M. LE PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE
Palais de l'Élysée -- Lundi 27 septembre 2010
LE PRESIDENT
Mesdames et Messieurs,
Je voudrais souhaiter la bienvenue au Président ABBAS qui nous fait une nouvelle fois l'honneur de sa présence au retour de son séjour à New York. Sa visite est particulièrement importante aujourd'hui car chacun sait que nous sommes à un moment absolument crucial, quelques semaines après la reprise des négociations directes.
J'ai fait part au Président ABBAS de notre total soutien à son approche, qui est une approche modérée fondée sur la négociation et la recherche d'une solution pacifique. La France soutient le Président ABBAS parce qu'il n'y a pas d'autre alternative.
J'ai naturellement fait part à Mahmoud ABBAS de mon inquiétude de voir le processus lancé le 2 septembre. -processus que la France a pleinement soutenu- risquer de s'interrompre si nous ne nous mobilisons pas dès maintenant. Naturellement nous avons regretté que les appels unanimes afin de prolonger le moratoire israélien sur la colonisation n'aient pas été entendus. Je le déplore. Ce gel existait depuis huit mois, il fallait le maintenir pour donner toutes ses chances à la négociation. Je le dis devant le Président Mahmoud ABBAS, la colonisation doit cesser.
Le Président ABBAS va avoir des consultations au sein de l'OLP ainsi qu'avec les Etats arabes. Nous devons tous évaluer ce nouveau développement et ses conséquences. Ce que je constate, c'est que depuis la conférence d'Annapolis, il y a trois ans, le processus de paix n'a connu aucun développement significatif. Nous avons donc évoqué avec le Président Mahmoud ABBAS la question de la méthode suivie jusqu'à présent qui ne semble plus produire les résultats escomptés.
Nous alternons entre des phases de blocage et des tentatives de reprise. Il ne s'agit nullement de critiquer qui que ce soit. Je veux d'ailleurs rendre hommage aux efforts considérables du Président OBAMA pour relancer le processus. Mais j'observe que dix ans après Camp David, nous n'avons pas progressé et peut-être même reculé dans la reprise du dialogue.
Qui profite de ce sur-place ? Les mouvements radicaux, les mouvements violents qui font leur lit de l'incapacité de la communauté internationale à régler ce conflit. J'ai déjà appelé à plusieurs reprises la nécessité de mieux associer l'ensemble des acteurs à la recherche d'une solution. Le quartet et ses membres doivent collectivement et concrètement exercer le rôle de supervision qui est le leur. L'Europe, premier donateur en faveur des Palestiniens, l'Union pour la Méditerranée qui est affectée par ce conflit, doivent, c'est une exigence, désormais participer au processus politique.
Je souhaite donc mettre à profit les prochains jours pour m'entretenir de ce sujet central de la méthode de négociation avec les parties, les membres du quartet, nos partenaires de l'Union pour la Méditerranée et nos partenaires de l'Union européenne. J'aurai dès ce soir au téléphone le Premier ministre NETANYAHOU.
Il faut tirer les enseignements des efforts précédents, relancer efficacement une négociation solide. Le Président Mahmoud ABBAS et moi, nous pensons ensemble qu'il manque cruellement un mécanisme d'accompagnement à la négociation. Nous en avons parlé tous les deux. Nous ferons des propositions ensemble pour donner des garanties à ces discussions.
Par ailleurs, nous avons décidé de préparer au mieux le Sommet de l'UpM de fin novembre dont nous disons avec le Président Mahmoud ABBAS qu'il doit avoir lieu quoi qu'il arrive. Sur ce sujet nous prendrons des initiatives et je puis vous dire qu'ont accepté de se rendre à Paris dans le courant du mois d'octobre le Président Mahmoud ABBAS et le Premier ministre NETANYAHOU, avec l'autre Président de l'UpM, Hosni MOUBARAK.
