Du « processus de paix » à la gestion de conflits et à la prévention des catastrophes ? 2è Partie
Marc Brzustowski, pour lessakele et aschkel.info
(Suite)
2) Le modèle unilatéral du Kosovo
Le Fatah est, de plus en plus, persuadé qu’il pourra échapper à une solution négociée pour imposer sa vision unilatérale, et même réclame, maintenant, des Américains, tellement attachés à la résolution du conflit, qu’ils négocient à sa place ! C’est, sûrement, du jamais vu, en matière d’autodétermination des peuples, que de se soulager de sa responsabilité sur le dos d’une superpuissance n’ayant que son influence, les pressions qu’elle exerce et aucune souveraineté de proximité à faire valoir. Mais les Palestiniens, enfin ceux du Fatah, ne sont pas complètement absurdes et puisent leur inspiration de ce qui s’est, néanmoins, déjà passé, entre le Kosovo et la Serbie, en février 2008, lors de la déclaration unilatérale de l’indépendance de celui-ci, reconnue par l’Europe et les Etats-Unis. Depuis, ils n’en démordent pas : ils « méritent » au moins, la même reconnaissance du fait accompli que les Kosovars ! Si les experts en droit international que sont le Professeur Ruth Lapidot et le Professeur Irwin Cotler, ancien Ministre de la Justice canadienne, démentent formellement toute forme de similarité juridique entre les deux situations, les dirigeants du Fatah s’accrochent, par diverses tentatives, à cet horizon fragile, en se refusant à tout échange de vue avec le Premier Ministre de l’Etat Juif, Benyamin Netanyahou. Ainsi, cette stratégie ou ce modèle s’est imposé, avant même la conférence d’Annapolis, qui s’est soldée par un échec avec le précédent gouvernement Olmert-Livni-Barak, alors même que les acteurs palestiniens eux-mêmes, reconnaissent que jamais autant de concessions ne leur avaient été présentées par la partie israélienne. L’analyse du processus sur le moyen terme permet d’affirmer que la question n’est pas tant la personnalité ou la politique menée par l’actuel Premier Ministre, Netanyahou, qui serait à l’origine des blocages palestiniens, parce que celui-ci se garderait d’honorer des promesses faites antérieurement. Mais bien que les Palestiniens n’étaient, de toutes les façons, pas disposés à aller plus loin dans un dispositif de négociation. Le Gel du développement des implantations, s’étalant sur dix mois, est une nouvelle tentative de trouver un point de réinitialisation. Sans succès.
Entretemps, et toujours à l’encontre du gouvernement de négociation Olmert-Livni-Barak, on se souvient que l’Autorité Palestinienne avait appuyé, en sous-main, l’action de représailles contre les tirs de roquettes depuis Gaza. Réaction israélienne qui affaiblissait considérablement le pouvoir de nuisance du Hamas, y compris en Cisjordanie/Judée-Samarie, donc au profit de cette même AP. Dès les hostilités levées, le Ministre de la Justice palestinien, Ali Khashan est à l’origine de demandes répétées auprès de la Cour Internationale de la Haye que celle-ci condamne Israël pour « génocide », de la même façon que Karadzic s’est retrouvé arrêté et inculpé, là, sur des faits avérés, comme à Srebrenica ou ailleurs.
Lorsqu’on s’applique à distordre les faits au nom d’un cadre théorique préétabli, à tordre la réalité pour qu’elle se conforme point par point au modèle qu’on imite, cela donne l’intensité de la diabolisation à laquelle on a assisté dans les rues d’Europe ou d’ailleurs, pendant et après « Plomb Durci ». Et cela se poursuit dans les intentions mêmes de la Commission Goldstone, commanditée par la Commission des Droits de l’Homme de l’ONU, mais où, encore, les dirigeants de l’Autorité Palestinienne ont eu un rôle déclencheur et conducteur, afin de parvenir à leur travestissement de l’armée d’Israël en milices serbes de Karadzic et Milosevic. De même que ce sont des organisations palestiniennes qui portent plainte à tous les aéroports des pays porteurs de la « compétence universelle » (Grande-Bretagne, Espagne, Belgique…), dès que le moindre responsable israélien Tsipi Livni, Barak…) est censé monter dans un avion.
Pour des clans et des pouvoirs, surtout, qui se haïssent mortellement, on peut parler de complémentarité objective des rôles : l’un le Hamas se chargeant de « la lutte armée », et l’autre transférant son agressivité et son terrorisme intellectuel dans les manœuvres judiciaires en vue de gains diplomatiques.
Cette guerre à prolongations pénales, Israël semble avoir mis du temps à la comprendre et encore plus à y répondre, pièce par pièce… à conviction. Même si elle n’a que très peu de chance de déboucher sur une quelconque procédure concrète, elle n’en empoisonne pas moins tout dispositif d’ouverture à la « négociation ».Elle a, justement, pour but de saboter le soi-disant « processus de paix », pour un bénéfice jugé plus grand, en cas ou après une éventuelle victoire sur le plan d’une Justice Internationale politisée, détournée et mise à contre-emploi : déclarer l’un des protagonistes « coupable » et donc illégitime et, de ce fait, accorder des « dommages et intérêts » territoriaux et politiques à celui considéré comme étant sa « victime » historique.
