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1 avril 2010 4 01 /04 /avril /2010 01:09

 

DOCAS

SUR LE CHEMIN DE LA LIBERTE
ISRAEL 1947 – 1949

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II

La restauration politique juive

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II.1

Le nationalisme religieux arabe

et la présence juive sous le mandat britannique

AVIS:La publication complète ou partielle de l’article et/ou des cartes est soumise à l’autorisation préalable de l’auteur (contacter aschkel.info ou à-contre-courant).

En environ un siècle de présence juive en Palestine, entre les progroms de Damas de 1840 et l’instauration du Mandat Britannique, le statut discriminant de dhimmi – sous l’égide du Califat ottoman – est remplacé sous l’égide d’une tutelle britannique partagée entre la reconnaissance politique des minorités juives (dans la lignée de la Déclaration Balfour) et les intérêts stratégiques d’une alliance avec les élites arabes (dans la lignée de la correspondance entre McMahon et le Chérif Hussein).

L’histoire moderne du Proche-Orient – et de ce fait incluant, Israel – peut être comprise comme les différentes formes politiques et religieuses que va prendre le rejet de la tutelle occidentale après le désenchantement consécutif à la libération du monde arabe contre la domination turque.

En ce sens, la confrontation entre Juifs et Arabes ne représente qu’un épisode d’une reconquista arabe, vieille de plusieurs siècles, et visant la retour d’une hégémonie théologico-politique musulmane sur le modèle de celle qui aurait existé du vécu du prophète et des quatre premiers califes. Il s’agit ainsi du retour de l’islam comme puissance expansionniste dans lequel la guerre acharnée contre Israel constitue d’une certaine façon la clé de voûte et l’étape initiale d’une revanche impérialiste et multiforme envers l’Occident, comme le montrent clairement les appels des dirigeants arabes à une future conquête de l’Europe par la démographie.

 

Si l’on revient sur la période charnière des années 1920, l’attribution du Mandat de la SDN sur la « Syrie du Sud » apparaît en effet dans le contexte d’une dépeçage progressif des vestiges de l’Empire Ottoman, en parallèle à l’émergence de la puissance saoudienne, sur fond de dépendance croissante aux hydrocarbures.

La sécurisation de la route des Indes et la soumission des musulmans du monde indien impliquaient par ailleurs pour les Britanniques l’instauration de contre-pouvoir à la main-mise religieuse et politique ottomane : la promotion identitaire arabe sera ainsi encouragée dès le 19e siècle chez les premiers théoriciens du nationalisme arabe (Kawakibi,…), qui avaient le plus souvent été éduqués dans les établissements occidentaux du Levant.

Si l’on observe ainsi une carte de la péninsule arabique, on remarquera comment la Grande-Bretagne va grignoter au fur et à mesure l’ensemble du littoral, établissant depuis le canal de Suez une série de protectorats, passant par l’Egypte – qui dès 1882 perd toute autonomie politique –, Aden, Oman ou les futurs monarchies pétrolières du Golfe persique jusqu’à Bassorah.

Carte Empire britannique et péninsule arabique

La présence britannique en péninsule arabique. Fin XIXe - début XXe siècle

 

L’essor de la fibre nationaliste-religieuse arabe rejoint donc indirectement les intérêts stratégiques britanniques qui vont parvenir à obtenir le soutien du maître du Hedjaz et gardien des Lieux saints de l’Islam dans la guerre contre l’Empire ottoman.

Mais, débordés par la nouvelle puissance théologico-tribale des Sa’ud – alliés stratégiques des ulama d’obédience wahhabite –, les Hachémites s’enfuient de la Mecque au début des années 1920, et rêvent d’organiser à leur avantage un royaume étendu sur l’ensemble du croissant fertile oriental, incluant Damas, Bagdad, Jerusalem via le bassin du Tigre et de l’Euphrate.

En vain.

 

Durant l’entre-deux-guerres, les révoltes arabes vont se succéder de la Syrie à l’Iraq : là où un « grand royaume arabe » avait été promis se trouve substitué un découpage du Proche-Orient en zones d’influence entre la France et l’Angleterre, concentrant l’ensemble des frustrations nationalistes arabes.

Le Proche-Orient - Aspirations nationalistes arabes. Début années 1920
Les aspirations nationalistes arabes et la présence alliée : 1917-1923

Le paradoxe réside dans le fait que l’émergence de l’affirmation collective juive sera à tort identifiée à un effet de cette mise sous tutelle occidentale. Une idée reprise à leur compte par l’idéologie crypto-marxiste plaquant arbitrairement sur le conflit proche-oriental le paradigme de la lutte des classes.