Cette rencontre se tiendra avant la fin du mois d'octobre pour préparer le Sommet de l'UpM de fin novembre. D'ici là la France appelle chacun à faire preuve de responsabilité, à s'abstenir de gestes ou de décisions qui limiteraient davantage les chances de maintenir le processus de négociation. Je sais que c'est l'intention de Monsieur ABBAS. J'ai vu, dans le même sens, les déclarations de Monsieur NETANYHAOU appelant à limiter la reprise des constructions, elles vont dans le bon sens même si elles ne suffisent pas. C'est dans ces moments difficiles, où chacun doit avoir la préoccupation de sauver le processus de paix, que la France et le Président Mahmoud ABBAS sont décidés à prendre des initiatives.
Je vous remercie.
M. MAHMOUD ABBAS -- Merci Monsieur le Président. Je voudrais pour ma part soutenir chaque mot dit par le Président SARKOZY dans cette déclaration préliminaire. Nous sommes tout à fait d'accord avec ce qui a été mentionné dans la déclaration du Président. Et, je le dis, nous sommes toujours d'accord avec le Président, depuis que nous avons fait sa connaissance, il n'y a jamais eu de désaccord, au contraire, nous allons toujours dans la même direction, sur la même ligne et avons une seule et même politique. Car nous savons très bien quelle est la politique française. La politique française, en résumé, essaye toujours de parvenir à une paix juste au Moyen-Orient qui donnerait aux Palestiniens leurs droits et qui permettrait l'établissement d'un Etat palestinien indépendant. Et sur cette base, la France a toujours eu une position pilote dans le soutien économique, financier, politique et autre pour aider à établir l'Etat palestinien indépendant.
Nous disons en résumé : nous voulons la France et les parties mentionnées par la France, non pas seulement comme force de soutien pour aller de l'avant, mais comme des acteurs de ce processus politique. Ces pays ne sont pas là uniquement pour financer mais ils ressentent les répercussions de la guerre et de la paix de façon négative et de façon positive selon ce qui se passe sur le terrain. Donc, ces pays doivent avoir un rôle, et un rôle efficace.
Aujourd'hui, j'ai passé en revue avec le Président SARKOZY tout ce qui s'est passé dans le mois écoulé et les négociations que nous avons eues, que ce soit à Washington, à Charm el-Cheikh, ou au Caire ; et également les horizons qui s'ouvrent à nous et ce que nous voulons faire, ce à quoi nous voulons parvenir. Nous sommes d'accord pour dire que la colonisation doit s'arrêter et Monsieur NATANYAHOU, qui a accordé un moratoire de dix mois alors qu'il n'y avait pas de négociation, devrait prolonger ce moratoire de trois ou quatre mois alors que les négociations sont en cours, pour faciliter le processus, pour que nous puissions aller de façon approfondie dans les points qui sont sur la table. Et donc il n'y a absolument aucun désaccord entre la France et nous à ce sujet. Nous sommes tout à fait d'accord au contraire. Bien évidemment, nous, Palestiniens, allons d'abord en référer à nos dirigeants avant de prendre notre décision. (NDRL ??? La Ligue Arabe ??? )Nous n'allons pas avoir de réaction rapide maintenant pour dire « non » ou « oui », nous voulons ou « nous ne voulons pas ». Nous devons étudier toutes les répercussions, toutes les conséquences de façons concrètes, de façon attentive avec la direction palestinienne et également avec les pays arabes. Nous sommes convenus avec les pays arabes à New York, lors de ma rencontre avec les ministres des Affaires étrangères, que le comité arabe de suivi tiendrait une réunion le 4 octobre, c'est-à-dire après toutes ces réunions. Nous pourrons faire part de notre position pour éclaircir quelle est l'opinion palestinienne et l'opinion arabe à ce sujet après qu'Israël a refusé jusqu'à maintenant de continuer à geler la colonisation.
Il y a une idée que le Président a lancée et que nous soutenons également avec lui, c'est qu'il faut absolument qu'il y ait des consultations et une concertation avec les parties concernées afin de créer un mécanisme, quelque chose pour appuyer le processus de paix. Nous allons commencer à en discuter dès maintenant et cela vient d'ailleurs compléter la rencontre d'octobre dont le Président SARKOZY a parlé à laquelle nous serons très heureux de participer. Et nous espérons que nous aurons une participation active au sommet de l'UpM. Nous sommes tout à fait d'accord sur ces mesures et ces initiatives.
