolution 1970 et dans la présente résolution, en particulier les violations de leurs dispositions.
Avant le vote, le Ministre des affaires étrangères de la France, M. Alain Juppé, qui est arrivé aujourd’hui à New York pour défendre le texte de la résolution, a constaté l’insuffisance des mesures prises récemment par la communauté internationale pour ramener à la raison le régime du colonel Qadhafi. « La situation sur place est plus alarmante que jamais, marquée par la reconquête violente des villes qui avaient été libérées », a-t-il souligné, jugeant que le Conseil de sécurité ne peut pas laisser faire « les fauteurs de guerre et laisser bafouer la morale et la légalité internationale ».
Commentant la résolution présentée par son pays et le Royaume-Uni, il a affirmé qu’outre l’instauration de la zone d’exclusion aérienne, cette résolution appelle tous les États à protéger les civils et renforce les sanctions déjà adoptées, notamment l’embargo sur les armes et le gel des avoirs du clan Qadhafi et de ses affidés.
« Chaque jour, chaque heure qui passe alourdit le poids de la responsabilité qui pèse sur nos épaules, a prévenu M. Juppé. « Prenons garde d’arriver trop tard », a-t-il dit, en soulignant que « ce sera l’honneur du Conseil de sécurité d’avoir fait prévaloir en Libye la loi sur la force ».
La représentante des États-Unis, Mme Susan Rice, a insisté de son côté sur le fait que la résolution que le Conseil de sécurité venait d’adopter avait « pour unique objectif » de répondre à l’appel à l’aide lancé par le peuple libyen « ainsi qu’à la demande de la Ligue des États arabes d’établir une zone d’exclusion aérienne ».
Pour leur part, les délégations qui se sont abstenues sur ce texte, dont deux membres permanents du Conseil de sécurité -la Fédération de Russie et la Chine-, ont expliqué leur décision par le fait, qu’au cours des délibérations, elles n’avaient pas pu obtenir des réponses à leurs questions.
L’Ambassadeur Vitaly Churkin, de la Fédération de Russie, a ainsi fait observer que son pays n’avait pas reçu d’indications sur les moyens permettant de mettre en place le régime d’exclusion aérienne. « Non seulement nos questions n’ont reçu aucune réponse pendant les délibérations, mais nous avons aussi vu passer sous nos yeux un texte dont le libellé n’a cessé de changer, suggérant même par endroit la possibilité d’une intervention militaire d’envergure », a-t-il expliqué. M. Churkin a estimé que le moyen le plus rapide pour assurer la sécurité du peuple libyen restait l’instauration d’un cessez-le-feu immédiat, « ce que, précisément, la Fédération de Russie souhaitait obtenir par le biais d’un projet de résolution présenté hier ».
Tout en s’abstenant lors de l’adoption du projet de résolution, la Chine, a déclaré l’Ambassadeur LiBaodong, dont le pays assure la présidence du Conseil de sécurité pour le mois de mars, appuie le mandat de l’Envoyé spécial du Secrétaire général pour la Libye. Le représentant de la Chine a dit attendre « avec impatience que M. Abdul Ilah Khatib fasse le point aux membres du Conseil sur la situation sur le terrain ».
