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5 juin 2009 5 05 /06 /juin /2009 10:04






4 Juin 2009 - Slate .fr

Il n'y a pas si longtemps, j'avais posé une question simple au député du Hezbollah Hussein Hajj Hassan: «Le Hezbollah veut-il prendre le pouvoir au Liban'» Avec son habituel petit sourire ironique, il m'avait répondu : «Mais madame, nous l'avons déjà !» C'était en décembre 2006, quelques mois après une guerre contre Israël qui avait fait plus de 1 000 morts et quelques jours après le début d'un sit-in devant les bureaux du Premier ministre Fouad Siniora qui allait durer un an et demi.

Le parti de Dieu, qui domine l'actuelle opposition parlementaire libanaise tout en ayant des ministres au gouvernement, s'est toujours défendu de vouloir imposer une République islamique au Liban, pays dont la structure politique et institutionnelle - datant de 1943 - repose sur un partage des pouvoirs entre les trois principales confessions (maronites, sunnites et chiites), de sorte à préserver un pluralisme culturel et religieux unique dans la région. En revanche, il n'a jamais caché son désir de voir la population libanaise, constituée pour au moins un tiers de chiites, l'appeler de ses v'ux. Le théoricien et numéro 2 du parti Naïm Qassem l'explique dans son livre Hizbullah : the Story from within, publié en 2005. Le secrétaire général du Hezbollah Hassan Nasrallah, le rappelait dans une interview au magazine iranien Risalat Al-Hussein en décembre 2006: «C'est la volonté du Hezbollah d'établir un jour une République Islamique [au Liban] parce que le Hezbollah croit qu'établir une République Islamique est la seule façon d'avoir une société stable et c'est la seule façon de régler le problème des différences sociales même dans une société constituée de plusieurs minorités».

Le pouvoir de paix et de guerre

En tout état de cause, la réponse de Hajj Hassan reposait sur une réalité claire: parce qu'il est capable de faire la guerre ou la paix au Liban, le Hezbollah a effectivement le pouvoir. Son arsenal militaire pèse de façon décisive sur la vie politique du pays, et c'est bien là le véritable enjeu des élections législatives qui se tiendront dimanche 7 juin.

La priorité absolue pour le parti demeure de protéger son armement, et non d'obtenir des strapontins parlementaires ou ministériels, ce qui n'a d'ailleurs jamais été sa stratégie. Le Hezbollah, formé en 1982 en pleine guerre civile, n'a demandé à avoir des ministres qu'à partir de juillet 2005, au lendemain du retrait des troupes syriennes. Aujourd'hui, il ne détient que deux portefeuilles sur les 30 que compte le gouvernement d'union nationale formé en juillet 2008 et dans lequel l'opposition libanaise dispose d'un «tiers de blocage» via ses 11 ministres. De même, le parti compte seulement 14 députés dans un Parlement composé de 128 sièges divisés à parts égales entre chrétiens et musulmans.

Réservant ses forces pour les questions le concernant directement ? sa lutte contre Israël, la gestion presque autarcique des zones sous son influence directe et, bien sûr, l'entretien et la protection de son arsenal, le Hezbollah a toujours su se reposer sur un réseau d'alliances efficaces. Il a verrouillé, avec son ancien rival du Mouvement Amal dirigé par le président du Parlement Nabih Berri, la communauté chiite. Son association avec les partis chrétiens du Courant Patriotique Libre (CPL) du général Michel Aoun (avec lequel il a signé en février 2006 un document d'entente) et du Tachnak, acteur de poids dans l'importante communauté arménienne vivant au Liban, lui offre une couverture nationale et lui permet de sortir du ghetto communautaire.

Acteur «suprapolitique»

La stratégie électorale du parti est significative: il a laissé le général Aoun monter au créneau médiatique et se présenter comme le véritable chef de l'opposition, puis il a joué les modérateurs entre ses différents partenaires lorsque ceux-ci négociaient leurs candidatures par circonscriptions. De la sorte, le Hezbollah se positionne essentiellement comme un acteur «suprapolitique», au-dessus des triviales disputes politiciennes et concentré sur les enjeux réellement vitaux.

Alors que Naim Qassem dit, dans une interview accordée cette semaine à Associated Press, s'attendre à ce que l'opposition rafle entre 67 et 71 sièges et remporte ainsi une majorité absolue, le parti n'a présenté que 11 candidats (soit moins que pour la précédente assemblée) pour les 28 sièges parlementaires attribués par la loi aux chiites et pour lesquels 116 aspirants à la députation vont batailler. Là encore, c'est Michel Aoun qui monte au front, espérant former le plus gros bloc parlementaire de l'hémicycle.