Nous avons également abordé la relation bilatérale entre la France et l'Autorité nationale palestinienne. Nous aimerions remercier le Président SARKOZY pour avoir relevé le niveau de la représentation palestinienne à Paris. Bien évidemment, nous avons pour ambition d'avoir plus que cela, nous voulons une coopération, un véritable partenariat avec nos amis français. Nous avons ressenti une position favorable de la part du Président. Nous allons aller de l'avant dans cette direction. Nous sommes tout à fait d'accord. Merci pour votre accueil Monsieur le Président.
LE PRESIDENT -- Merci Monsieur le Président.
QUESTION -- Monsieur le Président, est-ce que vous pensez vraiment que c'est une question de méthode ou que c'est une question d'incapacité des grands leaders à faire pression sur la politique israélienne ?
M. MAHMOUD ABBAS -- Nous supposons qu'il y a de bonnes intentions et qu'il y a un véritable désir. Nous supposons que tout le monde veut la paix, nous supposons que tout le monde travaille pour la paix mais il y a des possibilités et il y a des obstacles qui entravent telle ou telle partie. Mais malgré cela, nous sommes tout à fait déterminés à poursuivre car il y a eu un changement dans la politique américaine et je voudrais dire quel est ce changement : le Président américain et l'administration américaine considèrent désormais que la solution de deux Etats a un intérêt vital, national américain. Donc ce n'est plus uniquement une preuve de bonne volonté ou un luxe pour le processus de paix. Il y a maintenant un engagement. Il reste à ce que ces forces se mettent en marche. C'est pour cela que nous avons dit qu'il faut absolument élargir la base de la participation. Nous avons parlé de cette vision et c'est pour cela que nous avons parlé de la nécessité de créer un mécanisme, quelque chose pour accompagner ce processus et que ce mécanisme soit constitué des parties qui souffrent de l'absence de paix, qui veulent aider à faire la paix et qui ont un véritable désir. On ne peut pas dire : celui-ci veut faire la paix ou ne le veut pas ! Non, l'important c'est de poursuivre le processus. Nous ne devons pas préjuger, nous ne devons pas juger avant de parvenir à des résultats.
LE PRESIDENT -- Ecoutez, pour moi, bien sûr qu'il y a un problème de méthode. La preuve est simple à administrer. Depuis Annapolis, trois ans, il y a eu des gouvernements différents en Israël et pourtant la négociation n'a pas avancé. Si vous remontez à Camp David, dix ans, il y a eu encore plus de gouvernements différents en Israël et la négociation n'a pas avancé. ( NDRL Ces braves palestiniens ont du être tellement patients !!!)On voit bien donc bien qu'il y a un problème aujourd'hui de méthode. Derrière ce problème de méthode, il y a un problème de confiance. C'est la question qui se trouve posée : comment la communauté internationale peut-elle renforcer la confiance entre les deux acteurs de la paix que sont l'Autorité palestinienne, le Président Mahmoud ABBAS, un homme de paix et de dialogue, et le gouvernement israélien ? Comment créer les conditions de la confiance ? L'analyse de la France, c'est que l'ensemble des partisans de la paix, qui participent au financement pour les uns, qui sont membres du Conseil de Sécurité pour les autres, qui sont présidents de l'Union pour la Méditerranée pour les troisièmes, parfois les mêmes, doivent apporter cette confiance. Pour permettre quoi ? A chacun dans son propre pays de résister à la tentation de la violence et de la radicalité.
C'est bien cela qui est en cause, après que nous avons salué tous les deux l'engagement du Président OBAMA et de l'administration américaine au service de la paix. Mais est-ce que l'on sera plus fort s'il y a toute la communauté internationale ou s'il n'y a qu'un seul pays ? La question mérite quand même d'être posée. Poser cette question, ce n'est faire offense à personne. Pourquoi ? Parce que, comme l'a très bien dit le Président Mahmoud ABBAS, les conséquences du conflit entre les Palestiniens et les Israéliens concernent beaucoup de pays dans le monde et pas simplement -même s'ils sont au premier rang- les Israéliens et les Palestiniens.
