Je fais suite à l'article de l'éminent Rav Steinsaltz pour ouvrir ce dossier sur le TALMUD
Le juif n'entre dans aucune catégorie classique pré-établie. Il est un phénomène qui échappe à la classification, car il est un devenir en fusion avec un autre devenir: la Torah. |
Le juif est un phénomène qui échappe à la classification, car il est un devenir en fusion avec un autre devenir: la Torah II est aussi absurde de définir le juif comme membre d'une nation que de parler d'une confession israélite ou d'un judaïsme culturel ou laïque. Le juif n'entre dans aucune catégorie classique pré-établie. Il est un phénomène qui échappe à la classification, car il est un devenir en fusion avec un autre devenir: la Torah. Sans juif point de Torah ;sans Torah point de juif. Pour dégager la signification de la Torah, nous allons d'abord étudier l'étymologie de ce mot, puis en examiner le contenu et notamment la place qu'y occupe le Talmud. SIGNIFICATION DU MOT TORAH Ce mot hébreu procède de (yarah) qui signifie: jeter, lancer, tirer, projeter, et ce n'est que le sens dévié qu'en donnent: enseigner, montrer, indiquer. Si nous reprenons maintenant les quatre lettres qui composent le mot Torah nous trouvons la triade (tor) et la lettre (hé). Le mot (tor) comporte des significations multiples:
un temps: âge, époque; Cette rencontre spatio-temporelle nous renvoie au premier sens: projeter, tirer, lancer. La Torah est un projet, un devenir: un lieu de rencontre espace-temps. Voilà donc un premier isomorphisme avec le devenir spatio-temporel que constitue Israël. En somme, rien que sur le plan sémantique, la Torah est bien autre chose qu'un récit ou un recueil de rites ou de règles d'éthique, un code pénal ou une œuvre littéraire. Nous avons vu que la Torah est une voix. Or, la voix, contrairement à l'écriture, est vivante. Elle se situe à la fois dans le temps et dans l'espace; ce n'est pas une suite de mots sous une forme achevée, un discours fixé une fois pour toutes sur le parchemin; c'est une parole vivante qui jaillit en permanence: Vékol Aame roime éte akolote "Tout le peuple vit les voix"(5) Ceci nous amène directement au contenu de la Torah. LE CONTENU Réche Lakiche enseigne(6): "II est dit dans la Torah (7) "Je te donnerai les Tables de pierre, la loi et le commandement que j'ai écrits, pour les leur enseigner". Les Tables de pierre, ce sont les dix commandements; la loi, c'est la Bible; le commandement, c'est la michna; pour les leur enseigner, c'est la guemara ". Ce texte nous apprend que c'est tout cet ensemble qui a été donné à Moise au Mont Sinai. Oui, dans son sens plein et traditionnel, la Torah comprend tout à la fois la parole de Dieu -telle qu'elle est consignée dans la Bible et plus particulièrement dans le Pentateuque (la Loi écrite) - et le Talmud, comprenant la michna et la guemara (la Loi orale). C'est cet ensemble qui forme un tout indissoluble: la Torah. Entre la Torah écrite et la Torah orale, point de différence car, nous l'avons vu, c'est une même voix, une même parole, vivante et non figée. II n'est pas possible d'étudier la Bible sans étudier le Talmud - la michna et la guemara. C'est grâce à cet approfondissement continuel du texte, que le projet, la volonté, que constitue la Torah, sont assumés. "Tu te conformeras à la doctrine qu'ils (les membres du Sanhédrine) t'enseigneront, selon la règle qu'ils t'indiqueront" (8). Rien n'est figé ; la loi se fait et s'accomplit par ceux qui l'assument en l'étudiant. Et il ne s'agit pas là d'une simple figure de style. Nous apprenons ainsi dans le Talmud(9) que Rabbi, parmi d'autres innovations, a autorisé la consommation des légumes, dès la huitième année (10). A ses collègues, choqués et indignés partes réformes, il répliqua: "Venez discuter tous! II est écrit dans la Bible(11) : Il (Ezéchias) broya le serpent d'airain érigé par Moïse (12). Ne s'était-il donc trouvé aucun juste depuis Moise jusqu'à Ezéchias pour accomplir cet acte? De quel droit ce dernier prit-il cette initiative que personne avant lui n'avait voulu ou osé prendre? - C'est que ce diadème, le Saint, béni soit-il, le lui a réservé pour qu'il s'en pare. Quant à nous, c'est cette réforme-ci qui constitue notre diadème; il nous a été réservé pour que nous nous en servions ". Peut-on montrer avec plus d'éloquence la liberté qui est laissée à l'homme par rapport à la Loi? Peut-on dire plus clairement qu'elle est un projet, une volonté, à accomplir par l'homme? Rappelons-nous que le héros de cette histoire est Rabbi Yehouda Hanassi, le rédacteur de la michna. C'est lui qui compare l'innovation à un diadème réservé par l'Eternel à celui qui en prendra l'initiative et la responsabilité. Ceci nous amène à l'isomorphisme et à la relation fusionnelle entre Israël et la Torah. Les deux se définissent par la rencontre de l'espace et du temps dans la transcendance. Les deux constituent un devenir et un projet qui s'accomplissent en interaction: la Torah par le juif, le juif par la Torah. Ils se déchiffrent l'un par l'autre. La Loi est (hala' ha), une marche vers l'accomplissement et non une exégèse de textes jaunis. Ce mot est formé de (hala'h) - "il marche" et la lettre (hé) indiquant la transcendance. C'est, pour chacun de nous, le (lë h lé ha), le "Va pour toi " d'Abraham. (Avec l'aimable autorisation du Département de l'Education par la Torah de l'Agence Juive). Source : http://www.lamed.fr/
(1) Genèse 2, 4. |