LA SITUATION EN LIBYE
Texte du projet de résolution S/2011/142
Le Conseil de sécurité,
Rappelantsa résolution 1970 (2011) du 26 février 2011,
Déplorantque les autorités libyennes ne respectent pas la résolution 1970 (2011),
Se déclarant vivement préoccupépar la détérioration de la situation, l’escalade de la violence et les lourdes pertes civiles,
Rappelantla responsabilité qui incombe aux autorités libyennes de protéger la population libyenne etréaffirmantqu’il incombe au premier chef aux parties à tout conflit armé de prendre toutes les mesures voulues pour assurer la protection des civils,
Condamnantla violation flagrante et systématique des droits de l’homme, y compris les détentions arbitraires, disparitions forcées, tortures et exécutions sommaires,
Condamnant égalementles actes de violence et d’intimidation que les autorités libyennes commettent contre les journalistes, les professionnels des médias et le personnel associé etengageant vivementcelles-ci à respecter les obligations mises à leur charge par le droit international humanitaire, comme indiqué dans la résolution 1738 (2006),
Considérantque les attaques généralisées et systématiques actuellement commises en Jamahiriya arabe libyenne contre la population civile peuvent constituer des crimes contre l’humanité,
Rappelantle paragraphe 26 de la résolution 1970 (2011) dans lequel il s’est déclaré prêt à envisager de prendre d’autres mesures pertinentes, si nécessaire, pour faciliter et appuyer le retour des organismes d’aide humanitaire et rendre accessible en Jamahiriya arabe libyenne une aide humanitaire et une aide connexe,
Se déclarant résoluà assurer la protection des civils et des secteurs où vivent des civils, et à assurer l’acheminement sans obstacle ni contretemps de l’aide humanitaire et la sécurité du personnel humanitaire,
Rappelantque la Ligue des États arabes, l’Union africaine et le Secrétaire général de l’Organisation de la Conférence islamique ont condamné les violations graves des droits de l’homme et du droit international humanitaire qui ont été et continuent d’être commises en Jamahiriya arabe libyenne,
Prenant notedu communiqué final de l’Organisation de la Conférence islamique en date du 8 mars 2011 et du communiqué du Conseil de paix et de sécurité de l’Union africaine en date du 10 mars 2011 portant création d’un comité ad hoc de haut niveau sur la Libye,
Prenant note égalementde la décision du Conseil de la Ligue des États arabes, en date du 12 mars 2011, de demander l’imposition d’une zone d’exclusion aérienne contre l’armée de l’air libyenne et de créer des zones protégées dans les secteurs exposés aux bombardements à titre de précaution pour assurer la protection du peuple libyen et des étrangers résidant en Jamahiriya arabe libyenne,
Prenant note en outrede l’appel à un cessez-le-feu immédiat lancé par le Secrétaire général le 16 mars 2011,
Rappelantsa décision de saisir le Procureur de la Cour pénale international de la situation en Jamahiriya arabe libyenne depuis le 15 février 2011 etsoulignantque les auteurs d’attaques, y compris aériennes et navales, dirigées contre la population civile, ou leurs complices doivent répondre de leurs actes,
Se déclarant à nouveau préoccupépar le sort tragique des réfugiés et des travailleurs étrangers forcés de fuir la violence en Jamahiriya arabe libyenne,se félicitantque les États voisins, en particulier la Tunisie et l’Égypte, aient répondu aux besoins de ces réfugiés et travailleurs étrangers, etdemandantà la communauté internationale d’appuyer ces efforts,
Déplorantque les autorités libyennes continuent d’employer des mercenaires,
Considérantque l’interdiction de tous vols dans l’espace aérien de la Jamahiriya arabe libyenne est importante pour assurer la protection des civils et la sécurité des opérations d’assistance humanitaire et décisive pour faire cesser les hostilités en Jamahiriya arabe libyenne,
Inquietégalementpour la sécurité des étrangers en Jamahiriya arabe libyenne et pour leurs droits,
Se félicitantque le Secrétaire général ait nommé M. Abdel-Elah Mohamed Al-Khatib Envoyé spécial en Libye et soutenant ses efforts pour apporter une solution durable et pacifique à la crise en Jamahiriya arabe libyenne,
Réaffirmantson ferme attachement à la souveraineté, à l’indépendance, à l’intégrité territoriale et à l’unité nationale de la Jamahiriya arabe libyenne,
Constatantque la situation en Jamahiriya arabe libyenne reste une menace pour la paix et la sécurité internationales,
Agissanten vertu du Chapitre VII de la Charte des Nations Unies,
1. Exigeun cessez-le-feu immédiat et la cessation totale des violences et de toutes les attaques et exactions contre la population civile;