Etant données les capacités des institutions judiciaires israéliennes à répondre point par point aux interrogations d’une quelconque entité de Justice extérieure, et à invalider la démarche, ce rêve procédurier de l’Autorité Palestinienne, se terminera, vraisemblablement, en fiasco.
Reste alors à s’accrocher mordicus à la certitude que la lassitude des Américains, ou les besoins, tout bêtement, électoraux, d’un Obama pressé d’obtenir, au moins, un résultat sur l’un de ses « dadas » de campagne, finissent par le contraindre à une manœuvre inconsidérée : croire pouvoir déposséder Israël de sa souveraineté et de son contrôle sécuritaire sur les « zones C », en violation des précédents accords, par exemple, pour approuver un Etat palestinien autoproclamé sur toutes les terres qu’il revendique. A l’exception, sans doute de toutes les zones qu’Israël défendrait, comme les implantations, la vallée du Jourdain, Jérusalem… En termes de politique intérieure, un acte considéré comme dictatorial à l’encontre d’Israël, allant très au-delà des pressions, ne serait sans doute pas approuvé par le Congrès ni le Sénat, où les Démocrates ont déjà perdu ou risquent prochainement de perdre la majorité absolue. Ce pari palestinien est plus que présomptueux, à l’égard d’un pays où Israël compte toujours pas mal d’amis.
Il est peu probable qu’au-delà de recommandations non-contraignantes, le droit international se renie lui-même et désavoue les résolutions 242, 338, Oslo, la « carte routière », Annapolis... Ceci, juste pour imposer une « solution » à des adversaires qui se tournent le dos, par le refus de la négociation de l’un d’entre eux.
En attendant ce jour « béni » pour le directoire de Ramallah, et quoi qu’il tente de même acabit, les ouvriers palestiniens sont toujours contraints à travailler moins, à cause du chômage forcé dans les implantations. Malgré l’absence d’institutions fiables et démocratiques, l’économie de ce territoire suit son cours, des accords de coopération sécuritaire subsiste pour régir les différentes catégories de zones, la police du Fatah opère le jour et parfois, la nuit, quitte à arrêter, puis relâcher quelque affilié du Hamas ou du Jihad considéré, momentanément, nuisible ou dangereux pour lui-même plus que pour Israël. Les unités spéciales israéliennes se chargent du reste, du « gros œuvre ». Certaines filières de « brigades des Martyrs d’al Aqsa » ont repris la « lutte armée », mais les opérations qu’ils mènent sont vite découvertes et réprimées. Restent les tactiques réputées « non-violentes » en proximité de la barrière de sécurité.
Le Hamas, de son côté, n’est jamais en reste, ayant terriblement fait monter les enchères à propos du seul otage, le caporal franco-israélien Guilad Shalit, qu’il détient. Mais il s’est vu opposer des répliques cinglantes, de la part de Benyamin Netanyahou, qui a coupé net à l’inflation des exigences. Puis, surtout, de la part de l’Egypte, que le Hamas a écarté des négociations indirectes au profit d’un médiateur allemand. Si ce n’en est pas la raison principale, la tension n’a cessé de monter entre le régime de Moubarak et les islamistes de Gaza, avec l’édification du « mur d’acier » à leur frontière, qui met à mal le commerce illégal fructueux des clans, par les tunnels, et semble refermer le couvercle des pressions égyptiennes en vue d’une réconciliation contrainte et forcée avec le Fatah. Les perspectives s’amenuisent, d’autant qu’Israël vient d’annoncer la mise en service prochaine (entre 6 mois à 2 ans) de son système anti-missiles « Kipat Barzel » (dôme de fer) qui rendra quasi-invulnérables les zones civiles menacées par ces mouvements, au nord (Hezbollah) comme au Sud (Hamas, Jihad islamique, ou actuellement, prétendants à l’allégeance à al Qaeda).
Il ne peut y avoir de « risque zéro », on le voit encore par l’imminence se rapprochant du péril nucléaire iranien. Celui-ci dépend encore trop des décisions de sanctions économiques que tout le monde dit vouloir imposer à l’Iran, sans jamais trouver d’accord pour les rendre aussi étanches et massives que souhaitées, afin de provoquer le « déclic » qui ralentirait, gèlerait, ou ferait dérailler ce processus délétère. En proximité immédiate, du moins, la menace directe, sans être écartée, va continuer sérieusement de s’amoindrir. Cela ne garantit aucunement une paix toujours aussi improbable. A contrario, force est de constater que les efforts mis en œuvre en matière de savoir-faire technologique, sécuritaire ou sanitaire (sécurité civile, dispositifs de masques à gaz, ou de piqûres contre toutes sortes de retombées mortelles, réactivité de différents services…) cernent, au plus près, les différentes formes de menace, au point de rendre fou l’apprenti-destructeur qui s’y aventurerait. Ainsi, pour autant qu’un Mollah, Guide Suprême, ou Président-leader des guildes pasdaran et bassidjies se prenait de l’envie d’appuyer sur le bouton rouge, la réplique de style « opération Samson » serait immédiate, par la voie des mers (Dolphins) ou/et des airs (système anti-missiles Hetz, missiles Jéricho, aviation…). La possibilité d’une paix n’est envisageable qu’à la condition qu’un tel processus de menace globale s’interrompe et que de tels démiurges et apprentis-sorciers soient rapidement ramenés à la raison, dans l’intérêt de la région et très au-delà d’elle, vers l’Europe du Sud et, même, les Etats-Unis.