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2 novembre 2009 1 02 /11 /novembre /2009 05:18
Sauveurs juifs de Juifs

Dans son ouvrage Une résistance juive, paru en septembre, Paul Giniewski relate son parcours de résistant au sein du Mouvement de jeunesse sioniste (MJS). Longtemps occultées après la fin de la guerre au profit de l'unité gaulliste, quelles sont les spécificités de la résistance juive de France ? Passage en revue.

Paul Giniewski en compagnie de Charlotte. (© Archives Paul Ginievski) 
PHOTO: JPOST

"Sur l'horloge de l'histoire, les aiguilles avancent plus vite pour les Juifs que pour les autres peuples. Le temps des autres n'est pas précisément le nôtre." Le résistant et co-fondateur du CRIF, Adam Rayski, dresse ce constat amer. Face à la machine de guerre nazie, les mouvements de résistance européens ont un objectif : libérer le territoire national du joug allemand. Mais en parallèle, Hitler mène une autre guerre contre les Juifs : une entreprise de mort bien plus rapide que le front des chars. Et la résistance juive va se trouver au cœur de cette course contre la montre.

Fabrications de faux papiers, filières d'évasion, maquis, corps-francs communistes... elle s'articule sur plusieurs fronts. Militaire ou civile, légale ou clandestine, elle a un impératif au-dessus de tous les autres : résister à l'entreprise de mort nazie en sauvant les 300 000 Juifs traqués dans la France occupée, en particulier les enfants. Selon l'historien Lucien Lazare, la résistance juive en a sauvés près de 10 000. Dès 1940, onze réseaux forts de plus six cent membres se partagent le territoire : l'Armée juive, le Mouvement de jeunesse sioniste (MJS), auquel a appartenu l'auteur de l'ouvrage Paul Giniewski, l'Oeuvre de Secours aux enfants (OSE), le Comité Amelot, les réseaux André et Marcel, la Sixième-Eclaireurs israélites de France (EI)... Grenoble, Nice, Marseille sont les épicentres de ces réseaux de Résistance. Villes frontalières, elles ont aussi l'avantage d'être sous occupation italienne, relativement bienveillante à l'égard des Juifs. Les brassards noirs mussoliniens sont moins redoutés que les képis du Maréchal.

Arrivé tout droit de la Belgique occupée, terreau de rafles, Paul Giniewski décrit avec étonnement le bol d'air frais de Grenoble, où ses camarades peuvent chanter des morceaux hébraïques dans le tramway. Pour les journaux antisémites, la zone italienne est décrite comme une "vraie Palestine", ou le "paradis des Juifs". Seuls quelques départements français entre l'Isère et le Var sont concernés. Le reste de la France, partagé entre Vichy et Berlin, reste une souricière.

Comité Amelot, OSE, réseau André : la résistance juive par le sauvetage

Pourtant, longtemps, les mouvements juifs chercheront à conserver une couverture légale à travers l'Union générale des israélites de France (UGIF), pure création de Vichy en novembre 1941, sous demande expresse des Allemands. L'UGIF centralise les tâches d'entraide et de secours. Des fichiers et des adresses qui se sont avérés précieux pour les rafles de la Gestapo. Le patronage légal s'avère fatal pour le Comité Amelot. A la fin de l'année 1942, plusieurs de ses dirigeants, raflés, sont envoyés à Auschwitz.

Créé à Paris en 1940, le comité gère des maisons d'enfants et le dispensaire de la rue Amelot sous le nom "la Mère et l'Enfant". Mais devient rapidement le principal recours pour les Juifs étrangers : filières d'évasion, faux papiers, secours aux internés. Malgré le filet tendu par Vichy, le comité a pu préserver des centaines d'enfants. Mais la pierre angulaire de ce sauvetage reste l'Oeuvre de secours aux enfants (OSE), fondée en 1912 par un groupe de médecins juifs russes. En 1942, elle compte une vingtaine de maisons d'enfants sur tout le territoire. Grâce au soutien d'organisations catholiques et protestantes, elle pourra sauver plus de 1 260 enfants.

Marseillaise et Hatikva

Plusieurs mouvements ont navigué entre résistance civile et résistance armée. Parmi lesquels le Mouvement de jeunesse sioniste (MJS), le réseau de "sauveurs juifs de Juifs". Le MJS est lancé en mai 1942 à l'initiative de Simon Lévitte, transfuge des Eclaireurs israélites. Avec une activité phare : "l'Education physique", ou la fabrication de faux papiers, des contacts avec les mairies amies jusqu'aux ateliers de confection. Une mission très minutieuse tant les enjeux pour les familles cachées sont importants.

Dans son ouvrage, Giniewski évoque un véritable métier. A 17 ans à peine, il devient un artiste-artisan, fabricant "du détail et du gros, de la confection et du sur-mesure, du cousu-main". Des cartes d'identité les plus simples appelées "bifs" à celles plus élaborées, les "synthés", qui nécessitent une transformation totale d'identité. La fin de l'ère italienne change la donne en septembre 1943. Plusieurs membres rejoignent le maquis, dont Otto Giniewski. Les rangs de l'Armée juive (AJ) s'allongent. Ouvertement sioniste, elle salue à la fois le drapeau tricolore et le drapeau bleu-blanc du futur Etat d'Israël. En octobre 1943, Jacques Lazarus conduit le premier groupe de jeunes au maquis de la Montagne noire dans le Tarn. Après le débarquement de 800 Maquisards, il prend le nom de "Maquis bleu-blanc" ou "Peloton Trumpeldor", en hommage à l'homme qui tombé les armes à la main lors du combat de Tel Haï, en Galilée en 1920.

En parallèle, l'Armée juive met en place des corps francs dans les grandes villes. Une mission : démanteler les réseaux de dénonciateurs qui travaillent pour la Gestapo. L'AJ n'est pas le seul mouvement juif à avoir pris les armes. Le scoutisme la fleur au fusil, les Eclaireurs israélites (EI) prennent aussi le chemin du maquis. Robert Gamzon, dit Castor, recrute ses troupes dans les exploitations agricoles, les fermes-écoles. En 1943, les différents groupes fusionnent pour prendre le nom de compagnie Marc Haguenau, forte de trois pelotons. Encadrés par des officiers uniquement juifs, la compagnie a pour mission, dans le Tarn, de recevoir les armes parachutées d'Angleterre et participe à la libération de Castres ou de Nevers.

La résistance armée juive paye un lourd tribut. A l'image des Juifs communistes de la MOI (Main-d'œuvre immigrée). Une cinquantaine de jeunes combattants souvent étrangers sont les auteurs de spectaculaires attentats urbains. Leur premier chef, Mendel (Marcel) Langer, est arrêté en 1943. A son procès, le procureur de Vichy lui lance un terrible réquisitoire : "Vous êtes juif, polonais, communiste. Trois raisons pour moi de demander votre tête." Il l'obtiendra. Marcel Langer sera condamné à mort et guillotiné. Multiforme, la résistance juive a acquis sur le terrain ses lettres de noblesse. Pourtant, dans l'immédiat après-guerre, la machine gaulliste rase tout, comme si la résistance communautaire pouvait faire de l'ombre à l'unité de la République française. Avant d'être reconnue tardivement.

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