2. Soulignequ’il faut redoubler d’efforts pour apporter une solution à la crise, qui satisfasse les revendications légitimes du peuple libyen, et note que le Secrétaire général a demandé à son Envoyé spécial de se rendre en Jamahiriya arabe libyenne et que le Conseil de paix et de sécurité de l’Union africaine a décidé d’envoyer son Comité ad hoc de haut niveau sur la Libye sur place pour faciliter un dialogue qui débouche sur les réformes politiques nécessaires à un règlement pacifique et durable;
3. Exigedes autorités libyennes qu’elles respectent les obligations qui leur incombent en vertu du droit international, y compris le droit international humanitaire, du droit des droits de l’homme et du droit des réfugiés, et prenne toutes les mesures pour protéger les civils et satisfaire leurs besoins élémentaires, et pour garantir l’acheminement sans obstacle ni contretemps de l’aide humanitaire;
Protection civile
4. Autoriseles États Membres qui ont adressé au Secrétaire général une notification à cet effet et agissent à titre national ou dans le cadre d’organismes ou d’arrangements régionaux et en coopération avec le Secrétaire général, à prendre toutes mesures nécessaires, nonobstant le paragraphe 9 de la résolution 1970 (2011), pour protéger les populations et les zones civiles menacées d’attaque en Jamahiriya arabe libyenne, y compris Benghazi, tout en excluant le déploiement d’une force d’occupation étrangère sous quelque forme que ce soit et sur n’importe quelle partie du territoire libyen, etprieles États Membres concernés d’informer immédiatement le Secrétaire général des mesures qu’ils auront prises en vertu des pouvoirs qu’ils tirent du présent paragraphe et qui seront immédiatement portées à l’attention du Conseil de sécurité;
5. Mesurel’importance du rôle que joue la Ligue des États arabes dans le maintien de la paix et de la sécurité régionales et, gardant à l’esprit le Chapitre VIII de la Charte des Nations Unies, prie les États Membres qui appartiennent à la Ligue de coopérer avec les autres États Membres à l’application du paragraphe 4;
Zone d’exclusion aérienne
6. Décided’interdire tous vols dans l’espace aérien de la Jamahiriya arabe libyenne afin d’aider à protéger les civils;
7. Décide égalementque l’interdiction imposée au paragraphe 6 ne s’appliquera pas aux vols dont le seul objectif est d’ordre humanitaire, comme l’acheminement d’une assistance, notamment de fournitures médicales, de denrées alimentaires, de travailleurs humanitaires et d’aide connexe, ou la facilitation de cet acheminement, ou encore l’évacuation d’étrangers de la Jamahiriya arabe libyenne, qu’elle ne s’appliquera pas non plus aux vols autorisés par les paragraphes 4 ci-dessus ou 8 ci-dessous ni à d’autres vols assurés par des États agissant en vertu de l’autorisation accordée au paragraphe 8 dont on estime qu’ils sont dans l’intérêt du peuple libyen et que ces vols seront assurés en coordination avec tout mécanisme établi en application du paragraphe 8;
8. Autoriseles États Membres qui ont adressé aux Secrétaires généraux de l’Organisation des Nations Unies et de la Ligue des États arabes une notification à cet effet, agissant à titre national ou dans le cadre d’organismes ou d’arrangements régionaux, à prendre au besoin toutes mesures nécessaires pour faire respecter l’interdiction de vol imposée au paragraphe 6 ci-dessus et faire en sorte que des aéronefs ne puissent être utilisés pour des attaques aériennes contre la population civile etdemandeaux États concernés, en coopération avec la Ligue des États arabes, de procéder en étroite coordination avec le Secrétaire général s’agissant des mesures qu’ils prennent pour appliquer cette interdiction, notamment en créant un mécanisme approprié de mise en œuvre des dispositions des paragraphes 6 et 7 ci-dessus;
9. Appelletous les États Membres agissant à titre national ou dans le cadre d’organismes ou d’arrangements régionaux à fournir une assistance, notamment pour toute autorisation de survol nécessaire, en vue de l’application des paragraphes 4, 6, 7 et 8 ci-dessus;
10. Prieles États Membres concernés de coordonner étroitement leur action entre eux et avec le Secrétaire général s’agissant des mesures qu’ils prennent pour mettre en œuvre les paragraphes 4, 6, 7 et 8 ci-dessus, notamment les mesures pratiques de suivi et d’approbation de vols humanitaires ou d’évacuation autorisés;
11. Décideque les États Membres concernés devront informer immédiatement le Secrétaire général et le Secrétaire général de la Ligue des États arabes des mesures prises en vertu des pouvoirs qu’ils tirent du paragraphe 8 ci-dessus et notamment soumettre un concept d’opérations;
