Qui a Perdu le Liban ?
Par Rick Moran
Paru dans FrontPage Magazine du 17/09/2010
Traduit par Albert Soued, http://soued.chez.com pourwww.nuitdorient.com
L'image du 1er ministre Libanais Saad Hariri, embrassant le Président Syrien Bashar al Assad lors de sa visite la semaine dernière montre une fois de plus qu'un vent nouveau souffle au Levant – un vent mauvais qui sent la nouvelle stratégie qui s'abat sur les lieux, au détriment d'Israël et des Etats-Unis
L'an dernier on imaginait mal cette accolade. Car Saad Hariri est le fils d'un homme qui a été assassiné, l'ex-1er ministre Rafiq Hariri, avec tous les soupçons pesant sérieusement sur les épaules de ce même Bashar al Assad, qui aurait fomenté le massacre de la Saint Valentin de l'an 2005. Lors de la publication du rapport du Procureur Spécial de l'Onu, chargé de cet attentat, Detlev Mehlis (le rapport a pour nom "rapportMehlis"), Saad Hariri a rapporté dans une interview une conversation qu'il avait eue avec son père, après que celui-ci eut un entretien avec Bashar el Asad, à propos du maintien ou non en fonction du président libanais Emile Lahoud. Saad disait: Je discutais avec mon père à propos de l'extension du mandat du Président Lahoud. Il m'a dit que Bashar el Assadl'avait menacé en lui disant "C'est cela que je veux; si vous croyez, que Chirac et vous-même allez gouverner le Liban, vous vous trompez ! Cela n'arrivera pas. Lahoud c'est comme moi-même, ce que je lui dis de faire, il le fait ! Son mandat sera prorogé, sinon je briserai le Liban sur votre tête et sur celle de Walid Joumblat. Alors vous faîtes ce que je vous dis, sinon nous vous aurons, vous et votre famille, où que vous soyez !"
Quelques jours plus tard, l'ex-1er ministre a été tué, avec 21 autres personnes dans un énorme attentat où plusieurs voitures ont explosé.
Alors que dit aujourd'hui le jeune Hariri ? Selon le rapportMehlis, depuis 2005, Saad Hariri a blâmé la Syrie pour la mort de son père. Lundi dernier, dans un revirement explosif, il dit au journal saoudien al Sharq al Awsat (Le Moyen Orient) que c'était une erreur d'accuser la Syrie pour cet énorme attentat du 14/02/2005, près de l'hôtel Saint Georges, en front de mer, et que cette accusation avait surtout un motif politique.
"C'était une accusation politique et celle-ci prend fin" dit-il dans cette interview, insistant qu'il y avait un Tribunal Spécial pour le Liban (TSL) à la Haye et que c'était à lui de désigner les coupables.
Le rapport Mehlis était le seul rapport officiel émis sur cette affaire par le TSL et il fit du bruit. Plusieurs hauts fonctionnaires syriens étaient inculpés – y compris le beau frère du président Bashar el Assad, Assef Shawkat, qui était à l'époque le chef du Renseignement Syrien – ainsi que 4 généraux de l'armée syrienne, suspectés de complicité dans l'attaque, emprisonnés puis libérés, sans être disculpés. Mais, chose curieuse, après avoir inculpé le gouvernement syrien de meurtre prémédité, le tribunal de l'Onu a eu les jetons. L'accusation a changé d'inculpé, le Hezbollah remplaçant la Syrie – néanmoins le résultat pourrait être le même, vu les liens étroits entre les 2 entités. Mais inculper un gouvernement de meurtre posait problème et l'Onu voulait éviter cet embarras, accusant alors son agent au Liban, le Hezbollah. Mais l'inculpation d'éminents membres de ce groupe terroriste pose également problème aujourd'hui, du fait que le Hezbollah est de facto chef de l'opposition dans le gouvernement. Le chef spirituel et militaire du Hezbollah, Hassan Nasrallah a déjà annoncé que toute inculpation d'un de ses membres précipiterait une crise politique au Liban.
A l'origine, le désaveu de Saad Hariri avait pour objectif de réussir à former un gouvernement stable et de maintenir la paix dans un pays où les tensions sont très fortes. Comme le dit la journaliste et vice présidente du Jerusalem Post, CarolineGlick, on n'est plus dans un stratagème politique. Depuis que le gouvernement est formé à Beyrouth, Hariri est allé 3 fois à Damas pour se soumettre aux desiderata d'Assad. Et de ce fait, il ne peut plus revendiquer une justice pour l'assassinat de son père. Il a même approuvé l'accusation fantaisiste du Hezbollah qu'Israël aurait été derrière l'attentat. A l'issue de son dernier voyage à Damas, Saad Hariri a déclaré que les accusations contre le régime syrien dans l'assassinat de son père n'étaient pas fondées. Selon Caroline Glick, la situation a empiré.