Enfin quant à la France, dont vous savez très bien que nous sommes très engagés, -je l'avais dit lors de notre première rencontre au Président Mahmoud ABBAS- sur la sécurité d'Israël, nous disons à Israël que la meilleure garantie de la sécurité d'Israël, c'est d'avoir un Etat palestinien moderne, viable, démocratique dans des frontières reconnues. Nous ne voulons pas simplement être des spectateurs qui regardent le temps passer et grossir les extrémismes, qui se nourrissent dans toutes les sociétés de cet immobilisme. C'est pourquoi nous avons décidé de prendre des initiatives et nous sommes dans notre rôle. Qu'est-ce que l'on risque ? Simplement que cela réussisse.
QUESTION - Vous avez dit que l'Union européenne était le premier contributeur à l'Autorité palestinienne. Sans un mécanisme d'accompagnement que vous appelez de vos vœux, est-ce que la participation française ou européenne pourrait être remise en cause ? Et deuxième, petite question, vous avez depuis que vous êtes élu, depuis 2007, multiplié quand même les gestes de bonne volonté et des gestes d'amitié à l'égard d'Israël ; est-ce que l'on pourrait avoir une petite idée sur votre état d'esprit aujourd'hui à l'égard de Benjamin NETANYAHOU ? On a dit, on a lu que vous étiez agacé, est-ce que c'est vrai ?
LE PRESIDENT - Vous savez, je ne pense pas que des questions aussi sérieuses et aussi anciennes se rapportent exclusivement à des problèmes personnels. J'ai dit ce que j'avais à dire au nom de la France sur la colonisation, dont j'aurais mille fois préféré qu'elle s'arrête. Je l'ai dit à M. NETANYAHOU comme je le dis au Président Mahmoud ABBAS. Et peut-être, si vous avez de la mémoire, ce dont je ne doute pas, vous vous souvenez que je l'ai dit à la Knesset, devant le parlement israélien, c'est une chose de le dire devant Mahmoud ABBAS, c'en est une autre de le dire à la Knesset. La France n'a pas changé de position.
Deuxième remarque, ce n'est pas viable de continuer -et nous sommes tout à fait d'accord le Président Mahmoud ABBAS et moi-même- pour l'Europe à financer tout en étant à côté d'un processus politique. C'est l'ensemble qui doit exister, je suis profondément européen et je souhaite que l'Europe se réapproprie des dossiers éminemment politiques comme celui-ci, c'est l'intérêt de nos amis, naturellement.
Troisième remarque, j'ai toujours pensé que la relation transatlantique était une relation essentielle pour l'Europe en général et pour la France en particulier, donc il n'y aura pas un mot de ma part de critique du Président OBAMA ou des Américains. Mais bien au contraire le processus qu'ils ont engagé à Washington sera renforcé si les autres acteurs le garantissent, le portent eux aussi avec leurs réseaux, avec leurs amitiés et c'est très exactement sur cette ligne que nous nous trouvons avec le Président Mahmoud ABBAS.
Et enfin dernier point, comment peut-on vouloir aider à la paix entre deux interlocuteurs et commencer par critiquer telle ou telle personne qui a ses propres problèmes ? M. NETANYAHOU est à la tête d'une coalition, ce n'est pas facile. J'ai dit ce que je pensais sur le fond, mais ce n'est pas facile. Essayons là aussi de créer les conditions de la confiance pour qu'il accepte d'aller un peu plus loin. Ce n'est pas facile pour le Président ABBAS, ce n'est pas facile pour le Premier ministre NETANYAHOU. D'ailleurs je ne connais pas un chef d'Etat pour qui ce soit facile. Créons les conditions de la confiance. La question n'est donc pas de se critiquer ou de se reprocher, c'est de créer les conditions de la confiance. Et pour cela je le pense, Palestiniens et Israéliens ont besoin de la communauté internationale.
QUESTION - Monsieur le Président SARKOZY, il est tout à fait clair que l'Occident sait très bien faire des montres mais ne respecte pas les délais, M. Mahmoud ABBAS attend depuis vingt ans aux portes de l'Occident pour que l'Etat palestinien soit établi. Quand l'Occident va-t-il respecter le temps dans ses engagements envers le Président palestinien ?