12. Priele Secrétaire général de l’informer immédiatement de toute mesure prise par les États Membres concernés en vertu des pouvoirs qu’ils tirent du paragraphe 8 ci-dessus et de lui faire rapport dans les sept jours et puis tous les mois sur la mise en œuvre de la présente résolution, notamment pour ce qui est de toute violation de l’interdiction de vol imposée au paragraphe 6 ci-dessus;
Application de l’embargo sur les armes
13. Décideque le paragraphe 11 de la résolution 1970 (2011) sera remplacé par le paragraphe suivant :
« Demandeà tous les États Membres, en particulier aux États de la région, agissant à titre national ou dans le cadre d’organismes ou d’arrangements régionaux, afin de garantir la stricte application de l’embargo sur les armes établi par les paragraphes 9 et 10 de la résolution 1970 (2011), de faire inspecter sur leur territoire, y compris dans leurs ports maritimes et aéroports et en haute mer, les navires et aéronefs en provenance ou à destination de la Jamahiriya arabe libyenne, si l’État concerné dispose d’informations autorisant raisonnablement à penser que tel chargement contient des articles dont la fourniture, la vente, le transfert et l’exportation sont interdits par les paragraphes 9 ou 10 de la résolution 1970 (2011), telle que modifiée par la présente résolution; s’agissant notamment de mercenaires armés,prietous les États de pavillon ou d’immatriculation de ces navires et aéronefs de coopérer à toutes inspections etautoriseles États Membres à prendre toutes mesures dictées par la situation existante pour procéder à ces inspections »;
14. Prieles États Membres qui prennent des mesures en haute mer par application du paragraphe 13 ci-dessus de coordonner étroitement leur action entre eux et avec le Secrétaire général etprie égalementl’État concerné d’informer immédiatement le Secrétaire général et le Comité créé conformément au paragraphe 24 de la résolution 1970 (2011) (« le Comité ») des mesures prises en vertu des pouvoirs conférés par le paragraphe 13 ci-dessus;
15. Demandeà tout État Membre qui procède à titre national ou dans le cadre d’un organisme ou d’un arrangement régional à une inspection, en application du paragraphe 13 ci-dessus, de présenter au Comité par écrit et sans délai un rapport initial exposant en particulier les motifs de l’inspection et les résultats de celle-ci et indiquant s’il y a eu coopération ou non et, si des articles dont le transfert est interdit ont été découverts,demande égalementaudit État Membre de présenter par écrit au Comité, à une étape ultérieure, un rapport écrit donnant des précisions sur l’inspection, la saisie et la neutralisation, ainsi que des précisions sur le transfert, notamment une description des articles en question, leur origine et leur destination prévue, si ces informations ne figurent pas dans le rapport initial;
16. Déploreles flux continus de mercenaires qui arrivent en Jamahiriya arabe libyenne et appelle tous les États Membres à respecter strictement les obligations mises à leur charge par le paragraphe 9 de la résolution 1970 (2011) afin d’empêcher la fourniture de mercenaires armés à la Jamahiriya arabe libyenne;
Interdiction des vols
17. Décideque tous les États interdiront à tout aéronef enregistré en Jamahiriya arabe libyenne, appartenant à toute personne ou compagnie libyenne ou exploité par elle, de décoller de leur territoire, de le survoler ou d’y atterrir, à moins que le vol ait été approuvé par avance par le Comité ou en cas d’atterrissage d’urgence;
18. Décideque tous les États interdiront à tout aéronef de décoller de leur territoire, d’y atterrir ou de le survoler s’ils disposent d’informations autorisant raisonnablement à penser que l’aéronef en question contient des articles dont la fourniture, la vente, le transfert ou l’exportation sont interdits par les paragraphes 9 et 10 de la résolution 1970 (2011), telle que modifiée par la présente résolution, notamment des mercenaires armés, sauf en cas d’atterrissage d’urgence;
Gel des avoirs
19. Décideque le gel des avoirs imposé aux paragraphes 17, 19, 20 et 21 de la résolution 1970 (2011) s’appliquera aux fonds, autres avoirs financiers ou ressources économiques se trouvant sur le territoire des États Membres qui sont détenus ou contrôlés, directement ou indirectement, par les autorités libyennes, désignées comme telles par le Comité, ou par des personnes ou entités agissant pour son compte ou sous ses ordres, ou par des entités détenues ou contrôlées par eux et désignées comme telles par le Comité, etdécide égalementque tous les États devront veiller à empêcher leurs nationaux ou toute personne ou entité se trouvant sur leur territoire de mettre des fonds, autres avoirs financiers ou ressources économiques à la disposition des autorités libyennes, désignées comme telles par le Comité, des personnes ou entités agissant pour son compte ou sous ses ordres, ou des entités détenues ou contrôlées par eux et désignées comme telles par le Comité, ou d’en permettre l’utilisation à leur profit et demande au Comité de désigner ces autorités, personnes et entités dans un délai de 30 jours à dater de l’adoption de la présente résolution et ensuite selon qu’il y aura lieu;