Lorsque Lord Balfour en 1917 évoque l’instauration d’un foyer national juif en Palestine, il entend la portion de territoire de part et d’autre du Jourdain.

La déclaration Balfour

 

Il faut se souvenir qu’à ce moment, non seulement le yichouv, la communauté juive en erets yisra’el, n’est pas une virtualité ni encore moins un projet dans un tiroir des chancelleries européennes, mais la restauration effective et déterminée d’un projet social, culturel et politique juif.

Une réalité que la rhétorique et l’imaginaire arabo-musulman ne sauraient concevoir puisqu’en aucun cas, la revendication juive ne s’inscrit dans les catégories onto-théologiques édictées par le Coran.

L’activisme arabe dirigé contre les Juifs et les Britanniques à partir des années 1920 provient partiellement du ressentiment arabe contre la privation de souveraineté. Il s’enracine surtout dans la volonté de revanche liée à la perte de la domination musulmane sur la société.

Or, pour les minorités chrétiennes et juives, la présence occidentale signifie, à défaut de l’abolition, l’érosion progressive de la dhimmitude : en témoigne l’essor de l’alphabétisme parmi les populations chrétiennes arabes, tandis que l’analphabétisme subsiste à un niveau élevé parmi les populations arabes musulmanes de Palestine durant l’entre-deux-guerres.

De nombreux syndicalistes européens (Le pays d’Israel, un marxiste en Palestine,…) se rendront durant les années 1920 et 1930 en Palestine. Ils seront dans leur majorité attirés par l’expérience sioniste dont la tendance collectiviste incarnée par le kibboutz semblait correspondre aux critères de la doxa marxiste d’une dilution de l’identité juive dans l’émancipation sociale.

Ils notèrent également dans leurs carnets de voyage que l’éclatement traditionnel de la société arabophone en factions diverses fondées sur l’allégeance clanique, la grande propriété foncière et l’origine ethnique (syrienne, caucasienne, maghrébine, balkanique), se combinait avec une lutte féroce pour le pouvoir entre bourgeoisie et élite religieuse.

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Bédouins près du lac Houla - Photo 1946
Bédouins près du lac Houla – Photo 1946

 

Pysans juifs et Bédouins, vallée de Houla - Photo 1946
Paysans juifs et Bédouins aux bords du lac Houla – Photo 1946

 

Ils remarquèrent que seule une portion relative de la population arabe rejetait la présence juive : il s’agissait d’une part, de la petite bourgeoisie, qui voyait d’un mauvais œil la concurrence des commerçants juifs, et surtout les revendications sociales des Juifs s’étendre aux ouvriers arabes, et, d’autre part, des élites religieuses presque toujours appartenant à la caste des propriétaires terriens égyptiens ou syriens possédant terres et villégiature en « Syrie du sud ».

En revanche, les ouvriers, les petits paysans obéissant au mukhtar, les bédouins trouvaient un bénéfice à l’amélioration des conditions de vie, à l’assainissement des territoires, aux défrichements ou à l’essor économique, et parvenaient à un modus vivendi avec les populations juives. Les recensements et rapports britanniques indiquent ainsi clairement que les mouvements migratoires arabes au sein de la Palestine mandataire se caractérisent entre 1920 et 1939 par une concentration précisément dans les zones de peuplement juives (la plaine côtière, la Galilée, la vallée du Yézréel).

Enfants juif et arabe dans la plaine de Sharon. Photo 1934

Arabe accompagnant les pèlerins juifs lors de Lag baOmer (1939) à Méron, tombeau de Rabbi Shimon Bar Yo'haï

Rencontre entre les habitants juifs de Zihron Yaakov et arabes de Subrin - Photo 1940

Zihron Yaakov et Subrin réunis : Jabri Amin alHaj, Deb Ail Ali, Yaakov Epstein, Zeev Neiderman, Dov Leitman - Photo 1940

Arabes visitant le kibbouts Amir, vallée de Houla - Photo 1940

Paysan juif de Dorot donnant de l'eau pour le bétail des bédouins de passage par dessus la clôture - Photo 1943

Arabes de Dabburia fêtant l'établissement du kibbouts de Dovrat au pied du Mt Tabor - Photo 1946

Arabes de Dabburia fêtant l'établisement du kibbouts Dovrat au pied du Mt Tabor - Photo 1946

 

 

Toutefois, tant que la puissance mandataire exerce le pouvoir – contre lequel tant le yichouv que les arabes lutteront en vue de l’indépendance – la question de la souveraineté exercée sur l’autre ne se pose pas. Du côté arabe, il est inconcevable qu’une portion de territoire ne retourne pas dans son giron. C’est pourquoi dès 1923 Vladimir Jabotinsky perçoit l’inéluctabilité du conflit et souhaite favoriser la constitution de groupes d’auto-défense juifs. Pour lui, le sionisme est synonyme de régénération par le labeur, le travail de la terre, mais aussi de souveraineté.

