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13 août 2009 4 13 /08 /août /2009 08:56


L'épopée marocaine


PHOTO: DR , JPOST








Par 
XAVIER CORNUT 
11.08.09

http://fr.jpost.com/servlet/Satellite?apage=2&cid=1249418576680&pagename=JFrench/JPArticle/ShowFull




Peu de temps après son indépendance, l'Etat d'Israël a appliqué une forme de "doctrine périphérique" en matière de diplomatie et cherché à nouer des relations étroites avec certains pays arabes, en marge du conflit au Proche-Orient.

L'exemple le plus réussi de cette stratégie est celui des rapports israélo-marocains.

Plusieurs facteurs peuvent illustrer les liens très particuliers qui ont été tissés entre l'Etat hébreu et le royaume du Maroc. Après 1948, les pays avaient tous deux besoin d'une forte assistance occidentale pour faire face à la fois à leurs propres défis intérieurs et aux menaces extérieures - le communisme et le panarabisme, entre autres.

"Lorsque le Maroc a déclaré son indépendance, ses frontières étaient ouvertes à toutes formes d'hostilité et, plus particulièrement, à l'infiltration d'espions égyptiens qui espéraient bâtir des infrastructures secrètes sur place.

Cela, dans l'espoir de faciliter l'implantation soviétique en Afrique du Nord", explique Shmouel Séguev, ancien officier des services de renseignements militaires et auteur de The Maroccan Connection : The Secret Relations Between Israel and Marocco. (La connexion marocaine : Les relations secrètes entre Israël et le Maroc).

"A cette époque, Gamal Abdel Nasser était un véritable allié de Moscou. En échange d'armes tchèques, Nasser a ouvert les portes de l'Afrique à l'Union soviétique et à la Chine. Israël s'est alors servi de cette réalité pour convaincre le Maroc d'entamer une coopération bilatérale en matière de renseignement."

Résultat : pendant les années qui ont suivi, Jérusalem et Rabat ont noué des liens confidentiels très étroits dans trois domaines bien précis : l'émigration, les renseignements et la diplomatie. Ces rapports clandestins mèneront à l'un des plus grands succès diplomatiques de l'Etat hébreu, à savoir : la visite du président égyptien Anouar Sadate, à Jérusalem, en 1977.

Aliya et clandestinité

L'histoire des Juifs du Maroc s'étend sur plus de 2 500 ans. Avec une population de 300 000 âmes en 1948, la communauté juive chérifienne était la plus importante du monde arabe.

Installée à travers tout le pays, les grands foyers de population juive se concentraient essentiellement à Casablanca et à Rabat. La monarchie marocaine avait établi une relation unique avec sa minorité "protégée" et indispensable des dhimmis.

Pendant la Seconde Guerre mondiale, le roi Mohammed V avait même refusé d'imposer les lois antisémites du régime de Vichy, en gage de fidélité aux Juifs marocains. Toutefois, l'indépendance d'Israël et la propagande de la Ligue arabe, sous l'Egypte de Nasser, vont rapidement conduire à une atmosphère d'oppression locale.

En 1954, le chef du Mossad, Isser Harel, décide d'établir une base clandestine au Maroc. Un agent israélien, Shlomo Havilio, est rapidement envoyé sur place pour observer les conditions de vie des Juifs au Maroc.

Son rapport est alarmant : les Juifs craignent le départ des forces coloniales françaises ainsi que l'hostilité croissante du panarabisme. Une seule solution, selon Havilio : une émigration massive en direction d'Israël. Harel sera parfaitement d'accord.

Moins d'un an après la rédaction du rapport, le Mossad dépêche ses premiers agents au Maroc pour y organiser une opération d'aliya de masse. Près de 90 000 Juifs avaient émigré entre 1948 et 1955. 60 000 autres allaient prendre le large avant l'indépendance du Maroc, en 1956.

Le 27 septembre de cette année, les autorités marocaines mettent fin à toutes les émigrations, subitement déclarées illégales.