20. Se déclare résoluà veiller à ce que les avoirs gelés en application du paragraphe 17 de la résolution 1970 (2011) soient à une étape ultérieure, dès que possible, mis à la disposition du peuple de la Jamahiriya arabe libyenne et utilisés à son profit;
21. Décideque tous les États exigeront de leurs nationaux et ressortissants et des sociétés sises sur leur territoire ou relevant de leur juridiction de faire preuve de vigilance dans leurs échanges avec des entités enregistrées en Jamahiriya arabe libyenne ou relevant de la juridiction de ce pays, ou toute personne ou entité agissant pour leur compte ou sous leurs ordres, et avec des entités détenues ou contrôlées par elles si ces États ont des raisons de penser que de tels échanges peuvent contribuer à la violence ou à l’emploi de la force contre les civils;
Désignation
22. Décideque les personnes désignées à l’annexe I tombent sous le coup de l’interdiction de voyager imposée aux paragraphes 15 et 16 de la résolution 1970 (2011) etdécide égalementque les personnes et entités désignées à l’annexe II sont visées par le gel des avoirs imposé aux paragraphes 17, 19, 20 et 21 de la résolution 1970 (2011);
23. Décideque les mesures prévues aux paragraphes 15, 16, 17, 19, 20 et 21 de la résolution 1970 (2011) s’appliqueront aussi à toutes personnes et entités dont le Conseil ou le Comité ont établi qu’elles ont violé les dispositions de la résolution 1970 (2011), en particulier ses paragraphes 9 et 10, ou qu’elles ont aidé d’autres à les violer;
Groupe d’experts
24. Priele Secrétaire général de créer, pour une période initiale d’un an, en consultation avec le Comité créé par la résolution 1970 (2011) (le « Comité »), un groupe de huit experts au maximum (le « Groupe d’experts ») qui sera placé sous la direction du Comité et s’acquittera des tâches suivantes :
a) Aider le Comité à s’acquitter de son mandat, tel que défini au paragraphe 24 de la résolution 1970 (2011) et de la présente résolution;
b) Réunir, examiner et analyser des informations provenant des États, d’organismes des Nations Unies compétents, d’organisations régionales et d’autres parties intéressées concernant l’application des mesures édictées dans la résolution 1970 (2011) et dans la présente résolution, en particulier les violations de leurs dispositions;
c) Faire des recommandations sur les décisions que le Conseil, le Comité ou les États pourraient envisager de prendre pour améliorer l’application des mesures pertinentes;
d) Remettre au Conseil un rapport d’activité au plus tard 90 jours après sa création, et lui remettre un rapport final comportant ses conclusions et recommandations au plus tard 30 jours avant la fin de son mandat;
25. Engage instammenttous les États, les organismes compétents des Nations Unies et les autres parties intéressées à coopérer pleinement avec le Comité et avec le Groupe d’experts, notamment en leur communiquant toutes informations à leur disposition sur l’application des mesures édictées par la résolution 1970 (2011) et par la présente résolution, en particulier les violations de leurs dispositions;
26. Décideque le mandat du Comité, tel que défini au paragraphe 24 de la résolution 1970 (2011), s’étendra aux mesures prévues par la présente résolution;
27. Décideque tous les États, y compris la Jamahiriya arabe libyenne, prendront les mesures nécessaires pour s’assurer qu’aucune réclamation ne soit instruite à l’initiative des autorités libyennes ou de toute personne ou entité de la Jamahiriya arabe libyenne ou par toute personne déclarant agir par leur intermédiaire ou pour leur compte en liaison avec tout contrat ou autre transaction dont la réalisation aura été affectée en raison des mesures imposées par sa résolution 1970 (2011), par la présente résolution ou par d’autres résolutions connexes;
28. Réaffirmequ’il entend continuer de suivre les agissements des autorités libyennes et souligne qu’il est disposé à revoir à tout moment les mesures imposées par la présente résolution et par la résolution 1970 (2011), y compris à les renforcer, les suspendre ou les lever, selon que les autorités libyennes respectent les dispositions de la présente résolution et de la résolution 1970 (2011);
