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18 février 2010 4 18 /02 /février /2010 20:18


L'invention de la Palestine
Deuxième partie
Sacha Bergheim

Première partie ICI

  Mahmoud Darwich, la dissimulation du politique

 

 

 L'identification forcenée à la figure du « réfugié » comme instrument de délégitimation de l'existence d'Israel anime aussi Mahmoud Darwich que certains ont été jusqu'à dépeindre comme le chantre de la « souffrance » du « peuple palestinien ».

 

 La biographie officielle et complaisante place immanquablement la thématique de l'exil au centre de son « vécu ». La nostalgie de la terre d'origine, mais cette fois-ci poétisée, transcrivant un visuel émotionnel centré autour de l'olivier.

 

 Le motif de la rupture avec le merveilleux de l'enfance (qui s'avère totalement mensonger chez Saïd ) est completé par l'identification artificielle du « peuple et de sa terre », dont le corollaire immédiat est la violence (juive), au terme d'une reconstruction romantique qui passe par un rééchelonnement historique où la mythologie palestinienne supplante le travail de mémoire et de deuil consécutif à l'Holocauste.

 

 Néanmoins, la vie de Darwich ne correspond pas à celle d'un exilé trouvant dans l'écriture l'exutoire d'une nostalgie surchargée, c'est celle d'un militant politique radical, membre de l'exécutif de l'OLP, dont, il faut le rappeler, l'objectif sans cesse réaffirmé est la destruction irréversible de la présence juive, présentée comme restauration d'une possession exclusive de la terre.

 

 Cette facette du militant politique radical se trouve effacée. Il ne subsiste que le fantôme de l'exil dont l'acte fondateur serait la nakba. Mais que dit Darwich de l'exil ?

 

 Dans la très politique et très orientée "Revue d'études palestiniennes" d'Elias Sanbar, Mahmoud Darwich décrit lui-même la responsabilité arabe dans le départ de sa famille :

« On avait à l'époque commandé aux Palestiniens de quitter leur patrie pour ne point gêner le déroulement des opérations militaires qui devaient durer quelques jours et nous permettre de réintégrer rapidement nos maisons. Mes parents découvrirent bien vite que ces promesses n'étaient que rêves ou illusions » (Entretien: En marge du transitoire, Revue d'études palestiniennes, 10-hiver 1984).

 

 On remarquera avec attention l'usage politique de l'euphémisme, puisque le « déroulement des opérations militaires » (en contradiction avec la résolution du 27/11/1947 de l'ONU) était destiné, selon les objectifs revendiqués du secrétaire de la Ligue Arabe Azzam Pacha (l'appel au massacre), à procéder à une purification ethnique de toute population juive de l'ensemble de la Palestine mandataire.

 

 L'accusation d'une expulsion forcée des « Palestiniens » s'effondre face à la présentation qu'en donne Darwich, et que confirmera le dirigeant palestinien actuel, déclarant en 1976 que « les armées arabes ont forcé les Palestiniens à quitter leurs maisons » (Mahmoud Abbas, Filastin at-thawra, mars 1976).

 

 En 1994, Darwich ira jusqu'à présenter son « séjour au Liban » comme « une villégiature » (Paul Giniewski, Le "droit au retour" des réfugiés palestiniens ?, Rivista du Studi Politici Internazionali n°242)

 

 De façon tout aussi précise, le Monde du 21 avril 1951 rappelait que « pour comprendre les origines de ce problème terrifiant, il est nécessaire de se reporter à l'époque de la lutte, en 1948. On peut poser mille fois la question de savoir pourquoi ces gens ont quitté leurs foyers de Palestine, on obtiendra mille réponses différentes. Certains ne voulaient pas vivre dans un Etat juif. Beaucoup plus nombreux sont ceux qui sont partis parce qu'on leur avait dit que c'était pour quelques jours, quelques semaines au plus, et qu'ils reviendraient avec les armées arabes triomphantes : ils travaillaient comme ouvriers agricoles chez des propriétaires arabes, et n'avaient fait qu'obéir, comme toujours, aux ordres de leurs supérieurs. »

 

 Par un recours diversifié du « témoignage », c'est tout l'édifice victimaire qui se trouve dès lors contesté, et à partir de là, la répartition des champs de responsabilité qui doit être reprise.