Or, la libération sociale et culturelle prônée par la pensée sioniste ne saurait exister sous la forme d’une nouvelle tutelle musulmane dont le vécu des Sépharades soulignait la dureté et l’iniquité. Les pionniers juifs venant du Yémen témoignaient de cette vie humiliante sous la domination et l’arbitraire. Dès lors, les projets unificateurs comme celui d’Abdallah de Jordanie ne pouvaient trouver aucun écho, car inclure la population juive au sein d’une majorité musulmane ne pouvait concrètement que signifier la réinstauration d’une nouvelle soumission, que le souvenir des pogroms de Turquie, de Syrie, d’Egypte, et bien sûr des années 1920-1930 rendait tout autant inconcevable.

Maisons juives détruites à Jaffa à la suite d'attaques arabes - Photo déc. 1936

Maisons juives détruites suite aux attaques arabes de Jaffa - Photo déc.1936

 

Le statut juridique prôné en islam pour les Juifs et les Chrétiens inclut la loyauté au pouvoir musulman, ce qui se concrétise dans l’interdiction de porter une arme. Toutefois une telle exigence impliquait aussi l’interdiction de se défendre en cas d’injustice, les règles juridiques islamiques n’offrant qu’une inégalité institutionalisée lors d’un litige avec un musulman.

Dans la continuité de ce principe théologico-politique, les chartes et textes législatifs de l’OLP ne font, aujourd’hui encore, aucune mention à un statut juridique égalitaire avec les populations non musulmanes.

Des années 1920 aux 1940, les affirmations respectives des nationalismes juifs et arabes se dirige quasi inexorablement vers un point de non-retour, un état de fait inconciliable résultant essentiellement d’une non-reconnaissance de l’autonomie juive.

Le sionisme ne saurait être compris sans cette réalité vivace et douloureuse d’un vécu sous l’arbitraire politique, l’injustice sociale et le déni culturel le plus complet.

Or, en tant que tel, l’idéal libérateur sionisme contenait les ferments d’une contestation frontale du mode de relations sociales et interconfessionnelles des sociétés musulmanes.

 

Pour résumer, une ligne de fracture se dessine ainsi graduellement et définitivement entre l’idéologie nationale-religieuse arabe et le projet sioniste, avec pour résultat concret une situation paradoxale où un projet autonomiste juif se heurte à son interprétation arabo-musulmane comme avatar de la domination occidentale.

Les indépendances arabes après-guerre (Liban 1943, Syrie 1946, Transjordanie 1946,…) verront ainsi dans la Palestine mandataire le chaînon manquant d’une représentation de l’espace où devrait être réinstaurée la suzeraineté arabo-musulmane, alors que les élites aux tendances régionalistes faisaient achopper le projet d’unification.

L’affrontement acharné contre l’indépendance juive maintient jusqu’à aujourd’hui encore une unité compensatoire dans l’imaginaire arabe où la défense exagérée de l’umma ou encore le sauvetage fantasmé de ses lieux saints attisent l’hostilité antijuive et réactive l’illusion revancharde d’une fierté à restaurer.

Les pogroms de 1929 commenceront par l’appel du mufti al Husseini à la « défense d’al Aqsa » censée être menacée par la seule présence des pèlerins juifs au Mur occidental… Aujourd’hui encore, la même thématique sert à justifier autant des violences antijuives que la destruction du patrimoine culturel mondial non musulman sur les territoires régis par les factions mafieuses de l’OLP.

On comprendra aussi caractère artificiel de la question « palestinienne » en rappelant que la Jordanie, pays de population arabe « palestinienne », dominée par un roi hedjazien entouré de sa garde bédouine et tcherkesse, et le produit d’un marchandage, n’a survécu qu’à travers le soutien britannique qui dès 1922 met en place la Légion arabe.

L’implication ambiguë des troupes britanniques lors de l’invasion arabe de 1948 – par exemple lors du bombardement de Tel Aviv par les avions égyptiens alors que Londres tenait le canal de Suez –, jusqu’aux manipulations historiographiques contemporaines, laissent entendre que la compréhension du conflit échappe globalement à toutes les réductions complaisamment servies dans la plupart des médias.

A suivre …
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