29. Décidede rester activement saisi de la question.
Déclaration avant le vote
M. ALAIN JUPPÉ,Ministre des affaires étrangères de la France, a déclaré avant le vote que « le monde était en train de vivre une de ces révolutions qui changent le cours de l’histoire ». Estimant que les peuples arabes clament leur désir de démocratie, les transitions en Tunisie et en Égypte étant menées dans un esprit de maturité, il a estimé que « ce nouveau printemps arabe était pour nous tous une bonne nouvelle ». Le Ministre français des affaires étrangères a ensuite invité le Conseil à accompagner cette évolution avec confiance pour aider chaque peuple à construire son avenir. Poursuivant, il a déploré que pendant ce temps, en Libye, « hélas, la volonté populaire est foulée au pied par le régime de Qadhafi ». Après avoir rappelé les mesures prises par la communauté internationale pour ramener à la raison ce régime, il a constaté qu’elles n’avaient pas été suffisantes, les violences n’ayant fait que redoubler. « La situation sur place est plus alarmante que jamais, marquée par la reconquête violente des villes qui avaient été libérées », a souligné M. Juppé, qui a estimé que le Conseil de sécurité ne pouvait pas laisser faire « les fauteurs de guerre et laisser bafouer la morale et la légalité internationale ». Commentant la résolution présentée par son pays et le Royaume-Uni, il a affirmé qu’elle donnait les moyens de protéger la population civile. « Outre l’instauration de la zone d’exclusion aérienne, la résolution appelle tous les États à protéger les civils, elle renforce les sanctions déjà adoptées, notamment l’embargo sur les armes et le gel des avoirs du clan Qadhafi et de ses affidés ». Avant de conclure, M. Juppé a estimé qu’adopter cette résolution serait l’honneur du Conseil de sécurité qui, ce faisant, ferait prévaloir la loi sur la force. « C’est une question de jours, c’est peut-être une question d’heures. Chaque jour, chaque heure qui passe, resserre l’étau des forces de la répression autour des populations civiles éprises de liberté, et notamment de la population de Benghazi », a-t-il martelé.
« Chaque jour, chaque heure qui passe, alourdit le poids de la responsabilité qui pèse sur nos épaules », a-t-il encore déclaré.
Explications de vote
M. NAWAF SALAM (Liban), soulignant les violences qui se produisent actuellement en Libye, s’est réjoui que les membres du Conseil ne soient pas restés les bras croisés. Le 26 février dernier, le Conseil avait adopté la résolution 1970 qui demandait la cessation immédiate de la violence, a-t-il rappelé. À son tour, l’Assemblée générale avait suspendu la participation de la Libye au Conseil des droits de l’homme, a-t-il ajouté. Le représentant a également rappelé que le Liban avait lancé un appel au Conseil de sécurité sur la base de la résolution de la Ligue des États arabes du 12 mars 2011, qui demande au Conseil de sécurité d’assumer ses responsabilités face à la situation en Libye et de prendre les mesures nécessaires pour imposer une zone d’exclusion aérienne et pour garantir la protection du peuple libyen et de tous les ressortissants étrangers. La résolution que le Conseil de sécurité vient d’adopter n’aura pas pour conséquence l’occupation d’une quelconque partie de la Libye, a-t-il affirmé. Le Liban, qui a vécu les atrocités de la guerre, ne peut appuyer le recours à la force dans aucun pays et surtout pas en Libye, « ce pays frère », a-t-il tenu à préciser. Mais, a-t-il espéré, la présente résolution aura un rôle dissuasif et permettra d’éviter tout recours à la force. Il a appelé à respecter la souveraineté territoriale de la Libye et a réaffirmé l’importance de parvenir à une solution pacifique. Il a aussi appuyé la mission de l’Envoyé spécial du Secrétaire général pour la Libye, M. Abdul Ilah Khatib.
M. MARK LYALL GRANT (Royaume-Uni) a estimé que le régime libyen a perdu toute légitimité. Ce régime a agi en violation des résolutions du Conseil et il est sur le point de prendre d’assaut la ville de Benghazi, a-t-il fait remarquer. C’est pourquoi, a-t-il dit, sa délégation a plaidé en faveur d’une adoption rapide de la résolution d’aujourd’hui. Les partenaires de l’Organisation du Traité de l’Atlantique Nord (OTAN) et de la Ligue des États arabes sont maintenant prêts à soutenir ce texte, a-t-il assuré.