 

imagesacha2.jpg
Réfugiés juifs après leur arrestation par les Britanniques. Photo Life / Dmitri Kessel –  Haifa 1948

 

 Subsiste toutefois l'acharnement à présenter la fable des réfugiés, en réalité des déplacés arabes, comme l'effet d'une cause unique, là où un ensemble de facteurs seraient à prendre en compte.

 

 L'appel sous-jacent à l'assassinat collectif du peuple juif qui trouve toujours dans le monde musulman un écho cautionné par des sources religieuses, se sert de la question des réfugiés comme prétexte illustrant le but ultime : l'anéantissement de l'Etat juif par la conquête militaire.

 _____________

 

♦ Une idéologie de la négation

 

 Si l'on s'attarde de plus près à la structure même de la reconstruction politique du passé chez Saïd ou Darwich, on remarquera que se dessine ainsi en creux un portrait, mais inversé et démonisé, de l'identité juive.

 

 Ce portrait peut être présenté schématiquement de la façon suivante :

 

• la destruction du second Temple est remplacée par la Nakba ;

 

• la dispersion du peuple juif dans le monde est remplacée par la thématique du réfugié ;

 

• l'aliyah (« l'an prochain à Jérusalem ») est remplacée par le prétendu « droit au retour » (inexistant au regard du droit international et des résolutions de l'ONU);

 

• la restauration d'un Etat autonome et libre (juif) est réduite à un processus de dépossession (des Arabes de Palestine) donc illégitime (cette illégitimité sera brocardée dans les médias sous la forme d'une « faute originelle » de l'Etat d'Israel) ;

 

• l'émancipation (juive) mettant fin à des siècles de persécutions dans le monde arabo-musulman est dénaturée (le mythe de l'âge d'or andalou) et reléguée au rang de privation d'identité (arabe) : c'est l'accusation morale d'un avilissement volontaire et généralisé des Arabes « citoyens de seconde zone », miroir déformé du statut de dhimmi ;

 

• le nettoyage ethnique mené par la Jordanie (créant artificiellement le problème de Jerusalem-est, comprendre, la partie de la ville dont les Juifs ont été expulsés) ou par les pays arabes à partir de 1948, est rayé des lignes de l'histoire officielle, au profit unique d'un verdict définitif, le prétendu « nettoyage ethnique » de la Palestine arabe par des « envahisseurs » sans aucun lien supposé avec la terre (on aurait alors des raisons de se demander pourquoi prendre possession d'une terre qu'aucun lien ne rattacherait à l'histoire juive).

 

• l'Holocauste est systématique dévalorisée et relativisée au profit de la victimisation palestinienne incarnée dans les « camps » de réfugiés ou dans le « mur », sans parler du slogan écoeurant du « génocide palestinien », seul au monde à avoir pour effet l'augmentation exponentielle de la population palestinienne.

 

 Le « témoignage » a pour but de concentrer en lui l'ensemble des caractéristiques politiques de la guerre menée par les Etats arabes contre le pays d'Israel, ce qui conduit à la mise en place d'un procédé d'inversion et de mise au ban du peuple juif, que l'on peut résumer ainsi :

 

• les réalisations du sionisme (c'est-à-dire dès avant 1948), comme le défrichement du pays, le reboisement de régions entières, l'assèchement des marais où sévissait le paludisme, la mise en culture du pays sans aucun équipement moderne, attestent d'un lien indéfectible avec la terre et s'opposent frontalement à l'idée d'une volonté d'appropriation, elles sont en revanche ignorées au motif d'une antériorité de la présence arabe, quand bien même à ce jeu-là, la continuité de la présence juive dans l'histoire de la terre d'Israel serait bien plus légitime ;

 

• ces réalisations sont ensuite réinvesties par l'imaginaire d'inspiration marxiste avec comme effet le postulat romantique d'un terre prospère (arabe) visée par l'avidité capitaliste (juive). Exit également le grand propriétaire terrien arabe de Damas vendant des terres incultes à prix d'or aux pionniers juifs et la misère des hameaux de fellahs arabes.

