Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
25 juillet 2010 7 25 /07 /juillet /2010 22:30

 

Je vous propose cette analyse de Daniel Claivaux

son site Daniel Clairvaux

 

La trahison des clercs - les intellectuels se sont toujours trompés de camp

 

Les raisons de cet aveuglement : Benda, Camus et Orwell


Dans La trahison des clercs (1927), Julien Benda avait dénoncé l'abandon des valeurs universelles humanistes, héritées des Grecs, au profit de l'engagement partial et contingent : "Les hommes dont la fonction est de défendre les valeurs éternelles et désintéressées, comme la justice et la raison, que j'appelle les clercs, ont trahi cette fonction au profit d'intérêts pratiques."

 

Benda l'explique par le refus de reconnaître une nature humaine, une raison universelle propre à l'espèce humaine, au profit du particulier, du contingent, bref la faillite de l'hellénisme. C'est au nom de cette raison universelle, héritière de la conception humaniste, que Rabelais et Montaigne ont pu prêcher la tolérance, Voltaire défendre Calas, et Zola Dreyfus.

 

Sartre, au nom de la théorie de l'engagement idéologique, a ouvert une brèche dans l'universalisme des valeurs, au profit d'intérêts pratiques, en adoptant une posture politique contingente. Ce qui nous a valu les erreurs répétées et manifestes de ces intellectuels, exaltant, au mépris de la vérité et de la raison, et par haine du capitalisme américain, les dictatures nées dans et hors de l'Union Soviétique, considérée comme la "Jérusalem céleste " du socialisme.

 

On applaudit aux pires totalitarismes engendrés par l'hydre communiste, aux pires crimes contre l'humanité, on porta aux nues le régime castriste, la "Révolution culturelle" de Mao, la soi-disant libération de Saïgon par les Kmers rouges, Khomeiny magnifié comme un  disciple de Gandhi. La liste de ces erreurs est tellement longue qu'elle en devient fastidieuse. A aucun moment, ces intellectuels, anciens trotskystes, maoïstes, dont certains ont aujourd'hui pignon sur rue dans les domaines de la culture et de la politique, n'ont fait  la moindre amende honorable.

 

Dans la querelle qui oppose Camus à Sartre lors de la publication de L'Homme révolté, Camus fustige ces intellectuels "qui n'ont jamais placé que leur fauteuil dans le sens de l'Histoire." Il met l'accent sur ces "intellectuels bourgeois qui veulent expier leur origine, fût-ce au prix de la contradiction et d'une violence faite à leur intelligence." (Les Temps modernes, n°82, août 1952 in Denis Bertholet, Sartre, Editions Perrin, 2005, collection tempus, p. 355)

A travers cette critique, c'est Sartre qui est visé, Sartre qui par haine de sa classe d'origine a abdiqué sa liberté (et la nature humaine) pour "liquider" en lui toute trace de "bourgeois" et adorer sans contrainte la philosophie "clés en mains" du matérialisme historique. Ce que Aron a appelé "le passage de la conscience libre à la servitude volontaire." (R. Aron, Mémoires, in D. Bertholet, p. 410)

 

Quant à George Orwell, il méprise ces intellectuels "de salon" comme Sartre qu'il traite de "baudruche." Il n'explique leur engagement auprès de la classe ouvrière que comme le résultat d'une frustration de classe et le fait d'être méprisés par la société marchande capitaliste. Ces intellectuels kidnappent le socialisme aux prolétaires uniquement par posture d'opposants idéologiques (voir Benda) et par appétit de pouvoir.

Pour Orwell, la "gauche morale", pétrie d'auto-satisfaction, prépare le lit du totalitarisme : "Les intellectuels sont portés au totalitarisme bien plus que les gens ordinaires." Pour le moment, l'Histoire a ratifié ce constat.

 

En quoi, du point de vue moral, leurs prises de position sont-elles moins ignobles que celles d'un Brasillach, durant la guerre, dans Je suis partout ? Pour moi, du point de vue des valeurs, elles le sont tout autant . Je dirai, en utilisant une expression sartrienne, que ce furent des salauds, je les nommerai donc des "Brasillach de gauche."