M. PETER WITTIG (Allemagne) a souhaité que le colonel Qadhafi renonce immédiatement au pouvoir, soulignant que son régime a perdu toute légitimité. L’objectif est maintenant de promouvoir la transformation politique de la Libye, a-t-il insisté. Dans ce processus, les fondations de la démocratie doivent être jetées, a-t-il dit, estimant que le Conseil national de transition est pour cela un interlocuteur important. Il a aussi salué la mission de l’Envoyé spécial du Secrétaire général pour la Libye, M. Abdul Ilah Khatib. Pour l’Allemagne, il est important d’empêcher le dirigeant libyen d’avoir accès aux moyens financiers qui lui ont permis de rester au pouvoir. L’Allemagne soutient donc pleinement les sanctions économiques et financières imposées en vertu de la présente résolution, a assuré le représentant. Cependant, a-t-il expliqué, l’Allemagne s’est abstenue de voter en faveur de la résolution parce qu’elle ne souhaite pas s’engager dans une confrontation militaire, ce qui est envisagé par certains paragraphes.
Mme SUSAN RICE (États-Unis) a déclaré que la résolution que le Conseil de sécurité vient d’adopter répond à l’appel à l’aide lancé par le peuple libyen. Elle a indiqué que la première série de sanctions ciblant les dirigeants libyens n’avait pas été suffisante, le colonel Qadhafi ayant continué de violer les droits fondamentaux du peuple libyen. Mme Rice a ensuite souligné que la présente résolution était également une réponse à la demande de la Ligue des États arabes d’établir une zone d’exclusion aérienne. « Par ce texte, nous nous dotons des moyens de mettre fin à la violence, le recours à la force en vertu du Chapitre VII de la Charte des Nations Unies n’ayant pour seul objectif que de protéger les civils dans les zones ciblées par le régime en place. »
M. HARDEEP SINGH PURI (Inde) a expliqué que son pays s’était abstenu lors du vote sur le projet de résolution, convaincu qu’il « n’existait pratiquement aucune information crédible sur la situation sur place » qui puisse justifier la décision d’établir une zone d’exclusion aérienne. « Nous ne savons pas plus comment les mesures prises seront appliquées », a-t-il fait remarquer, avant d’ajouter: « Nous demandons donc aux autorités libyennes de cessez-le-feu et de répondre aux aspirations légitimes du peuple libyen ».
Mme MARIA LUIZA RIBEIRO VIOTTI (Brésil) a demandé que le vote exprimé aujourd’hui par sa délégation ne soit pas interprété comme une tolérance du comportement des autorités libyennes ni comme une indifférence par rapport à la protection des civils et au respect de leurs droits. Le Brésil est solidaire de tous les mouvements de la région qui expriment des demandes légitimes en vue d’une meilleure gouvernance, d’une plus grande participation politique et d’une justice sociale, a-t-elle précisé. Mme Ribeiro Viotti a condamné le non-respect par les autorités libyennes de leurs obligations en vertu du droit international humanitaire et des droits de l’homme. Elle a cependant estimé que le texte présenté aujourd’hui envisage des mesures qui vont bien au-delà de l’appel de la Ligue des États arabes qui demandait des mesures fortes pour faire cesser la violence. « Nous ne sommes pas convaincus que l’utilisation de la force, telle que prévue au paragraphe 4 du dispositif, permettra d’atteindre l’objectif commun qui est de mettre un terme à la violence et de protéger les civils », a-t-elle fait remarquer.
M. IVAN BARBALIĆ (Bosnie-Herzégovine) a réitéré que sa délégation était très préoccupée par les pertes en vies humaines en Libye. Il a souligné la nécessité d’assurer l’assistance humanitaire à la population civile sans entrave. Tout en appuyant pleinement le respect de l’intégrité territoriale de la Libye, il a cependant insisté sur l’importance de protéger de la population civile.
M. NÉSTOR OSORIO (Colombie) a expliqué que sa délégation avait voté en faveur de la résolution qui, a-t-il dit, « permettra de protéger la population civile d’un régime qui a perdu toute légitimité ». « Cette nouvelle résolution s’inscrit dans l’application de mesures graduelles conformes à la Charte des Nations Unies », a-t-il souligné.