De 1956 à 1960, seulement quelques milliers de Juifs pourront quitter clandestinement le territoire chaque année. Lorsque Harel visite le Maroc en 1959 puis en 1960, il prend conscience que les Juifs sur place souhaitent tous rejoindre la Terre promise.

Une milice clandestine est alors fondée, "Misgueret" (cadre), dont le commandement central est situé à Casablanca et les agents de terrain recrutés à travers le royaume. Son but : défendre les communautés juives sur place et organiser des départs clandestins en direction d'Israël. Le 11 janvier 1961, un bateau est pris dans une tempête et chavire.

44 Juifs du Maroc sont à bord, des enfants pour la moitié. Tous ont péri. Alex Gatmon - qui avait remplacé Havilio - doit alors trouver une nouvelle stratégie pour que les enfants puissent sortir des frontières légalement. Leurs parents, eux, s'enfuiraient clandestinement. L'opération "Mural" était née.

Avec l'aide de l'Agence juive et d'une organisation humanitaire, le Mossad envoie un bénévole britannique, David Littman, au Maroc. Au terme de quatre mois de négociations, il dépasse tous les espoirs en parvenant à organiser le départ de 530 enfants juifs. Envoyés dans une fausse colonie de vacances en Suisse, ils seront ensuite conduits vers Israël.

Contributions du Mossad

A l'été 1961, Gatmon rencontre secrètement à Paris le ministre marocain du Travail, Abdelkhader Benjelloun. Tous les futurs mouvements d'émigration devaient respecter les conditions suivantes : aucune implication d'éventuelles "organisations sionistes", la fermeture immédiate de toutes les voies clandestines d'émigration ainsi qu'une indemnité financière pour chaque départ. Le 27 novembre 1961, Israël paye 500 000 dollars au royaume marocain via le Mossad.

Le chef de la sécurité nationale, Mohammed Oufkir, signe quant à lui le premier "passeport collectif" autorisant les Juifs à quitter le pays légalement. C'est le début de l'opération "Yakhnin".

Le coût de chaque départ varie de 50 à 200 dollars par tête et la totalité des indemnités atteint entre 5 et 20 millions de dollars (soit 100 à
400 millions de dollars actuels). Résultat : environ 100 000 Juifs marocains émigrent en Israël, entre 1962 et 1964.

Hormis le "Misgueret", Harel avait créé un second réseau destiné à recruter des fonctionnaires marocains. "Un Juif marocain, et ami proche du ministre de la Sécurité nationale, Mohammed Oufkir, est parvenu à organiser une rencontre entre le ministre et le Mossad à Paris. Rien n'en est sorti - Oufkir n'était pas encore prêt à collaborer avec Israël", raconte Séguev.

Puis, les relations se sont progressivement améliorées à la fin des années 1950, et surtout après la mort de Mohammed V en février 1961 et le couronnement de Hassan II. Le Mossad a alors proposé d'entraîner les gardes du corps du roi.

Il a également formé les services de renseignements du royaume - leur apprenant notamment à bloquer l'infiltration d'agents algériens et égyptiens dans les ambassades marocaines du Caire et d'Alger.

En 1965, le Mossad - dirigé par Meïr Amit - s'est vu forcé de répondre à l'appel du roi et de retrouver le dissident Mehdi Ben Barka. Une affaire qui hantera le Maroc pendant bien des années.

Mais, contrairement aux rumeurs, le rôle israélien s'était limité à fournir aux autorités marocaines l'adresse du lieu où Ben Barka récupérait son courrier à Genève. L'Etat hébreu n'était pas mêlé à l'opération qui avait suivi.

"Ben Barka a été tué par des agents marocains, avec l'aide de la 7e section des Renseignements généraux français", précise Jean Baklouti, ancien chef de la DST (Direction de Surveillance du Territoire).

Les services israéliens sont restés proches du roi, dans les années qui ont suivi. Au début des années 1970, l'ancien contact d'Israël, Oufkir, fait ouvertement part de ses intentions de coup d'Etat. Par fidélité, l'Etat hébreu en informe immédiatement Hassan II et fait échouer le plan.