 

Le pli étant pris, beaucoup d'intellectuels ont mélangé politique et histoire dans un brouet infect où l'anachronisme, les raisonnements analogiques superficiels tiennent lieu d'analyse. Comme le dit Benda, ils ont introduit à l'intérieur de la vision des événements, comme un ver qui le ronge, leurs propres passions et préjugés : "Ils sont des hommes politiques qui se servent de l'histoire pour fortifier une cause dont ils veulent le triomphe." Et à partir de là, ils adoptent une posture politique leur permettant d'asseoir leur image d'opposant ou de faire fructifier leurs notoriété et intérêts personnels.

 

Privilégiant l'attachement au particulier et méprisant l'universalisme des valeurs, les intellectuels, combattant dans des polémiques stériles qui ont remplacé le débat d'idées, ne se soucient plus de l'objectivité et de la vérité. Ne les intéressent plus que la passion politique, le désir de vaincre dans la controverse, avec toutes les armes disponibles, fussent-elles les plus viles : le mensonge, la diffamation et la diabolisation de l'interlocuteur devenu un adversaire à abattre, à déconsidérer.

Où Aron, en sociologue et historien, cherchait le Vrai, Sartre, en moraliste, s'attachait à sa conception du Bien.

 

Finkielkraut, le bouc émissaire idéal

 

Dans cette époque qui refuse de transmettre la culture au prétexte fallacieux que tout le monde n'y a pas accès, Finkielkraut, le philosophe critique de la "modernité", apparaît comme le bouc émissaire rêvé. Il dérange, car il est un des rares  héritiers, dans cette société déboussolée, de l'universalisme des Lumières croyant aux bienfaits de la culture qui élève et unifie.

 

Comme on a du mal à le réfuter sur le plan des idées, vu sa culture et ses argumentaires, on pratique l'injure, l'attaque ad hominem pour le déconsidérer, le diaboliser, suivant l'ultime stratagème développé par Schopenhauer dans L'art d'avoir toujours raison : l'important n'est pas de convaincre du point de vue rationnel, mais de mettre l'adversaire à terre par tous moyens : "Si l'on s'aperçoit que l'adversaire est supérieur et que l'on ne va pas gagner, il faut tenir des propos désobligeants, blessants et grossiers. Etre désobligeant, cela consiste à quitter l'objet de la querelle (puisqu'on a perdu la partie) pour passer à l'adversaire, et à l'attaquer d'une manière ou d'une autre dans ce qu'il est."

 

Finkielkraut de par sa supériorité intellectuelle (juive) incontestable, est cloué au pilori par des nains rancuniers, tantôt comme réactionnaire, tantôt comme raciste, au bout du compte comme juif et sioniste.

 

Il suffit d'utiliser, à défaut de débat véritable, la nitroglycérine du manichéisme de base propre au totalitarisme intellectuel, si bien défini par Sartre : "Quand l'ennemi est séparé de vous  par une barrière de feu, vous devez le juger en bloc comme une incarnation du mal : toute guerre est un manichéisme." (Sartre, Situations II, 1948, p. 121)

 

Sa défense de la République laïque fondée sur la seule appartenance citoyenne, fait grincer des dents parmi les tenants du multiculturalisme, projet idéologique construit contre la France coloniale, qui veulent promouvoir, par revanche, le relativisme culturel et l'éclatement d'une société  en puzzle de ghettos.

 

Le communautarisme, idéologie de substitution à la faillite du communisme

Certains intellectuels critiquent comme une position conservatrice dépassée la conception républicaine "une et indivisible" de Finkielkraut. Le philosophe, depuis La défaite de la pensée (1987), s'échine à défendre  la citoyenneté française héritière du Contrat social de Rousseau selon lequel le citoyen "exprime non pas son intérêt individuel mais l'intérêt général. Cet intérêt général ne se résume pas à la somme des volontés particulières, mais la dépasse."