Le rôle d'arbitre des chrétiens

Le parti suit une logique évidente, déduite des réalités électorales libanaises: la répartition des sièges étant basée sur un partage confessionnel, les forces chiites d'une part (qu'il domine) et sunnites d'autre part (emmenée par le Courant du Futur de Saad Hariri, son adversaire) s'équilibrent et s'annulent. Il reviendra donc aux chrétiens de trancher, leurs votes pouvant potentiellement faire pencher la balance vers l'un ou l'autre camp.

Les pronostics annoncent des résultats serrés, les chrétiens étant extrêmement divisés, et il est probable que les jeux ne se jouent qu'à quelques milliers de voix. D'où la surenchère électorale sans précédent à laquelle le Liban assiste actuellement.

Les inconnues d'une victoire l'opposition

Deux cas de figures se présenteraient en cas de victoire de l'opposition aux élections: des appels à la formation d'un gouvernement d'union nationale ont déjà été lancés par les officiels du Hezbollah, main apparemment tendue à leurs adversaires dits du 14 Mars. Ceux-ci, en toute logique, ne peuvent l'accepter sans se dédire, après avoir rejeté pendant des mois ce système jugé inepte car annulant le principe de majorité décisionnaire. Si toutefois, un nouveau gouvernement de ce type devait être formé, le statu quo qui prévaut depuis juillet 2008 se perpétuerait alors et le Hezbollah continuerait d'évoluer de façon autonome.

Selon toute probabilité, Berri sera reconduit à la tête de l'Assemblée, garantissant un contrôle direct sur le Parlement ; le président de la République Michel Sleimane (maronite) resterait cantonné dans un rôle d'arbitre sans prérogatives réelles ; le conseil des ministres serait incapable de trancher sur les questions cruciales sans unanimité, comme c'en est le cas depuis des mois. L'armement du parti resterait donc à l'abri.

En revanche, si l'actuelle opposition devait se retrouver seule au pouvoir, de multiples questions seraient posées.

Les programmes du CPL et du Hezbollah se rejoignent autour d'aspirations communes : lutte contre la corruption, le féodalisme et la pauvreté, décentralisation, développement des régions, etc. Pourtant, aucun de ces deux programmes n'explicite, chiffres à l'appui, le financement de ces réformes. A l'inverse, l'économie libanaise - plombée par une dette de 49 milliards de dollars - repose en grande partie sur un système d'aides et de prêts contractés auprès de pays étrangers sous condition que le plan de réforme élaboré par l'actuelle majorité soit mis en pratique. Or, pour l'heure, ces réformes ont en grande partie été rejetées, ou pour le moins accueillies froidement, par le Hezbollah et ses alliés.

Le rôle de l'Iran

L'incertitude politique est encore plus évidente: le CPL appelle à la laïcisation des institutions, alors que le Hezbollah souhaite l'abolition du sectarisme politique sans l'assortir d'aucune dimension laïque, ce qui, associé à l'abaissement de l'âge du vote, ramené de 21 à 18 ans, conduirait à une loi par le plus grand nombre qui lui serait favorable à terme, compte tenu du taux de natalité élevé dans la communauté chiite. La laïcité serait de toute façon incompatible avec sa propre dimension «islamique» et avec le caractère idéologique de sa relation avec l'Iran par le biais du «Wilayat el Fakih», une doctrine controversée au sein même du clergé chiite. Manifestement, cette dimension idéologique prend toute son ampleur autour de l'armement du Hezbollah. Alors que son document d'entente signé avec le CPL indique que «le port des armes n'est pas un objectif en soi», les officiels du parti ont à de multiples reprises réitéré la persistance de ces armes quelles que soient l'insistance de la communauté internationale.

A cela s'ajoutent les déclarations récentes du président iranien Ahmadinejad affirmant qu'«une victoire de l'opposition renforcerait la ?résistance'  par la constitution de nouveaux fronts et modifierait ainsi l'équilibre dans la région», ainsi que la multiplication des accusations contre le Hezbollah selon lesquelles le parti opérerait à l'étranger (en soutien au Hamas dans les territoires palestiniens, mais aussi en Egypte, en Jordanie, au Yemen, en Azerbaidjan). Naturellement, la perspective d'une arrivée au pouvoir du Hezbollah par le biais de ses alliés, et quand bien même il resterait minoritaire en termes de portefeuilles ministériels, a d'ores et déjà suscité de vives réactions en Israël. Le ministre de la Défense Ehud Barak a déjà prévenu que «la victoire du Hezbollah aux législatives nous accordera une liberté d'action que nous n'avions pas en juillet 2006».

La bataille électorale fait donc rage, à coups de slogans tapageurs, d'achats de voix, et de discours dithyrambiques. Pour beaucoup de Libanais, le résultat de ses élections décidera du modèle de société dans lequel ils seront appelés à vivre, pas moins.

Nathalie Bontems

Photo: Hassan Nasrallah numéro un du Hezbollah  Reuters

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