LE PRESIDENT - Vous trouvez donc que je ne vais pas assez vite. Rien que pour cela, Monsieur, vous êtes bienvenu en France. C'est la sixième ou septième fois que je rencontre le Président Mahmoud ABBAS, j'ai toujours eu le même discours avec lui et j'ai toujours pensé que les paramètres de la paix entre Israël et les Palestiniens étaient sur la table, que chacun les connaissaient, que ce n'était pas une question de temps, mais de volonté politique. Seulement, il ne suffit pas que je le dise pour que cela se fasse.
En revanche, le rôle de la France, c'est de pousser à ce que l'ensemble des acteurs s'engagent totalement dans la négociation et permettre aux Palestiniens d'avoir enfin cet Etat que nous appelons de nos vœux et qui est l'intérêt de tout le monde. Personne ne peut en douter une seule seconde.
Je veux d'ailleurs remercier le Président Mahmoud ABBAS d'avoir pris le temps de rencontrer hier un certain nombre de personnalités de la communauté juive de France. Ce soir, le Président du CRIF. Il le fait parce lors de son dernier voyage, je le lui avais demandé. Et je voudrais d'ailleurs dire que j'ai beaucoup apprécié les déclarations de Richard PRASQUIER, qui a fait des déclarations à la hauteur de l'évènement, en précisant qu'il admirait la ténacité au service de la paix du Président Mahmoud ABBAS. Voilà et je peux vous dire que la prochaine fois qu'il reviendra, il y aura une rencontre encore plus large. Parce qu'à un moment donné, il faut que tout le monde s'y mette, les chefs d'Etats, les chefs de gouvernement, les sociétés civiles, pour arriver à ce que nous souhaitons : des Palestiniens qui vivent en paix à côté des Israéliens. Voilà ce que nous souhaitons.
QUESTION -- Monsieur le Président ABBAS, j'étais présente à cette réunion hier soir, lorsque vous vous êtes adressé à des personnalités de la communauté juive et je veux répéter à quel point votre discours de paix a touché tous les gens qui y assistaient. J'ai quand même perçu un très grand optimisme de votre part, quelque chose d'assez rassurant, comme si vous aviez le sentiment que même avec Monsieur NETANYAHOU, qui n'est pas votre ami et qui, au départ, a des positions très éloignées, vous alliez peut-être faire du chemin. Est-ce que je me trompe ? Deuxième question, vous avez parlé du Hamas et vous avez eu des phrases très fortes : « le Hamas, c'est la politique iranienne, avez-vous dit, ce n'est pas la politique des Palestiniens ». Mais le Hamas est en train d'évoluer. De quelle façon ? Dernière question, Monsieur le Président SARKOZY, qu'allez-vous dire ce soir à Benyamin NETANYAHOU ?
M. MAHMOUD ABBAS -- Certainement, je dois rester toujours optimiste et je dois garder l'espoir vivant pour le peuple car, en tant que responsable du peuple palestinien et de la cause palestinienne, je ne peux pas montrer mon désespoir ou mon découragement, cela n'est pas dans notre intérêt. Nous devons toujours rechercher la lumière et non pas regarder l'obscurité.
Je suis tout à fait certain qu'en fin de compte, nous parviendrons à un résultat comme l'a dit mon frère Nasser, peut-être que nous prendrons du retard, mais viendra le moment où l'Etat palestinien sera établi et créé. Pourquoi ? Parce que la majorité écrasante du peuple israélien veut la paix, parce que le peuple israélien sait très bien que sans la paix, ils ne peuvent pas vivre, ils ne peuvent pas continuer à vivre, ils veulent une vie normale pour eux et pour les générations futures. Cette conviction, cette certitude existe aujourd'hui chez le peuple israélien comme elle existe chez le peuple palestinien (????°. Il suffit juste de rapprocher les positions des uns et des autres. C'est cela que nous essayons de faire et c'est ce que nous avons fait il y a quelque jours à Washington, à New York et que nous allons poursuivre -si Dieu le veut- à l'avenir.
En ce qui concerne votre seconde question, oui, il y a de nouvelles positions du Hamas et je ne le nie pas. Peut-être que si j'ai un désaccord avec le Hamas, je peux nier tout aspect positif de ce qu'ils disent mais en réalité, je suis responsable de tout le peuple palestinien et certains d'entre eux disent : « nous sommes pour un Etat dans les frontières de 67 ». C'est un bon développement, c'est bien. Il faut que nous les poussions vers davantage de positions similaires. Et ce que j'ai dit -à savoir qu'ils ont des liens avec l'étranger- ou, ils ont des liens avec l'étranger et ils doivent réfléchir d'un point de vue palestinien et dans l'intérêt de la Palestine, et j'espère que Dieu les y guidera.