 

S'agissant des juifs, le comte de Clermont-Tonnerre, député à l'Assemblée Constituante, déclare le 23 décembre 1789 : "Il faut tout refuser aux juifs comme nation, et accorder tout aux juifs comme individus. Il faut qu'ils ne fassent dans l'Etat ni un corps politique ni un ordre ; il faut qu'ils soient individuellement citoyens." Ce discours célèbre établit les fondations de la citoyenneté française qui implique, au-delà des droits civils et politiques, l'adhésion à des valeurs communes, et la reconnaisance de l'intérêt général au détriment des particularismes et des égoïsmes.

La citoyenneté française est, à la fois centrée sur des valeurs culturelles partagées qui forme le ciment social, "l'âme de la Nation" pour parler comme Renan, et aussi sur l'héritage des Lumières, les droits de l'homme ayant valeur universelle. On ne voit pas pourquoi alors Michel Wieviorka s'obstine à considérer Finkielkraut comme un "républicano-communautariste". Dans ses fondements, la république française combat le communautarisme sous toutes ses formes.

 

Le communautarisme confère aux valeurs de la minorité (ethnique, religieuse, culturelle ou politique) une importance supérieure à celle de l'individu se référant à des valeurs issues du souverain, c'est-à-dire selon Rousseau, de "la volonté de tous", "la règle suprême." Il signifie que le groupe désire s'arroger des privilèges spécifiques, dérogatoires au droit commun, au seul prétexte qu'il est ce groupe particulier. Dans le corps social, les revendications des diverses communautés peuvent s'avérer non seulement en compétition avec la règle commune, mais aussi entre elles, ce qui est source de tensions.

Par ailleurs, certaines communautés placent l'appartenance à la religion et la loi divine comme supérieures à la loi civile, ce qui pose un problème quasi insoluble dans une société laïque. En France, le citoyen se proclame d'abord "français" et, ensuite, catholique, athée ou musulman.

La menace sur la cohésion sociale est évidente, sans compter les risques de confrontations identitaires, voire mémorielles.

 

En outre, des communautés issues de l'immigration, soutenues par des organisations antiracistes et des intellectuels, prennent prétexte du passé colonial de la France pour exiger une dérogation aux règles communes : elles estiment, qu'en fonction de leur histoire d'anciens "colonisés", la France afin d'expier doit leur reconnaître des droits spécifiques. Si elles ne les obtiennent pas, elles clament qu'elles font l'objet d'une nouvelle colonisation : c'est le point de vue des "Indigènes de la République." Afin de faire aboutir leurs revendications, elles n'hésitent pas à culpabliser les politiques, réveillant les haines et les rancoeurs.

 

Ces minorités sont soutenues par des intellectuels qui considèrent que la France doit faire repentance pour expier son passé colonial et réduire ainsi le rapport réactivé de "colonisé" à "colonisateur." Chacun l'aura compris, il s'agit d'une escroquerie intellectuelle, basée sur de fausses analogies et l'anachronisme historique qui consiste à juger les événements du passé en fonction de la grillle de valeurs du moment.

 

C'est une des constantes du totalitarisme de vouloir sans cesse juger le passé afin de promouvoir un improbable "Homme Nouveau." Dans 1984, Orwell a parfaitement montré que, toute trace du passé étant systématiquement détruite, ou ce passé ayant été recomposé selon le souci de la propagande du moment, le grand décervelage des masses peut commencer.

 

S'étant enrôlés sous la bannière du diable nihiliste,  des intellectuels pratiquent dans leurs officines,  sans sourciller,  la "messe noire" de l'inversion des valeurs.

 

Ainsi, pour ces historiens adeptes de la repentance (Olivier Le Cour Grandmaison), la colonisation de l'Algérie n'est rien d'autre que la préfiguration de la Shoah, un génocide programmé, alors que ce ne fut qu'une guerre de conquête semblable à beaucoup d'autres. Déjà, un autre historien avait établi un parallèle entre Napoléon et Hitler ! Aujourd'hui, le moindre crime d'une certaine ampleur est assimilé à un "crime contre l'humanité."