Lundi dernier, le quotidien Yédiot Ah'oronot a rapporté que des pressions massives étaient exercées sur Saad Hariri par les Services Spéciaux Syriens et Iraniens, afin que le Liban rejoigne l'axe iranien, incluant déjà la Syrie, le Hezbollah et le Hamas. S'il rejoint cet axe, le Liban en deviendra le 1ermembre non volontaire et il y a des risques importants que Hariri succombe aux pressions, car selon Yédiot Ah'oronot, une offre sans ambages lui a été faite : "Si tu ne nous rejoins pas, tu subiras le sort de ton père !"
Cette orientation était prévisible. En février, Saad Hariri avait précisé que, contrairement au passé, notamment en 2006 lorsque le soutien apporté par le gouvernement libanais au Hezbollah était tiède, dans tout futur conflit avec Israël, le gouvernement du Liban soutiendrait totalement son partenaire, le Hezbollah. Malgré la victoire électorale de son mouvement du 14 mars qui lui montrait que le peuple Libanais ne voulait pas du Hezbollah au gouvernement, Saad Hariri a été obligé de s'incliner devant ce groupe terroriste, la seule force armée effective du pays.
On peut se poser la question de savoir si le rapprochement tenté avec la Syrie par l'administration Obama ne serait pas à l'origine de la détérioration de la situation en défaveur de l'Occident. L'administration Bush soutenait fermement l'ancien 1er ministre Fouad Siniora et, par l'intermédiaire du Roi Abdallah d'Arabie, les Etats-Unis et la France soutenaient les forces démocratiques au Liban. Cette situation n'était pas simple, car il ne fallait que Siniora apparaisse comme la marionnette de l'Occident, accusation toujours aux lèvres des extrémistes au Moyen Orient. Mais en réalité, il est extrêmement difficile de prévenir l'évolution actuelle constatée au Moyen Orient, étant donné la politique étrangère d'ouverture adoptée par le Président Obama.
Le Liban a besoin de la bonne volonté de la Syrie pour continuer à rester un état démocratique et la Syrie a besoin du Liban comme vache à lait. Les liens économiques et financiers entre les 2 pays sont considérables et établis de longue date. Et ces liens profitent énormément à l'entourage immédiat deBashar el Asad et de son parti Baath, cimentant des loyautés àAssad et à son régime. Il n'aurait pas été réaliste de la part du Liban de prendre ses distances de la Syrie, vu le danger. Un petit pays sans défense, miné par les divisions religieuses et ethniques, a peu de choix, et pour la paix avec un puissant voisin, ce pays a fait le choix optimum. Sans le parapluie de sécurité des Etats-Unis et de la France, quelle chance le Liban avait-il de rester indépendant ?
Ainsi Hariri et Assad se sont embrassés et l'Iran a maintenant le Liban entre ses griffes, alors que la situation stratégique d'Israël se détériore. Toute guerre avec le Hezbollah fera intervenir l'armée libanaise. Même si ces forces armées ne font peur à personne, elles rendront encore plus difficile pour Israël toute intervention contre une éventuelle provocation du Hezbollah, ou l'intervention de celui-ci dans une attaque contre l'Iran.
En fin de compte, la réponse à la question "Qui a perdu le Liban ?" est somme toute aisée: les Libanais eux-mêmes. Ils ne se sont jamais unis pour défier et neutraliser les 2 menaces majeures, les armes du Hezbollah et l'agressivité syrienne. Les Libanais paieront un lourd tribut lors de la prochaine confrontation entre Israël et les terroristes
Who Lost Lebanon?
by Rick Moran
FrontPageMagazine Sep 17th, 2010
The picture that flashed around the world of Lebanese Prime MinisterSaad Hariri embracing Syrian President Bashar Assad during his visit to Damascus last week was proof positive that a new wind was blowing through the Levant – an ill wind that smelled of a new strategic arrangement falling into place, much to the detriment of Israel and the United States.
To imagine the two leaders hugging was impossible just a year ago. Hariri, son of the assassinated former Prime MinisterRafiq Hariri, placed the blame for his father’s 2005 Valentines Day massacre squarely on the shoulders of Bashar Assad. In an interview following the release of the Mehlis report by UN Special Prosecutor Detlev Mehlis, the younger Hariri related a conversation with his father who had just returned from a meeting with President Assad in Syria over the extension of President EmileLaHoud’s term in office. Saad said:
I discussed with my father, the late Rafik Hariri, the extension of President Lahoud’s term. He told me that President BasharAssad threatened him saying: “This is what I want. If you think that President Chirac and you are going to run Lebanon, you are mistaken. It is not going to happen. President Lahoud is me. Whatever I tell him, he follows suit. This extension is to happen or else I will break Lebanon over your head and Walid Jumblat’s. So, you either do as you are told or we will get you and your family wherever you are.”
Just days later, the former prime minister was killed, along with 21 others, in a massive car bomb explosion.
What does Hariri the Younger say now? According to theMehlis report:
Hariri, who for years blamed Syria for his father’s death, dropped a bombshell on Monday when he told the Saudi-owned Asharq al-Awsat newspaper that it was a mistake to accuse Syria in the giant truck bomb that killed ex-Lebanese premier Rafik Hariri along with 21 others near the St GeorgeHotel on the Beirut waterfront on Feb. 14, 2005, claiming that the chargewas politically motivated.