LE PRESIDENT -- Cet après-midi, je dirai au Premier ministre NETANYAHOU que la France comprend ses problèmes de coalition. Discuter avec les uns et les autres sans comprendre leurs problèmes, ce n'est pas discuter, c'est au contraire compliquer une négociation. Il ne faut pas nier les problèmes du Premier ministre. Mais deuxièmement, je vais lui dire, avec la franchise que j'ai toujours eue avec lui, qu'il faut donner plus de garanties au Président de l'Autorité palestinienne. C'est un problème essentiel. Parce que si lui, le Premier ministre israélien, a des problèmes avec sa coalition, on peut comprendre que le Président Mahmoud ABBAS -pardon je ne veux pas parler en son nom-- a des problèmes lui aussi avec son opinion publique et donc il faut lui donner des garanties. Je ne parle pas bien arabe, mais je pense que le Président acquiesce à ce que je viens de dire.
Et donc, pour donner ces garanties supplémentaires au Président, si on ne peut pas avancer beaucoup plus loin sur le dossier qui est sur la table, peut-être que le Premier ministre israélien peut laisser faire une autre méthode d'accompagnement, sans s'en sentir menacé lui-même. Est-ce que vous comprenez ce que je veux dire ? Si cela ne passe pas par un endroit, par un chemin, on peut en envisager un autre qui donne des garanties au Président de l'Autorité palestinienne sans menacer le Premier ministre israélien. Voilà la proposition que nous mettrons sur la table.
Et par ailleurs, l'UpM, le Premier ministre NETANYAHOU nous a déjà indiqué qu'il était d'accord pour venir à Paris au mois d'octobre et le Président Mahmoud ABBAS m'a donné son accord aujourd'hui.
QUESTION -- Le point de passage, ce n'est pas Washington, c'est Paris ?
LE PRESIDENT -- Non, mais écoutez, cela me permet de vous dire une chose très simple, rien ne sera résolu sans un engagement fort des Américains. C'est ma conviction et vous le savez parfaitement, j'ai toujours pensé cela. Mais est-ce que cet engagement fort dont nous avons besoin, doit être exclusif ? C'est la question qui est posée depuis dix ans, depuis Camp David. Si un engagement exclusif était suffisant ça ce saurait. Pourquoi la paix n'a-t-elle pas lieu ? Donc il ne s'agit en aucun cas que qui que ce soit remplace le rôle irremplaçable des Américains. Mais entre un rôle irremplaçable --et j'ai salué la démarche du Président OBAMA-- et un rôle exclusif, il y a peut--être une différence de nature ?
Et enfin, peut-on reprocher aux Européens de vouloir que l'Europe existe politiquement sur un dossier qui la concerne ? Parce que nous, les conséquences de l'absence de paix, nous les payons avec un certain nombre de radicaux qui alimentent les réseaux terroristes, qui s'expriment où ? A l'endroit de qui ? Nous avons non seulement le devoir de nous engager, mais le droit, parce que cela nous concerne et cela concerne nos sociétés. Et nous avons eu suffisamment à déplorer de victimes du terrorisme pour ne pas continuer à accepter le déroulement d'un conflit dont tout le monde sait bien quels sont les paramètres de la paix une nouvelle fois. Voilà. Peut-être une dernière question ?
QUESTION -- Monsieur le Président, si Israël devait continuer à entraver les efforts de paix comme, par exemple, ne pas poursuivre le gel de la colonisation, la France et l'Europe vont-ils prendre des mesures concernant particulièrement la relation entre l'Union européenne et l'Israël ?
LE PRESIDENT -- Quand on commence un processus, il faut espérer qu'il réussisse. J'ai dit au nom de la France ce que j'avais à dire sur la colonisation, sur l'État palestinien et sur notre soutien déterminé au Président Mahmoud ABBAS. Je m'en tiendrai là si vous le voulez bien.
Je vous remercie..