Le roi n'oubliera jamais l'aide précieuse de Jérusalem. Au fil du temps, leurs relations n'ont fait que s'améliorer et Israël a continué de fournir le royaume marocain en armes et en renseignements.

La réconciliation des frères sémites

Sur un plan plus global, l'intérêt particulier du roi Hassan II pour la paix au Proche-Orient n'avait rien de très surprenant.

Lors d'une visite au Liban à la fin des années 1950, avant son couronnement, il avait choqué l'opinion publique en affirmant que l'unique solution au conflit consistait à intégrer Israël à la Ligue arabe. Le roi était particulièrement fasciné par l'idée de "réconciliation des frères sémites", même s'il s'était gardé d'en parler au début de son règne.

C'est surtout à partir des années 1970 que Hassan II a très ouvertement encouragé le "dialogue", tout en avertissant ses alliés arabes des dangers d'un "conflit prolongé" pour leurs propres sociétés. Depuis, le royaume marocain a initié un certain nombre de conférences sur le Proche-Orient.

Il a également maintenu ses relations privilégiées avec l'Etat hébreu. Lorsque Jérusalem a abordé la question d'un éventuel accord de paix avec l'Egypte, le Maroc a ainsi proposé de contribuer aux efforts de rapprochement.

Mais à l'époque, le président égyptien Anouar Sadate trouvait le Premier ministre Itzhak Rabin "trop faible" et refusera la main tendue de Jérusalem. Tout bascule avec l'arrivée de Menahem Begin en 1977. Sadate se montre alors disposé à faire la paix.

Par ailleurs, le Mossad avait transmis des informations aux services de renseignements égyptiens à propos d'un complot libyen visant à tuer le président Sadate. Ce dernier sera particulièrement impressionné. Peu de temps après, le directeur du Mossad, Itzhak Hofi, se rend à Rabat où il entame des négociations avec l'adjoint de Sadate, Hassan Tuhami.

En septembre 1977, une nouvelle rencontre est organisée entre le ministre israélien des Affaires étrangères, Moshé Dayan, et Tuhami : la démonstration, une fois de plus, que renseignement et diplomatie œuvraient parfaitement, main dans la main. "Il est important de rappeler le rôle du Mossad dans cet épisode", explique Séguev. "Sans Hofi, la rencontre Dayan-Tuhami n'aurait jamais eu lieu."

Et le 17 novembre 1977, la visite historique du président Sadate à Jérusalem changé alors le climat du Proche-Orient à tout jamais. Plus de 20 ans après les premiers échanges entre Israël et le Maroc, la connexion entre Jérusalem et Rabat avait révélé au grand jour son immense potentiel.

Mohammed VI à Jérusalem ?

Qu'en est-il aujourd'hui ? En matière de renseignements, mais aussi dans les domaines culturel et économique, le Maroc et Israël partagent toujours des intérêts communs. En matière de combat du terrorisme également.

"Le Maghreb a beaucoup à gagner en se dissociant des Etats voyous du Proche-Orient", note Michael Ross, ancien agent du Mossad et auteur de The Volunteer (Le Volontaire). "Le Maroc doit résister à toutes les tentatives d'Al-Qaïda de s'imposer davantage en Afrique du Nord."

En mars 2009, un journal de Casablanca, Le Soir Echos, a publié le récit de l'opération "Mural" et l'aliya secrète des enfants juifs. C'était la première fois depuis 1961 que les Marocains entendaient parler de David Littman et de son rôle dans les relations israélo-marocaines.

Littman, à qui le Centre israélien de Renseignement et de Commémoration a rendu hommage le mois dernier, a saisi cette opportunité pour appeler les Marocains à agir : "Une solution au conflit israélo-arabe ne sera possible qu'avec l'aide d'un Etat qui bénéficie de la confiance des deux parties", a-t-il déclaré.

"Le Maroc a justement cet avantage. Le roi Mohammed VI devrait venir à Jérusalem, prendre la parole à la Knesset et concrétiser les rêves de paix de son père." Littman a également partagé ses espoirs de voir les relations israélo-marocaines servir d'exemple à d'autres nations, en plus d'encourager de futures négociations

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