“This was a political accusation, and this political accusation has finished,” Hariri said in the interview while emphasizing that the determination of his father’s killers lies in the hands of the Netherlands-based Special Tribunal for Lebanon (STL) set up to probe the crime.
The Mehlis report was the first official word issued by the STL on what happened that fateful day in 2005 and it was a bombshell. Several high level Syrian government officials were implicated – including President Assad’s brother-in-law AssefShawkat, who at the time was chief of the Syrian intelligence service – as well as 4 Lebanese army generals who were suspected of complicity in the attack and imprisoned for several years. They have since been released but not exonerated.
But something funny happened on the way to indicting the Syrian government for murder; the UN got cold feet. Later reports moved blame for the assassination away from Syria and toward Hezbollah (virtually the same thing as blaming Syria given the terrorist group’s close ties to Damascus). Indicting a government for murder presents many problems with which the UN was loathe to deal. This may be why Hezbollah, Syria’s agent in Lebanon, appears to be about to take the fall.
An indictment of prominent members of the terrorist group carries its own dangers due to Hezbollah’s position in the government of Lebanon as de-facto leader of the opposition. With Hezbollah’s spiritual and military chief Hassan Nasrallahalready making noises that any indictments directed against the group would precipitate a political crisis, Hariri’s disavowel of his earlier accusations may be designed to try and keep the peace in a country where tensions have been mounting for months.
But, it is actually worse than a simple political ploy as Caroline Glick points out:
Since he formed his government, Hariri has travelled three times to Damascus to kiss Assad’s ring. And in so doing, he gave up his call for justice for his father’s killers.
This became clear when last month Hariri embracedNasrallah’s allegation that Israel murdered his father. Then last week, following his latest trip to Damascus, Hariri announced that his past claims that the Syrian regime assassinated his father were unfounded.
It gets worse, according to Glick:
On Monday, Yediot Aharonot reported that Iranian and Syrianintelligence agencies are applying massive pressure on Hariri to openly join the Iranian axis. Today that axis includes the Syrian regime, Hezbollah and Hamas. If and when Hariri openly joins, Lebanon will become its first non-voluntary member.
Chances are good that Hariri will succumb to their pressure.Yediot reported that the Iranians and Syrians made him an offer he can’t refuse: “If you don’t join us, you will share your father’s fate.”
A move toward Iran-Syria by Lebanon would not be entirely unexpected. Back in February, Hariri made it clear that unlike the Lebanese government’s tepid support of Hezbollah during the 2006 war with Israel, any future conflict with the Jewish state would see his government giving full backing to the terrorist group. Clearly, Hariri has been feeling the pressure from Hezbollah since he took office. Despite an electoral victory last year that showed the Lebanese people opposed a Hezbollah takeover of the government, there really isn’t much Hariri could have done while the terrorists are the only effective armed presence in the country.
A legitimate question can be raised whether the attempted US rapprochement with Syria has anything to do with the deteriorating position of the democrats in Lebanon. President Bush was steadfast in his support of the Lebanese government under former Prime Minister Fuad Siniora and, using King Abdullah of Saudi Arabia as a proxy, both the US and France buttressed the forces working for democracy in Lebanon as best they could given the circumstances. But it was extremely difficult given the tightrope the Western powers had to walk in order to avoid the appearance that Siniora was a Franco-US puppet – a charge repeated early and often by Hezbollah and their allies. In the end, neither Presidents Bush or Obama could realistically be expected to forestall what appears to be the loss of Lebanon to the Iranians.
Lebanon needs Syrian goodwill to continue to explore democracy while Syria needs Lebanon as a cash cow to milk. The financial and economic ties that bind the two nations are extensive, put in place by Syria during their long occupation. A lot of those joint Syrian-Lebanese businesses benefit members of President Assad’s Syrian Baath Party, cementing their loyalty to Assad and the regime. It was unrealistic to expect Lebanon to maintain an arms-length relationship with Syria despite the dangers. A small, defenseless country, riven by factionalism and religious differences, felt it had little choice but to make the best peace it could with its powerful neighbor. Without a security guarantee from the US or France, what chance would Lebanon have of maintaining any independence at all?
So Hariri and Assad embraced, Iran appears to have the tiny country in its clutches, and Israel’s strategic situation just got worse. Lebanon has gone completely over to the dark side and any war with Hezbollah will now probably involve the Lebanese army as well. While the capabilities of the Lebanese armed forces will not strike fear into anyone, their use in war would represent a quantitative increase in Lebanon’s capability to make things difficult for Israel if any attack on Iranian nuke sites would precipitate a conflict with Hezbollah.
In the end, the answer to the question of “Who Lost Lebanon?” has an easy answer; the Lebanese themselves. They were never able to overcome their differences to meet the twin challenges of Hezbollah’s guns and Syrian aggressiveness. For that, they will pay a heavy price when the next round begins between the terrorists and Israel.