 

• l'amélioration sans commune mesure du niveau de vie des Arabes israéliens en comparaison des pays voisins est systématiquement présentée comme une discrimination, l'effet d'une prédation coloniale, ce qui aurait pour conséquence (totalement imaginaire pour qui écoute la voix des médecins, universitaires, avocats, entrepreneurs, hommes politiques arabes...) deux statuts, celui de l'autochtone (privé de ses droits) et du colon (s'adjugeant l'ensemble des profit).

 

• l'indépendance juive depuis 1948, sous la forme l'exercice de la souveraineté politique sur un territoire donné dans les strictes limites du droit international est réduite sans preuve à un plan supposé d'expulsion mené manu militari par des forces militaires (juives), en omettant sciemment de mentionner le refus arabe de toutes les résolutions de l'ONU, dont la première créant dès 1948 un Etat arabe.

 

 Qu'il y ait eu déplacement de populations ou perte de revenus pour certains, comme le rappellent pathologiquement les cas Darwich ou Saïd, cela ne fait aucun doute, pas plus qu'il est indubitable qu'il y a eu purification ethnique dans le monde arabe envers les minorités juives dont la présence remontait bien avant la conquête islamique.

 

 Cependant, les implications de ces faits n'ont pas la même portée historique selon qu'ils abondent dans le sens de l'idéologie victimaire dominante, revers de la même médaille d'une stigmatisation du judaïsme. La judéophobie prend ainsi appui sur la revendication à l'émancipation, dont le sionisme est l'archétype contemporain, afin de réinstaurer une nouvelle négation de l'identité juive.

 

 C'est pour cela que la « défense » culturelle palestinienne peut s'incarner dans l'anéantissement volontaire des racines culturelles du judaïsme, sans que les chancelleries ne réagissent : j'en veux pour exemples la destruction du tombeau de Joseph, l'incendie de l'antique synagogue de Jéricho le 12 octobre 2000, la destruction des vestiges du Temple dans les fondations du Mont du Temple (esplanade des Mosquées) témoignages éclatants d'une présence et d'une histoire juive liée intrinsèquement à la terre d'Israel.

 

 Le négationnisme acharné de la mémoire arabe peut ainsi être analysé comme l'objectif et l'effet d'un processus de reprise dénaturée de la thématique du déracinement juif, à la différence qu'en aucune façon la pensée juive en exil ne s'est forgée en négation de l'altérité.

 

 Puisque la Shoah avait, temporairement, invalidé pour de larges pans de l'opinion publique la mise au ban du judaïsme comme éternel accusé, la figure de « réfugié », institutionnalisé et pérénisé sous l'égide de l'ONU, offre alors un nouveau motif de stigmatisation, et par conséquent tant la réinstauration d'un déracinement juif renouvelé du point de vue occidental, que l'abolition existentiel de l'irrédentisme juif du point de vue arabo-musulman.

 

 « Cette vulgate de la culpabilité d’Israël est à ce point enracinée dans les médias, les consciences, les idéologies que le rappel du réel et de l’histoire a perdu toute efficacité. Remarquons, néanmoins, la nature dialectique de cette idéologie : si Israël est coupable, les Juifs sont centralement invoqués pour démontrer l’excellence du modèle d’alliance des civilisations, comme l’élément clef de l’entente des « Trois religions ». En fait, l’accusation Israël comme l’invention d’un âge d’or de l’alliance des civilisations dans l’Espagne de la conquête musulmane – malgré leurs conséquences bien réelles dans l’ordre de la politique et de la culture que ce dossier analyse – sont autant de leurres qui contribuent à dépolitiser l’enjeu de la rivalité entre le monde arabo-islamique et l’Union européenne. » (éditorial de Shmuel Trigano de la revue Controverses : « la politisation de la culture », nov. 2008).

 

Sacha Bergheim



L'article est téléchargeable en cliquant ici :

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