M. VITALY CHURKIN (Fédération de Russie) a indiqué que son pays s’était abstenu lors du vote « pour des raisons de principe ». Il a ainsi déploré que le travail sur le document n’ait pas été conforme à la pratique du Conseil de sécurité. M. Churkin a notamment indiqué que son pays n’avait pas obtenu de réponses sur les moyens permettant de mettre en place le régime d’exclusion aérienne. « Non seulement, nous n’avons obtenu de réponses à nos questions aux cours des délibérations, mais nous avons aussi vu passer sous nos yeux un texte dont le libellé n’a cessé de changer, suggérant même par endroit la possibilité d’une intervention militaire d’envergure », a-t-il expliqué. « La voie la plus rapide pour assurer la sécurité du peuple libyen est l’instauration d’un cessez-le-feu immédiat, ce que, précisément, souhaitait obtenir mon pays par le biais d’u projet de résolution présenté hier », a souligné M. Churkin.
M. JOSE FILIPE MORAES CABRAL (Portugal) a condamné le recours à la force par un régime qui a perdu toute légitimité. « Nous avons appelé à la cessation de la violence et à la mise en place d’un cessez-le-feu, et c’est dans ce contexte que nous avions voté en faveur de la résolution 1970, le 26 février dernier », a-t-il rappelé. Le représentant a regretté que les autorités de Tripoli n’en aient tenu aucun compte. Pour la communauté internationale, le régime en place est arrivé à son terme et il doit se réformer. Il a estimé que la résolution adoptée aujourd’hui par le Conseil de sécurité répond aux objectifs essentiels d’un cessez-le-feu, d’une cessation des violences et de l’acheminement sans entrave de l’aide humanitaire afin qu’elle parvienne à la population civile. « Nous appuyons aussi la mission de l’Envoyé spécial du Secrétaire général pour la Libye », a-t-il ajouté.
Mme JOY OGWU (Nigéria) a constaté que les autorités libyennes ont continué à violer les termes de la résolution 1970, adoptée le 26 février dernier par le Conseil de sécurité, et les dispositions du droit international. L’ampleur de la catastrophe humanitaire explique la raison pour laquelle le Nigéria a voté en faveur de ce texte, a-t-elle expliqué. Le texte met l’accent sur la protection des civils et sur l’assistance humanitaire, ce qui répond à beaucoup de nos préoccupations, a-t-elle dit. Le Nigéria continue à penser que l’occupation étrangère n’est pas un moyen qui permet d’assurer la paix en Libye. « En outre, nous aspirons à respecter l’unité et l’intégrité territoriale de la Libye. Nous sommes également encouragés par le fait que la voie politique est bien précisée dans la résolution adoptée ». Mme Ogwu a estimé que cette résolution envoie le message sans équivoque au peuple libyen que la dignité et la sécurité de la population sont essentielles.
M. BASO SANGQU (Afrique du Sud) a souhaité que la situation en Libye puisse se résoudre de façon pacifique, en trouvant une solution politique d’ensemble. Il faut aussi préserver l’unité, la souveraineté et l’intégrité territoriale de la Libye, a-t-il demandé. Il a apprécié qu’un Envoyé spécial pour la Libye ait été désigné. M. Sangqu a rappelé que la résolution 1970 n’avait pas été suivie d’effet, les autorités libyennes ayant agi au mépris de ce texte. « Nous pensions donc que le Conseil de sécurité ne pouvait rester silencieux face à de telles violences », a-t-il expliqué. Le représentant a estimé que le texte adopté aujourd’hui répond aux attentes des populations de la région. « Pour le principe, nous avons donc appuyé cette résolution avec les mises en garde nécessaires sur le respect de l’intégrité et de la souveraineté territoriale », a-t-il dit, en rejetant toute occupation ou intervention étrangère qui se ferait sous prétexte de la protection des civils.
M. LI BAODONG (Chine) a rappelé que son pays s’était toujours opposé au recours à la force dans les relations internationales. « La Chine, même si elle reconnaît la légitimité de la demande de la Ligue des États arabes que soit établie une zone d’exclusion aérienne, éprouve toujours de grandes difficultés à l’égard de plusieurs dispositions importantes du texte de la résolution ». « C’est la raison pour laquelle nous nous sommes abstenus », a-t-il ajouté. Avant de conclure, le représentant de la Chine a noté que son pays appuyait le mandat de l’Envoyé spécial du Secrétaire général pour la Libye, dont il attend « avec impatience qu’il fasse le point aux membres du Conseil de la situation sur le terrain ».