Chacun instrumentalise à sa guise l'Histoire, pratiquant  des analogies erronées, dans le seul but de sortir vainqueur d'une polémique nauséabonde. Comme l'avait souligné Benda,  l'historien "présente le passé du point de vue des passions de son temps." Cédant au subjectivisme, il devient un politicien.

 

Un historien comme Pascal Blanchard, spécialiste de la France coloniale,  considère que les problèmes de la France contemporaine (surtout ceux des banlieues) ne peuvent être résolus, "faute d'une grille de lecture postcoloniale." Idée contre laquelle s'insurge  le géographe Yves Lacoste, fondateur et directeur de la revue de géopolitique Hérodote : "Le discours qui continue de référer d'ex-sociétés colonisées à leur ancien statut est aussi méprisant que scandaleux. Dans le fond, des intellectuels comme Pascal Blanchard sont assez indifférents au sort des ex-pays colonisés. Ce qui les motive, ce sont moins les iniquités de la colonisation ou de rendre justice aux ex-colonisés que de se placer dans la lignée des anticolonialistes d'autrefois." Et par quelles méthodes ? Par l'anachronisme et l'amalgame, vieilles méthodes du totalitarisme intellectuel.

En 2006, Daniel Lefeuvre, l'historien de L'Algérie coloniale et président de l'association Etudes coloniales, a fustigé ces groupes de pression vindicatifs comme "les Indigènes de la République" qui, au nom de la "repentance", veulent transposer dans la société française contemporaine la "fracture coloniale" entre "colonisateurs" et "colonisés."  Il déclare avec raison : "Ni juges, ni même juges d'instruction, [les historiens] ne sont pas là pour instruire le procès du passé et des acteurs de ce passéfût-il le passé colonial. Ils sont là pour l'étudier, [...] pour le connaître et le comprendre." (Alain Léauthier et Alexis Lacroix, "France-Afrique : 50 ans après la décolonisation. Quelles mémoires  ?", Marianne, N° 691, 17 juilet 2010)

 

Ces intellectuels dévoyés, ces "Brasillach de gauche" n'ont pas de leçons à donner. Ils se permettent sans cesse de traduire les générations précédentes au tribunal de l'Inquisition pour des procès staliniens où ils sont uniquement procureurs. Ils se permettent de statuer sur les faits du passé à l'aune de leurs passions politiques. Pour ce faire, ils manient l'anachronisme, ce qui est une hérésie en matière d'objectivité.

N'oublions pas qu'ils se sont toujours trompés, qu'ils ont soutenus ad nauseam les pires régimes totalitaires par "lâcheté et aveuglement", comme l'a souligné Pierre Nora. A leur tour, ils seront jugés avec la même objectivité. Ils instrumentalisent l'Histoire pour dire le Bien (Sartre) et non le Vrai (Aron) en jugeant afin de faire prospérer leurs fumeuses théories politiques.

 

Ce qu'ils veulent, c'est détruire le modèle républicain français, laïque et universaliste,  afin de promouvoir le communautarisme qui est devenu leur nouveau cheval de bataille et leur "horizon indépassable." Ils voient dans le communautarisme reconnu la revanche des faibles, des peuples exploités sur les anciennes puissances impérialistes.

 

Ces intellectuels voient dans le succès du communautarisme le levier permettant de rendre crédible leur idéologie de substitution à la faillite du communisme.

 

D. CLAIRVAUX

Partager cet article
Repost0

commentaires

Traducteur/translator

 

 

France  ISREAL  English

Recherche

logo-lien-aschkel-copie-1.jpg

 

France  ISREAL  English
Traduire la page:
By
retour à l'acueil

------------------------------------- 

 

Communication and Information

 

Vous souhaitez 

- proposer un article ?
 - communiquer une info ?

Contactez la rédaction

bOITE-a-mail.jpg

-------------------------------

 

Nous remercions par avance tous ceux

qui soutiendront le site Aschkel.info

par un don

icone paypal

Paiement sécurisé


Consultez les dossiers

Archives

Mon livre d'or

 

 Livre_dor

 


 

Visites depuis la création du site


visitors counter

Catégories